Etienne et la violence mobilisatrice : Quatrième partie, chapitre VII (Germinal de Zola)
Publié le 20/11/2012
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Ce texte structure une vision poétique, création de l'esprit qui s'assimile les éléments concrets du réel pour les recréer, les resituer dans une tout autre perspective, étendue aux dimensions d'un espace et d'un temps sans frontières. Telle est la vision que, selon les repères culturels auxquels on se réfère, il est permis de qualifier de poétique, d'épique ou de mythique. Les différentes lignes de force qui se dégagent de l'analyse attestent que l'argumentation d'Etienne, telle qu'elle est transposée par le narrateur, exprime une logique plus affective que rationnelle, elle vise à agir sur la sensibilité, à mobiliser l'imagination...
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Bonnemort, il l'étalait comme un drapeau de mi
sère et de deuil, criant vengeance.
En phrases ra-
s pides, il remontait au
premier Maheu, il montrait
toute cette famille usée à la mine, mangée par la
Compagnie, plus affamée après cent ans de travail ;
et, devant elle, il
mettait ensuite les ventres de la
Régie,
qui suaient l'argent, toute la bande des ac-
10 tionnaires entretenus comme des filles depuis un
siècle, à ne rien faire, à jouir de leur corps.
N'était
ce pas effroyable? un peuple d'hommes crevant au
fond de père
en fils, pour qu'on paie des pots-de
vin à des ministres,
pour que des générations de
1s grands seigneurs et de bourgeois donnent des fêtes
ou s'engraissent au coin de leur
feu! Il avait étudié
les maladies des mineurs, il les faisait défiler
toutes, avec des détails effrayants : l'anémie, les
scrofules, la bronchite noire, l'asthme
qui étouffe,
20 les rhumatismes qui paralysent.
Ces misérables, on
les jetait en
pâture aux machines, on les parquait
ainsi que
du bétail dans les corons, les grandes
Compagnies les absorbaient
peu à peu, réglemen
tant l'esclavage, menaçant d'enrégimenter tous les
2s travailleurs d'une nation, des millions de bras,
pour la fortune d'un millier de paresseux.
Mais le
mineur n'était plus l'ignorant, la brute écrasée dans
les entrailles
du sol.
Une armée poussait des pro
fondeurs des fosses,
une moisson de citoyens dont
30 la semence germait et ferait éclater la terre, un jour
de
grand soleil.
Et l'on saumit alors si, après qua
rante années de service, on oserait offrir cent cin
quante francs de pension à un vieillard de soixante
ans, crachant la houille, les jambes enflées
par l'eau
35 des tailles.
Oui ! le travail demanderait des
comptes au capital, à ce
dieu impersonnel, inconnu
de l'ouvrier, accroupi
quelque part, dans le mystè
re de son tabernacle,
d'où il suçait la vie des meurt-.
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