EXPLICATION LINEAIRE "venus anadyomene" de raimbaud
Publié le 19/05/2020
Extrait du document
«
Le troisième vers prolonge le précédent par un enjambement, et laisse enfin apparaître le
verbe d’une phrase jusque-là incomplète : « D’une vieille baignoire émerge ».
La scénette
apparaît plus clairement, au présent de description.
Rimbaud remobilise le motif artistique de la Vénus sortant des eaux, pour le dégrader : la mer
est devenue une banale baignoire bon marché, en zinc, et peinte en vert.
Cette couleur,
associée à l’absinthe et à la débauche parmi les milieux décadentistes de la fin du XIXe siècle,
pourrait même assimiler la déesse à la figure de la prostituée.
L’adjectif « vieille » est oxymorique lorsqu’il s’agit de décrire Vénus naissante.
Rimbaud
déploie ainsi une esthétique cruelle qui avilit l’incarnation de la beauté.
Ce renversement esthétique est également à l’œuvre dans le choix des adjectifs « lente et
bête ».
L’allitération sourde en « t » restitue la pesanteur de la déesse.
Ce quatrain liminaire se clôt sur une remarque satirique portant sur la disgrâce physique de
Vénus : « Avec des déficits assez mal ravaudés ».
La locution adverbiale « assez peu »
constitue une litote insistant sur la beauté perdue du visage de la déesse.
Le point-virgule prolonge la phrase, qui énonce une longue, insoutenable et morbide
description.
II L’horrible Vénus émerge jusqu’au cou
(Deuxième quatrain)
Le deuxième quatrain dénigre le cou avec la contre-assonance disgracieuse « gras et gris »,
reprise et inversée dans l’adjectif « larges ».
Le substantif « col » animalise la déesse, dont
émergent les omoplates « qui saillent ».
Le rejet insiste sur le dur relief des os, qui s’oppose
aux représentations charnues et plantureuses de la déesse.
L’enjambement maintient la brisure
des vers, dont l’enchaînement irrégulier représente la laideur bizarre de Vénus.
Vénus est également petite (« le dos court »), ce qui contredit également l’idée de grandeur et
d’expansion associées à sa naissance.
L’anaphore ternaire en « qui » multiplie les propositions relatives brèves.
Elle ne confère à
la déesse aucune grâce, aucune fluidité, quand bien même elle sort des eaux.
La déesse est au contraire pesante et grasse.
Cette lourdeur est restituée en une durable
allitération en « r », des vers six à huit : « rentre », « ressort », « rondeurs des reins »,
« prendre essor », « La graisse sous la peau paraît ».
Les verbes de perception « sembler » et « paraître » témoignent du regard alerte du poète,
sensible à ces détails infâmes.
La déesse traditionnellement lisse, pure et vierge, voit désormais sa peau bosselée par la
graisse, la cellulite.
Les « feuilles plates » pourraient également désigner les mauvais (« plates ») poèmes
(« feuilles ») ou les tableaux d’éloge à Vénus, auxquels Rimbaud répond ici avec une ironie
féroce.
III L’abominable Vénus sort des eaux
(Tercets)
Le premier tercet maintient la dynamique du poème : Vénus sort des eaux de la baignoire.
Le
substantif « échine » l’animalise, et le groupe nominal « le tout » la réifie..
»
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