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Extrait étudié de la Peste de Camus: Le docteur Rieux regardait toujours par la fenêtre....

Publié le 05/02/2012

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Le docteur Rieux regardait toujours par la fenêtre. D'un côté de la vitre, le ciel frais du printemps, et de l'autre côté le mot qui résonnait encore dans la pièce : la peste. Le mot ne contenait pas seulement ce que la science voulait bien y mettre, mais une longue suite d'images extraordinaires qui ne s'accordaient pas avec cette ville jaune et grise, modérément animée à cette heure, bourdonnante plutôt que bruyante, heureuse en somme, s'il est possible qu'on puisse être à la fois heureux et morne. Et une tranquillité si pacifique et si indifférente niait presque sans effort les vieilles images du fléau, Athènes empestée et désertée par les oiseaux, les villes chinoises remplies d'agonisants silencieux, les bagnards de Marseille empilant dans des trous les corps dégoulinants, la construction en Provence du grand mur qui devait arrêter le vent furieux de la peste, Jaffa et ses hideux mendiants, les lits humides et pourris collés à la terre battue de l'hôpital de Constantinople, les malades tirés avec des crochets, le carnaval des médecins masqués pendant la Peste noire, les accouplements des vivants dans les cimetières de Milan, les charrettes de morts dans Londres épouvanté, et les nuits et les jours remplis, partout et toujours, du cri interminable des hommes. Non, tout cela n'était pas encore assez fort pour tuer la paix de cette journée. De l'autre côté de la vitre, le timbre d'un tramway invisible résonnait tout d'un coup et réfutait en une seconde la cruauté et la douleur. Seule la mer, au bout du damier terne des maisons, témoignait de ce qu'il y a d'inquiétant et de jamais reposé dans le monde. Et le docteur Rieux, qui regardait le golfe, pensait à ces bûchers dont parle Lucrèce et que les Athéniens frappés par la maladie élevaient devant la mer. On y portait les morts durant la nuit, mais la place manquait et les vivants se battaient à coups de torches pour y placer ceux qui leur avaient été chers, soutenant des luttes sanglantes plutôt que d'abandonner leurs cadavres. On pouvait imaginer les bûchers rougeoyants devant l'eau tranquille et sombre, les combats de torches dans la nuit crépitante d'étincelles et d'épaisses vapeurs empoisonnées montant vers le ciel attentif. On pouvait craindre…

 Mais ce vertige ne tenait pas devant la raison. Il est vrai que le mot “peste” avait été prononcé, il est vrai qu’à la minute même le fléau secouait et jetait à terre une ou deux victimes. Mais quoi, cela pouvait s’arrêter. Ce qu’il fallait faire, c’était reconnaître clairement ce qui devait être reconnu, chasser enfin toutes ces ombres inutiles et prendre les mesures qui convenaient. Ensuite la peste s’arrêterait parce que la peste ne s’imaginait pas ou s’imaginait faussement. Si elle s'arrêtait, et c'était le plus probable, tout irait bien. Dans le cas contraire, on saurait ce qu'elle était et s'il n'y avait pas moyen de s'en arranger d'abord pour la vaincre ensuite.

Le docteur ouvrit la fenêtre et le bruit de la ville s'enfla d'un coup. D'un atelier voisin montait le sifflement bref et répété d'une scie mécanique. Rieux se secoua. Là était la certitude, dans le travail de tous les jours. Le reste tenait à des fils et à des mouvements insignifiants, on ne pouvait s'y arrêter. L'essentiel était de bien faire son métier.

Fort de son succès littéraire, Albert Camus publie en 1947, c'est-à-dire juste après les désastres de la Seconde Guerre Mondiale, son fameux roman La Peste. L’histoire se déroule à Oran, ville d’Algérie. Les habitants vont devoir faire face à une terrible maladie mortelle : la peste. Rieux , un des héros principaux tente de repousser la souffrance et l’absurdité de la vie. Il se fait ainsi porte-parole de l’auteur lui-même. Le passage que nous allons étudier est un moment clef de l’œuvre. Il s’agit encore du début du roman. La ville va bientôt être infectée, Rieux, médecin, doit faire face à cela. Il tente de définir la situation tout en restant lucide pour ne pas sombrer vers un pessimisme.

Problématique :  En quoi ce texte atteste de la vision d’un homme de science cultivé tel que nous l’entendons au XIXème siècle ?

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« on saurait ce qu'elle était et s'il n'y avait pas moyen de s'en arranger d'abord pour la vaincre ensuite. Le docteur ouvrit la fenêtre et le bruit de la ville s'enfla d'un coup.

D'un atelier voisin montait le sifflement bref et répété d'une scie mécanique.

Rieux se secoua.

Là était la certitude, dans le travail de tous les jours.

Le reste tenait à des fils et à des mouvements insignifiants, on ne pouvait s'y arrêter.

L'essentiel était de bien faire son métier. Introduction : Fort de son succès littéraire, Albert Camus publie en 1947, c'est-à-dire juste après les désastres de la Seconde Guerre Mondiale, son fameux roman La Peste.

L’histoire se déroule à Oran, ville d’Algérie.

Les habitants vont devoir faire face à une terrible maladie mortelle : la peste.

Rieux , un des héros principaux tente de repousser la souffrance et l’absurdité de la vie. Il se fait ainsi porte-parole de l’auteur lui-même.

Le passage que nous allons étudier est un moment clef de l’ œuvre.

Il s’agit encore du début du roman.

La ville va bientôt être infectée, Rieux, médecin, doit faire face à cela.

Il tente de définir la situation tout en restant lucide pour ne pas sombrer vers un pessimisme. Problématique : En quoi ce texte atteste de la vision d’un homme de science cultivé tel que nous l’entendons au XIXème siècle ? Pour cela, nous verrons dans un premier temps que le narrateur voyage dans ses pensées, nous voyons ainsi ses impressions et images sur la peste.

Puis nous traiterons de la réaction à adopter face à ce fléau qui naît. I. Impressions et images intériorisées de Rieux au sujet de la Peste. »

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