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Gaston Berger, Le Monde en devenir. Après avoir fait soit le résumé soit l'analyse de cette page, dégagez-en un thème à votre choix et commentez-le.

Publié le 16/02/2011

Extrait du document

   LA CULTURE DE L'AVENIR    Nous devons briser les vieilles routines de l'humanisme classique pour être à sa taille. Et je pense que l'Université doit être un des moteurs du progrès. C'est d'elle que l'anthropologie prospective qui mettra en circulation les nouvelles données modernes du savoir, doit recevoir ses lettres officielles. Je considère comme très important que ce soient des hommes de science qui méditent aujourd'hui sur les fins dernières, qui s'interrogent sur les raisons de vivre, qui proposent de nouvelles définitions de l'homme. Cette situation n'a pu s'établir que grâce au rayonnement de la culture universitaire.  Or, les hommes qu'elle a formés, les produits qu'elle a mis en circulation, doivent maintenant revenir en son sein et l'enrichir. Les savants et les chefs d'entreprise doivent proposer à l'Université la nouvelle forme de son ambition : former les hommes de l'avenir. En échange, cette science et ces entreprises recevront une sagesse, une culture qui accroîtront leur vrai pouvoir sur le monde. Le nouvel humanisme ne peut croître que de cette union.    Est progrès ce qui accroît le pouvoir lucide de l'homme, sa maîtrise sur lui-même et sur les lois de la nature, ce qui lui permet de triompher des forces de l'absurde, ce qui suscite son enthousiasme, sa joie de vivre, sa qualité d'être... Je crois que l'Occident doit faire un palier. Il ne s'agit plus maintenant pour les meilleurs esprits de ce temps d'accroître la productivité, de multiplier les biens de consommation, de développer l'information et le confort. Ce stade primaire du progrès va atteindre son seuil, dans une durée très prévisible. Le temps est passé où l'on pouvait parler de l'homme en termes de consommation ou de production, d'électeur ou de prolétaire, de sous-développé ou de ploutocrate. L'humanité a atteint un état complexe supérieur où toutes les données de l'économie, de la culture, de la politique s'interpénétrent. Toutes les courbes se rejoignent et « quelque chose « apparaît à ce point ultime : un certain homme se profile. L'homme du progrès, justement, que la prospective veut définir, qu'elle s'efforce de concevoir totalement avec ses exigences intimes, en opposition à cet homme écartelé, mutilé, spécialisé, que notre époque a installé dans des cases qui se nomment école, usine, magasin, etc. Le progrès c'est quand nous cesserons d'entrer dans l'avenir à reculons, pour le vouloir.    Dans tous les lieux où des hommes responsables ont pris conscience de la relativité de nos connaissances, de la faiblesse de notre style de vie, de la pauvreté de nos ambitions, il existe une classe de civilisés qui a décidé de ne pas assister les bras croisés à la mort des cités. La prospective leur proposera une discipline d'exploration du futur. Une sorte de cartésianisme pour spéculer sur le temps, avec d'infinies précautions certes, de nombreuses réserves, mais une possibilité certaine d'extrapolation, de prévisions, de déterminisme. Et cet élan, ce dynamisme fera partie, un jour, du sens culturel de certains esprits.    La culture n'est pas une fin en soi, c'est un capital qu'il s'agit de mettre en circulation, une expérience de la qualité qui n'a de valeur que si elle vous rend plus libre, plus assuré de vos incertitudes, plus grand pour triompher des erreurs. La culture doit seulement vous préparer au voyage vers tous les « peut-être «. L'art, et spécialement la peinture, m'apparaît comme le film des états d'âme de l'humanité ; le livre d'heures de ses angoisses, de ses rêves, de ses erreurs ; rien n'est plus prospectif que la confrontation d'un esprit même non préparé avec une œuvre. S'il peut s'établir un dialogue, même subconscient, entre une toile et un cerveau, c'est un voyage dans le temps qui s'opère, une confrontation qui oblige à s'évader hors des limites de l'espace. C'est, en quelque sorte, le premier indice d'un pouvoir sur le temps. La contemplation artistique est un élément de l'éducation telle que je la conçois. C'est même sur un certain plan un exercice intellectuel indispensable à l'équilibre d'un esprit. L'art, qui peut aussi être considéré comme de la culture mise en forme, est un grand catalyseur. L'avenir est en esquisse dans l'intuition des créateurs. Une grande synthèse prospective ne peut négliger le mouvement artistique comme force prophétique, cristallisation des aspirations, nœud des forces conservatrices et dynamiques.    Je rêve de faire asseoir ensemble artistes, ingénieurs, chefs d'entreprises, universitaires, hommes de science pour rechercher un langage commun. Ce serait là un travail éminemment prospectif    Gaston Berger, Le Monde en devenir (P.U.F.).

« Berger évoque ensuite l'orientation possible du nouvel humanisme, englobant toutes les sortes de progrès ; l'hommese cultivera de tout ce qui le fera progresser, au-delà des catégories idéologiques dans lesquelles on l'enferme :dominant sa spécialisation, il voudra son avenir au lieu de le subir.

On pourrait se demander dans ces conditions ceque deviennent la culture, l'art ; l'auteur répond à cette question : la nouvelle prospective s'appuiera sur la culture,sur l'art — celui-ci constituant une synthèse dynamique du passé de l'humanité et de son avenir.

La conclusion dutexte réclame donc l'ouverture d'un dialogue nouveau : artistes, ingénieurs, chefs d'entreprises, universitaires etsavants devraient collaborer à ce travail prospectif. COMMENTAIRE ( On développera ce que nous indiquons ici sous la forme d'un PLAN DÉTAILLÉ.) Nous avons choisi de commenter cette phrase du texte : « Une grande synthèse prospective ne peut négliger lemouvement artistique comme force prophétique, cristallisation des aspirations, nœud des forces conservatrices etdynamiques.

» I.

- L'OPPOSITION DE L'ART ET DE LA SCIENCE Cette phrase contient à première vue un paradoxe.

Toute une tradition oppose dans notre pays artistes et hommesde science : elle met l'accent sur le caractère désintéressé de l'art, sur l'utilitarisme de la science.

L'idée de progrèss'impose dans le domaine de la connaissance exacte, alors que l'art semble être seulement un reflet de l'évolutionhumaine.

En fait, l'ambivalence de l'art, à la fois intéressé et désintéressé, semble admise aujourd'hui, et, au niveaumême de l'existence, l'opposition de ces deux niveaux d'activité paraît tout artificielle : elles constituent un besoinpour tout individu, et s'interpénétrent aujourd'hui. II.

- LES APPORTS DE L'ŒUVRE D'ART Mais Gaston Berger précise deux apports de l'œuvre d'art, le premier concernant le passé.

Il est vrai que livres ettableaux constituent des documents, à la fois par leur contenu explicite et par leur écriture ou leurs arrière-plans.Ils peuvent être des cris d'indignation, comme le Candide de Voltaire ou le Guernica de Picasso ; ils peuvent êtreaussi des revendications voilées contre la condition qui est faite à l'homme, comme les tableaux de Van Gogh oucertains nouveaux romans.

L'avenir par-là même se trouve «prophétisé».

L'œuvre peut être envisagée comme unmoyen d'action — et déjà les gravures rupestres du paléolithique tentaient une mainmise sur le futur; toute lalittérature engagée appelle à une reconstruction du monde, du type de celle qu'évoquent les dernières lignes duGerminal de Zola.

Mais l'art met en garde aussi l'homme contre les erreurs auxquelles le pousse son propre progrès :le Metropolis de Fritz Lang, le Meilleur des Mondes d'Aldous Huxley, les ouvrages de Kafka font entendre à nosprospecteurs de civilisation de sombres avertissements.. »

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