histoire d'un bon bramin de Voltaire: Comment Voltaire nous fait-il part, dans ce conte, de ses doutes sur le bonheur humain ?

« 1. Le Bramin, comme l’annoncaient les trois adjectifs laudatifs à l’initiale du texte est un homme « savant » et« plein d’esprit ».

A travers son discours, on constate qu’il n’a cessé de se consacrer à l’étude : « j’étudiedepuis quarante ans », « je lis nos anciens livres », « toutes mes recherches ».

De surcroît, il transmet sesconnaissances « j’enseigne aux autres », « instruire ».Cependant, il se sent ignorant.

Ce sentiment paraît obsessionnel dans son discours tant il multiplie lesoccurrences : « je ne sais pas » (4 fois), « j’ignore » (2 fois), « mon ignorance », « je n’ai nulle idée », « je n’aijamais pu m’instruire de ce qui produit la pensée », « je n’ai rien de bon à dire ».

Phrases de formes négativesqui appuient sur l’idée « qu’il ne sait rien b.

les limites de la connaissance. * Le sentiment d’ignorance du Bramin vient du fait qu’il existe des limites à la connaissance, ce que reflètentles interrogations du personnages.

En effet, les grands questionnements existentiels, qui posent la réflexion sur lesens de la vie, demeurent sans réponse : Je ne sais ni d’où je viens, ni qui je suis, ni où j’irai, ni ce que jedeviendrai ».

Les réponses à ces questions sont « inconnues », « tenues cachées ».

Pour le Bramin, il n’y a pourtantque cela d’important.

Le reste est futile c’est pourquoi il ne lui accorde pas d’importance, mais c’est aussi pourquoi ilvit dans la frustration et connaît un sentiment de « désespoir ». c.

les contradictions du savoir * Les livres peuvent augmenter la confusion : « Je lis nos anciens livres et ils redoublent mes ténèbres ».En réalité, Voltaire critique ici ceux qui ne voudraient fonder leurs connaissances que sur les livres passés et nonsur les livres nouveaux (cela renvoie aux ouvrages témoignant de la révolution scientifique commencée au XVIIsiècle : ex, Newton, théorie de la gravitation 1687).

La lecture peut ne pas être éclairante. * Le savoir peut permettre de déduire des connaissances ou de constater empiriquement des faits, maisnon pas de les expliquer.

Qu’est-ce que le temps ? L’éternité ? Qu’est-ce qui produit la pensée ? La question qui sepose alors est qu’est-ce que savoir ? Peut-on considérer qu’un savoir qui se bornerait à déduire ou constater desfaits est « un vrai savoir » ? La réflexion sur la connaissance semble invalider les connaissances.

L’affirmation du« je ne sais rien » semble, dés lors, logique. III.

En présentant, à travers un récit pittoresque et plaisant, un questionnement sur le bonheur et undébat sur sa valeur a.

Le refus de la vision optimiste du monde selon le philosophe Leibniz Le philosophe Leibniz partait du principe que tout est au mieux dans le monde.

C’est vision optimiste des choses estrejetée par le bramin comme étant un non sens.

Quand on lui demande « apprenez-nous comment le mal inonde laterre », il répond sans conviction et parce qu’il ne sais quoi dire que « tout est le mieux du monde ».

Cependant, ilexplique au narrateur que cette réponse ne le satisfait pas, pas plus qu’elle ne satisfait ceux qui souffrent « ceuxqui ont la gravelles, qui ont été mutilés ou ruinés à la guerre n’en croient rien, ni moi non plus ».

Démonstrationpolémique de l’ineptie de la conception de Leibniz. b.

Le rejet d’une conception matérialiste du bonheur A travers ce conte pittoresque qui se situe en Inde comme en témoignent les éléments contribuant à établir lacouleur locale « Inde », « Bramin », « Vistnou », « indienne », Voltaire vient en réalité soulever le débat sur lebonheur.

Il présente un personnage qui a tout pour être heureux mais ne l’est pas.

Quand le narrateur lui demandes’il n’a pas honte d’être malheureux alors que c’est un homme comblé de bienfaits, sa question renvoie en réalité àune conception matérialiste du bonheur.

Or, pour le bramin qui est un homme éclairé, les biens matériels nepermettent pas à eux seuls de combler l’être humain.

L’homme, pour être heureux, a besoin de satisfaire sa curiositéintellectuelle et de trouver des réponses satisfaisantes pour l’esprit aux questions qu’il se pose. c.

Le bonheur, valeur suprême ? C’est la question fondamentale que soulève le texte.

L’idée que le bonheur soit le but suprême à atteindre dans lavie fait consensus.

« Car enfin, de quoi s’agit-il ? D’être heureux.

» Cependant, on ne peut accepter le bonheur àn’importe quel prix.

Le bramin semble dire que la raison, c’est-à-dire l’intelligence, est préférable au bonheur « Je mesuis dit cent fois que je serais heureux si j’étais aussi sot que ma voisine et cependant je ne voudrais pas d’un telbonheur ».

Le narrateur, se range au même avis : « je vis en effet que je n’aurais pas voulu être heureux àcondition d’être imbécile ».

Il interroge ensuite des philosophes qui sont du même avis puis « tout le monde ».

Le faitque la raison vaille mieux que le bonheur fait l’unanimité : « je ne trouvai personne qui voulût accepter le marché dedevenir imbécile pour devenir content ». d.

L’incompatibilité entre le bonheur et la raison C’est encore le bramin qui incarne cette idée puisque le narrateur constate « plus il avait de lumières dans sonentendement et de sensibilité dans son cœur, plus il était malheureux.

Ce constat va loin puisqu’il établit uneproportionnalité entre l’intelligence et le sentiment d’être malheureux par le « plus/plus » adverbes qui établissentune corrélation entre les deux propositions.

Le sens commun contribue donc à notre mal-être.. »