Faisant état de l'accueil réservé dans le monde aux gens de lettres les plus importants, Voltaire déclarait : « ... ceux-là ont presque tous été persécutés. Notre misérable espèce est tellement faite que ceux qui marchent dans le chemin battu jettent toujours des pierres à ceux qui enseignent un chemin nouveau ». Dictionnaire philosophique, article : « lettres ». En vous fondant sur des exemples précis, vous direz si vous approuvez la remarque de Voltaire.
Publié le 25/02/2011
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Ire partie • Explication de la thèse. • Restrictions à y apporter. • Modifications au XVIIIe siècle du sens de « gens de lettres «. • Ceux-ci sont longtemps de simples littérateurs, artistes. • Ils sont donc hors de la vie publique, • ou, mieux, patentés par un pouvoir. • De tels artistes sont honorés, • ou même écrivent pour leurs mécènes. IIe partie • Justification de la thèse, • qui malgré des restrictions sérieuses, • est malheureusement vérifiée souvent par les faits. • Multiples grands esprits persécutés par un pouvoir. • Scandales attachés à leurs œuvres et noms. • On craint leur influence sur l'opinion, • car ils ont une arme puissante : leur art. • On excite donc la foule contre eux : jalousies, calomnies, délations.
«
organisé pour soi-disant conjurer le tremblement de terre et que Voltaire termine par cette phrase : « Le même jourla terre trembla de nouveau avec un fracas épouvantable.
» Corollaire obligatoire, le domaine |moral | n'est pasépargné, puisque les philosophes demandent « une morale sans dogmes » (id.), au point d'en arriver à l'attitude deJacques le Fataliste, haussant les épaules « quand il entendait prononcer les mots récompense et châtiment »(Diderot), attitude extrême, bien sûr...
Mais surtout ils sapent les erreurs [politiques et sociales] de leur siècle.
Etvoilà une position toute nouvelle.
Jusqu'alors la plupart des « gens de lettres » sont uniquement des littérateurs (ouartistes) ne se mêlant pas directement des affaires publiques.
Ils étaient souvent simples artistes comme les poèteslyriques du Moyen Âge, ou amateurs mondains (Baroques et Précieux du XVIIe siècle).
D'autres dépendaientdirectement d'un pouvoir qui leur passait commande, ainsi Virgile et ses Géorgiques, sous Auguste, Marot, poète decour payé par François Ier, les grands classiques, tels Molière, Boileau, Racine...
qui écrivent pour Louis XIV : piècesde Molière composées en quelques jours pour les divertissements royaux, Esther et Athalie, tragédies écrites pourMme de Maintenon et ses élèves de Saint-Cyr par Racine, par ailleurs historiographe du roi ainsi que son ami Boileau.Évidemment ils sont créateurs, à part entière, mais comme ils sont en plein accord avec leur cadre social et lespouvoirs dirigeants, ils répondent naturellement à leurs exigences.
Bien d'autres écrivains ont su soit se couler dansle moule de la pensée de leur époque, soit en être normalement l'écho ou le représentant.
Ils se veulent moralistes,souvent, et enseignent les bonnes mœurs dans leurs écrits — mais sans toucher à l'ordre social établi —, ainsiCorneille et Molière dans leurs pièces de théâtre ou Boileau et La Bruyère.
Aussi, loin d'être persécutés, ils sontappréciés parfois même comblés d'honneurs.
Le poète latin Horace est ami de Mécène et d'AuGuste; il correspondparfaitement à un courant d'opinion nécessaire aux Romains après tant de guerres civiles.
Les poètes de la Pléiade— particulièrement Ronsard, sacré Prince des Poètes — ont une conception poétique et sociale reconnue de tous eten premier du pouvoir.
Aussi Du Bellay rappelle-t-il, à propos de Ronsard :
« Tu courtises les rois et d'un plus heureux son
Chantant l'heur de Henri [roi Henri II] qui son siècle décore,
Tu t'honores toi-même, et celui qui honore
L'honneur que tu lui fais par ta docte chanson.
» Les XIXe et XXe siècles fournissent d'autres exemples de mêmeordre, plusieurs hommes de lettres et arts importants y ayant été maîtres de courants littéraires ou artistiques etreconnus plus ou moins vite comme tels : ainsi Leconte de Lisle, chef de file du Parnasse.
Pour d'autres, c'est àcertaines périodes de leur vie qu'ils sont officiellement honorés, quitte à être persécutés à d'autres moments : Hugo,nommé pair de France au cours de la Monarchie de Juillet, puis devenu véritable symbole sous la IIIe République, etdont les funérailles seront deuil national.
Successivement Claudel
— ambassadeur d'État d'ailleurs —, Valéry, S1 John Perse ou Bachelard, Merleau-Ponty, Lévi-Strauss ne se sont pascontentés d'enseigner des chemins nouveaux, esthétiques ou philosophiques, mais reconnaissance de leur valeur,charges et récompenses honorifiques ont été ou sont leur lot.
L'affirmation de Voltaire comporte donc des restrictions sérieuses.
Pourtant dès que l'on se penche bien sur leproblème soulevé, on se rend compte que les grands esprits persécutés sont légion.
C'est Socrate, condamné àboire la ciguë « sous prétexte qu'il corrompait la jeunesse », ou Galilée contraint d'abjurer que la terre tourne.
Quede bûchers vont s'allumer au XVIe siècle, tandis que Rabelais pour y échapper fuit, se cache et qu'on ne sait mêmepas où il a terminé sa vie.
Au XVIIe siècle des penseurs indépendants comme Bayle et Descartes voient leurs livrescondamnés et doivent s'exiler.
Toute période progressiste qui revalorise l'homme et une pensée libre provoqueparallèlement la réaction de ceux qu'elle dérange ou inquiète.
La Sorbonne et l'Église, à l'origine pourtant terrainselles aussi de nouveauté et d'asile, deviennent persécutrices : on ne veut pas admettre pendant longtemps, parexemple, que le sang circule dans le corps; au nom de dogmes et rituels qui remplacent la véritable penséechrétienne ou parce que sclérose ou intérêts la paralysent, pire la poussent à rejeter ou à écraser l'esprit critique,en leur nom donc s'élèvent tracasseries, persécutions, voire supplices.
Les foules suivent, nourries trop souvent deprincipes d'autorité.
L'opinion commune, encline par paresse ou traditionalisme à se laisser mener, défend activementce qu'elle n'a pas conçu et qui lui paraît parole d'évangile.
Or toute conception nouvelle semble insolite doncinquiétante ou même sacrilège parce qu'elle contraint les esprits à un retour aux sources et dérange leurs habitudes.Ainsi Bayle dans ses Pensées sur la comète ou son Dictionnaire historique et critique s'en prend à ces légendes etsuperstitions qu'accrédite l'opinion commune.
Celle-ci défend ce qu'elle juge être bon parce que c'est devenucoutume ou tradition, ou parce qu'elle a peur, ou parce que certains pouvoirs ont conditionné cette crainte.
Voltaireévidemment ne pouvait penser à Rousseau en écrivant cette phrase des Lettres anglaises; il ne saurait parler en safaveur.
Mais nous, nous pouvons évoquer celui dont La Profession de foi du vicaire savoyard irrite le Parlement etqui, décrété de prise de corps, sera pendant huit ans chassé de ses asiles successifs.
Donc toute pensée un peulibre et neuve risque d'effrayer et de soulever une réaction négative contre l'écrivain ou l'artiste qui la professe ;d'abord à cause de sa conception critique elle-même, comme nous venons de le voir.
Mais aussi parce qu'elle touchepar sa liberté ou sa nouveauté des domaines soit tabous, soit réservés.
Un des plus pointilleux est celui de la vie etde sa conduite quotidienne, de ce que l'on appelle d'un terme général donc assez vague : la morale.
C'est ainsi queFlaubert est traîné devant un tribunal à la parution de Madame Bovary : on lui reprochait une héroïne qui a desamants.
Même attaque subie par Baudelaire et ses Fleurs du mal qui sont condamnées en correctionnelle pourimmoralité.
Voir aussi les scandales soulevés par les pièces de Genet.
Pour peu que l'artiste — comme du XVIIIesiècle au XXe siècle — affirme une position politique dont on juge qu'elle risque de menacer ou mettre en doutecertains privilèges (par exemple au XIXe siècle la puissance d'argent ou les inégalités), la société bien pensantes'exaspère : relisons les injures ou calomnies répandues sur Zola, Gide, Picasso...
Il faut dire que ce type d'artiste,.
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