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Fin de partie - ACTE I - DIVISION 2 (Beckett)

Publié le 22/02/2012

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Nagg et Nell sont les parents de Hamm. Ils ont perdu leurs jambes dans un accident de tandem et vivent dans deux poubelles situées à l'avant-scène gauche. Ils font l'inventaire de leurs misères, évoquent le passé, une après-midi de bonheur sur le lac de Côme. Nagg raconte à nouveau l'histoire de l'anglais qui faisait tant rire Nell. Mais l'histoire trop souvent entendue n'est plus drôle, Nagg lui-même se force à en rire. Nell, plongée dans ses souvenirs, ne l'a pas écouté. Excédé par leurs bavardages, Hamm ordonne à Clov de boucler les poubelles.
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« Nagg.

- Mal » (page 30). Ils sont tout à l'inverse de Hamm et Clov, dont le conflit règle les rapports.

Entre eux règnent l'harmonie et unetendresse que Beckett teinte d'un peu de ridicule : Nell.

- «Qu'est-ce que c'est, mon gros ? C'est pour la bagatelle ?» (page 29). Aucune des tares de l'âge n'est épargnée à ces deux représentants de la vieille génération.

Beckett en a adoucil'inventaire d'une note d'humour : Nagg.

- «J'ai perdu ma dent. Nagg.

- Notre ouïe a baissé. Nell.

- Notre quoi ?» (page 30). Le malheur a épargné leur amour, ne les a pas séparés, mais pourtant, l'isolement les gagne.

Les seuls êtres quis'aiment ne peuvent plus se rejoindre.

Le vain effort qu'ils tentent pour vaincre la distance séparant les deuxpoubelles, pour s'embrasser, annonce l'emmurement auquel l'usure des sens les réduira.

Ils se voient mal, leur ouïebaisse, la relation avec l'autre s'atrophie : la nuit des sens, préfiguratrice de la mort, se referme sur eux endétruisant les modes de la communication. Une constante référence au passé Les forces vives d'une conversation sont étriquées dans cet univers carcéral où rien ne se passe.

La chronique desmisères physiques, la dégradation des corps, sont la seule actualité qui renouvelle l'existence du couple.

Nourri dansun premier temps à cette source macabre, le dialogue n'a de recours qu'en se tournant vers le passé. Un constant mouvement de navette qui anime un dialogue parcourant sans cesse la distance entre l'hier, l'autrefois,et l'heure présente concrétise les dégradations du temps sur leurs existences : Nagg.

- «Autrefois c'était de la sciure. Nell.

- Hé oui. Nagg.

- Et maintenant c'est du sable» (page 32). Hier, qui concentre tous les souvenirs d'une vitalité perdue revient comme un leitmotiv nostalgique, et grotesque : Nagg.

- «J'ai perdu ma dent...

Je l'avais hier. Nell (élégiaque).

- Ah hier!» (page 30). Nagg.

- «...Hier tu m'as gratté là. Nell (élégiaque).

- Ah hier!» (page 34). Une existence frustrée Les images du passé, comme celle du rêve où Hamm recherche une bienfaisante évasion : «Si je dormais, je feraispeut-être l'amour.

J'irais dans les bois.

[...] Le ciel, la terre.

Je courrais.

On me poursuivrait.

Je m'enfuirais...» (page33), s'opposent aux données de leur situation présente.

Beckett met en présence deux séries antithétiques, l'uneréelle et actuelle, matérialisée.

scéniquement, celle du refuge, de sa lumière grisâtre, de la pénurie, de la débilitédes corps, l'autre irréelle, de l'ordre de l'ailleurs, rêve (conditionnel) et réminiscence (temps passé), tous deux semanifestant cruellement par l'absence et la frustration.

Les culs de jatte et le paralytique évoquent les phantasmesd'une sortie hors de l'espace et du temps dans des visions où dominent les sèmes de la mobilité (tandem, courir),d'une juvénile joie de vivre (faire l'amour, rire, bonheur), d'une nature généreuse (avril, bois, lacs), de la liberté(espace ouvert du ciel opposé à l'espace carcéral).

La fracture est irréductible entre les phantasmes de l'esprit et la réalité des corps.. »

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