En vous appuyant sur votre lecture des Châtiments, dites quel sens vous donnez à ce vers fameux d'« Ultima Verba » (Livre VII, 14) : « Et s'il n'en reste qu'un, je serai celui-là!»
Publié le 16/03/2015
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Lorsqu'il constate que « Dieu se dérobe et nous échappe « (« Lux «), qu'il s'est détourné de l'ordre humain en laissant la tyrannie s'imposer en France en plein XIXe siècle (« Chanson «, Livre V, 2), Hugo se propose de remplacer le système de la justice — qu'il soit humain ou divin —, en se substituant aux juges qui condamnent et aux prêtres qui excommunient. Toutefois l'appel vers Dieu (« Ô Dieu vivant, mon Dieu! prêtez-moi votre force «) se révèle essentiel pour celui-là qui est seul (« moi qui ne suis rien «).
«
DISSERTATIONS LITTÉRAIRES
Il -LE SOLITAIRE
L'absence d11J>euJ>I~ et la _J>résence du Moi
Le solitaire sur son île ne cesse, dans Les Châtiments, d'appeler le peuple à la
révolte; les chansons qui sont disséminées dans le recueil montrent la dimension
populaire que voulait conférer Hugo à cet ouvrage.
Il faut donc réveiller
le peuple («Lazare! Lazare! Lazare!/ Lève-toi »,Livre Il, 2), car il s'est comme absenté de
puis
le coup d'État; le motif du sommeil («La caravane», « À ceux qui dorment»,
«
Luna ») ou des ténèbres est récurrent pour signifier cette reculade.
Mais « celui
là » sait se faire la voix anonyme et impersonnelle qui parle pour le peuple en
son absence,
qui répond à sa place et ne se soucie pas de la « prudence » : « je
laisse à ceux qui veulent longtemps vivre/Cette lâche
vertu» (Livre VI, 12).
L'absence de Dieu et la voix de la nature
Lorsqu'il constate que« Dieu se dérobe et nous échappe»(« Lux»), qu'il s'est
détourné de l'ordre humain en laissant la tyrannie s'imposer en France en plein
XIXe siècle(« Chanson», Livre V, 2), Hugo se propose de remplacer le système
de la justice -qu'il soit humain ou divin-, en se substituant aux juges qui condam
nent et aux prêtres qui excommunient.
Toutefois l'appel vers Dieu (
« Ô Dieu vi
vant, mon Dieu! prêtez-moi votre force») se révèle essentiel pour celui-là qui est
seul(« moi qui ne suis rien»).
Le solitaire sur son rocher se fie plus à l'océan qui ne trompe jamais (en matière
de marée) qu'au peuple (Livre VI, 9).
Par ailleurs, la voix de l'océan ne fait que re
couvrir et donner plus de force à la voix du solitaire qui lui laisse alors la parole :
«Le monde captif, sans lois et sans règles, /Est aux oppresseurs» (Livre I, 4).
Ill -LE POÈTE
Le poète belluaire*
«Celui-là», le seul qui reste, et qui s'élève face à Napoléon III en tant qu'intel
lectuel et artiste, c'est effectivement Hugo.
Baudelaire, dans une lettre du 5 mars
1852 déclare: «Le 2 décembre m'a physiquement dépolitigué »,et l'on a pu dire
que
« cette formule pourrait servir de devise à la littérature des années qui suivent le demi-siècle» (Ross Chambers).
Hugo apparaît comme le seul qui se bat, animé d'une « sainte fureur», et« Pareil aux noirs vengeurs devant qui l'on se sauve,/
J'écraserai
du pied l'antre et la bête fauve/L'empire et l'empereur» (Livre Il, 7).
Le gardien de la lani;u_e
« Celui-là »est aussi le poète qui utilise dans les Châtiments une langue duelle
qui relève à la fois de l'histrion et de l'assassin (comme l'était Louis Napoléon)
mais qui permet de se libérer de cette tyrannie en la dénonçant, en livrant le tyran à
Dieu (
« Sacer esta ») et en redonnant à la langue son rôle de Verbe c'est-à-dire
son pouvoir d'action,
que l'on peut lire entre autres dans l'image prégnante du
Progrès.
« Celui-là» est aussi devenu prophète.
Conclusion.
Les Châtiments apparaissent effectivement comme un recueil
unique
au XIXe siècle, à la fois trop actuel par son engagement politique et
totalement décalé par rapport au mouvement littéraire à la mode (l'art pour
l'art, Parnassiens), mais ce vers
d'« Ultima verba »montre bien le rôle
dont Hugo se sentait investi en face de la tyrannie.
Par là
le
Je de Hugo
pourrait bien
se révéler comme un modèle actuel.
LES CHATIMENTS DE VICTOR IJUGO ~.
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