Incipit Beckett
Publié le 20/02/2013
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«
II- Les deux monologues : une exposition étrange
A- Celui de Clov
1- Le refus de l’illusion théâtrale
- la « voix atone » : exigée par Beckett, comme une sorte d’abstraction forcée, le refus du réalisme ou de
l’illusion théâtrale .
De même qu’il refuse les effets de style et veut écrire en français.
Va avec « regard fixe »
vers la salle.
- Les silences et l es ruptures : la didascalie « un temps » revient sans ar rêt dans la pièce.
Introduit l’idée de
discontinuité : Les membres de phrase se suivent sans lien.
Le personnage « suit son idée » sans informer le
spectateur, alors que normalement la parole au théâtre sert à informer (cf « la petite veine » de Hamm p.33,
ou Nell perdue dans sa contemplation du souvenir p.36) .
I dée aussi d’un théâtre de l’amenuisement, de
l’émiettement.
D’une parole en décomposition : on parle trop, parler fait partie de l’illusion (cf p.36 : « mais de
quo peuvent -ils parler ? de quoi peut -on parler encore ? »)
2- le thème philosophique du temps :
-« Fini » = provocation (car on est au début de la pièce) mais amorce d’un système d’écho qui est un des fils :
ça va finir, ça peut finir, etc.
- Mais aussi réflexion : ici s’amorce un des gr ands thèmes de la pièce : la fragmentation du temps, son passage
impossible à percevoir.
La triple répétition introduit un effet pathétique.
L’impossible tas : l’impossible
perception de l’écoulement .
On ne peut que soudain se rendre compte que le temps a passé.
Référence au
« paradoxe du tas » d’Eubulide de Milet (cf l’annexe de Wikipedia) : deux grains ne font pas un tas, trois non
plus, ni quatre, ni cent, ni mille… et soudain le tas est là, on ne sait pas comment .
Le grain en soi a l’air d’être
insign ifiant, répétitif, il ne rend pas perceptible le changement qualitatif (passage de l’unité au tout).
= Tragique rapport au temps. Notre conscience n’est pas faite pour sentir le passage du temps et les
transformations qu’il accomplit.
Notre conscience e st toujours « a posteriori » (cf : on voit bien que chaque
année apporte sa rentrée, son mois de juin, son Noël, que tout se répète, mais on ne sent pas qu’on devient
adulte… ou que 10 ans ont passé.
Et soudain, on se retourne : c’est là !)
Le discours de Clov sera finalement un discours sur l’angoisse. La répétition de « c’est fini », « ça va finir », ce
sont les grains qui s’ajoutent un à un, le supplice chinois de la goutte qui tombe sur la tête de Hamm .
Et tout
ce qui se répète dans la pièce fait allus ion à cette conscience malheureuse du temps, inaccessible comme
unité, accessible uniquement comme fragmentation et répétition.
3- Le thème d e la liberté : une peur, un rapport masochiste au pouvoir du chef, de Hamm, l’homme au sifflet.
Un possible espoi r, un élan : « on ne peut plus me punir » = liberté possible, échappatoire ? (je m’en vais…je te
quitte , etc.
) mais l’angoisse reparaît dans l’issue envisagée : la cuisine comme un cube vide.
Image pour une
servitude sans sens et sans fin.
Le mur à contempler indéfiniment : la condition humaine comme
conditionnement sans issue.
Impossibilité d’être libre.
B- Celui de Hamm
1- Le bâillement permanent : allusion à l’ennui – théâtre de l’ennui contre théâtre de l’action, de la distraction.
L’ennui, expérience existentielle dans laquelle on souffre de se sentir exister.
On est de trop dans sa peau.
Le
spectateur doit éprouver cela, au moment où au contraire, on devrait l’intéresser à une intrigue… on retrouve
également avec le bâillement le t emps discontinu.
2- Le propos = la souffrance et les rêves
la souffrance : tout le monde souffre, mais impossible d’évaluer la souffrance, de se sentir solidaire dans la
souffrance (de tels êtres = méprisant), d’y découvrir un absolu.
Bref la souffrance est une constante de la
condition humaine, mais elle ne peut avoir aucun sens. Elle ne nous grandit pas, ne nous accomplit pas, ne
nous apprend rien : on reste vide..
»
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