En prenant des exemples précis dans les oeuvres de Gérard de Nerval, vous montrerez dans quelle mesure celui-ci peut être considéré comme un précurseur du symbolisme.
Publié le 05/05/2011
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Explication. La difficulté principale du sujet réside dans la définition du symbolisme, qu'il faut donner avant d'étudier l'oeuvre de Gérard de Nerval. Il ne peut être question de faire un panorama du mouvement symboliste, mais seulement d'analyser les caractères principaux de cette nouvelle poétique : • Le sens du mystère et de l'univers surnaturaliste. • Les correspondances entre les divers sens. • La forme musicale. L'oeuvre de Gérard de Nerval possède-t-elle ces trois qualités et dans quelle mesure? Tout d'abord, remarquons que l'on ne peut séparer les contes des poésies, les premiers expliquant souvent les secondes, et étant également remplis de rêverie. C'est que Gérard de Nerval se met tout entier dans son oeuvre, avec ce mélange unique de lucidité et d'imagination confuse; avant Baudelaire et Verlaine, il vit son oeuvre.
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La treizième revient; c'est encore la première,Et c'est toujours la seule — et c'est le seul moment...(Chimères)Comme Adrienne et Aurélie, Octavie ne fera que passer, nostalgique souvenir.
• Cette analyse montre quels liens étroits unissent le rêve et la réalité chez Gérard de Nerval.
Sylvie, Adrienne,Aurélie et Octavie ont réellement existé, mais elles sont devenues aussi des symboles; avec chacune d'elles, lepoète imagine une existence différente et il se demande parfois s'il l'a vécue ou rêvée.
Adrienne surtout devient laMuse du poète, une muse beaucoup moins abstraite que les allégories inventées d'ordinaire par les écrivains.
Elle luiest apparue dans un cadre familier et plusieurs fois revu; son souvenir s'est fixé par des impressions brèves, maisintenses et qui intéressaient tous les sens du poète : l'or des cheveux formant contraste avec le vert de l'herbe, lamélodie que chante Adrienne, le chaste baiser dans la ronde constituent les trois charmes de l'envoûtement.
Sil'état de rêverie super-naturaliste ne se distingue plus de l'état normal, et s'il est assez puissant non seulement poursusciter la création poétique, mais encore une suite d'actions, comme le retour de Paris à Loisy la nuit, ou latournée théâtrale d'Aurélie, c'est qu'il ne dépend pas d'une simple griserie de l'imagination : la correspondance desdifférents sens lui a donné une intensité telle qu'un seul souvenir suffira ensuite à évoquer toute la scène et que lepoète s'abandonnera au plaisir de la sorcellerie évocatoire.
La musique.
• La poésie, mieux que la prose, est apte à traduire le rêve.
Aussi retrouve-t-on dans les poèmes deGérard de Nerval les divers caractères analysés dans ses nouvelles, mais avec un sens accru du mystère et de lamusique.
L'odelette intitulée les Cydalises, qui évoque les folles amies de l'impasse du Doyenné, est aussiharmonieuse et fluide qu'une chanson de Verlaine.
Gérard de Nerval déclare lui-même qu'elle est une ode véritable,destinée à être chantée : elle est venue, malgré moi, sous forme de chant; j'en avais trouvé en même temps lesvers et la mélodie que j'ai été obligé de faire noter, et qui a été très concordante aux paroles.
Les cydalistes
Où sont nos amoureuses?Elles sont au tombeau :Elles sont plus heureuses,Dans un séjour plus beau !Elles sont près des anges,Dans le fond du ciel bleu,.Et chantent les louangesDe la mère de Dieu.O blanche fiancée !O jeune vierge en fleur !Amante délaissée,Que flétrit la douleur!L'éternité profondeSouriait dans vos yeux...Flambeaux éteints du monde Rallumez-vous aux cieux !
(Petits châteaux en Bohême)
Le poète a transfiguré les compagnes de la rue du Doyenné en leur ôtant toute matérialité; les toilettesexcentriques, les orgies, les rires, les chansons ont disparu: ce n'était qu'un masque de cette éternité, que le poèteétait seul à discerner.
Mais le souvenir de cette brillante et frêle beauté revit dans l'éclat des astres.
• L'inspiration symboliste est plus sensible encore dans les poèmes consacrés au souvenir d'Adrienne, en particulierdans la pièce intitulée Fantaisie.
Fantaisie: Il est un air pour qui je donneraisTout Rossini, tout Mozart et tout Weber,Un air très vieux, languissant et funèbre,Qui pour moi seul a des charmes secrets.Or, chaque fois que je viens à l'entendre,De deux cents ans mon âme rajeunit :C'est sous Louis Treize...Et je crois voir s'étendreUn coteau vert que le couchant jaunit;Puis un château de brique à coins de pierre,Aux vitraux teints de rougeâtres couleurs,Ceint de grands parcs, avec une rivièreBaignant ses pieds, qui coule entre des fleurs;.
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