En étudiant dans ce poème l'imagination poétique et le sens de l'harmonie, expliquez comment le poète nous communique son émotion patriotique.
Publié le 11/09/2014
Extrait du document
TEXTE
[Dans ces strophes finales d'un poème publié dans la clandestinité, Aragon s'adresse aux prisonniers, aux déportés, puis à la France tout entière...]
«Je vous salue ma France où les vents se calmèrent « Ma France de toujours que la géographie « Ouvre comme une paume aux souffles de la mer «Pour que l'oiseau du large y vienne et se confie
« Je vous salue ma France où l'oiseau de passage « De Lille à Ronceveaux de Brest au Mont-Cenis «Pour la première fois a fait l'apprentissage « De ce qui peut coûter d'abandonner un nid
«Patrie également à la colombe ou l'aigle
« De l'audace et du chant doublement habitée
« Je vous salue ma France où les blés et les seigles
« Mûrissent au soleil de la diversité
« Je vous salue ma France où le peuple est habile « A ces travaux qui font les jours émerveillés «Et que l'on vient de loin saluer dans sa ville «Paris mon coeur trois ans vainement fusillé
« Heureuse et forte enfin qui portez pour écharpe « Cet arc-en-ciel témoin qu'il ne tonnera plus «Liberté dont frémit le silence des harpes « Ma France d'au-delà le déluge salut «
ARAGON, Août-Septembre 1943 - Le Musée Grévin, «Je vous salue ma France «, Éditeurs Français Réunis.
Ce n'est pas seulement dans la fin du poème que la musique se mêle étroitement à l'émotion. Il est aisé de suivre la continuité du mouvement qui entraîne sans effort le lecteur de ces strophes. Aragon a réussi à nous suggérer la même ferveur incantatoire, le même élan sensible que celui qui anime telle ou telle litanie de la liturgie catholique, en particulier la salutation évangélique :
« Je vous salue, Marie «...
«
ARAGON 39
En étudiant dans ce poème l'imagination poétique et le
sens de l'harmonie, expliquez comment le poète nous
communique son émotion patriotique.
COMMENTAIRE PROPOS~
INTRODUCTION
Aragon écrivit ce poème en 1943, sous l'occupation allemande.
Au début il a évoqué, comme le vœu d'un avenir meilleur, le retour des prisonniers et des deportés.
Dès la quatrième
strophe, il s'adresse à la France elle-même qui, avec la paix
retrouvée, nous restituera tout un passé prestigieux
d'où sur
gissent châteaux et cathédrales.
Dans les cinq strophes que
nous avons à commenter, le Salut à la France s'élargit : l'invo
cation embrasse toutes ses richesses géographiques, matérielles
et morales et s'achève sur l'image symbolique d'un drapeau qui domine Paris.
La musique régulière des couplets psalmodiés par le récitant s'élève peu à peu jusqu'à des accords triomphants
résolus enfin en un silence solennel.
1.
LE SENS DE L'HARMONIE
Ce n'est pas seulement dans la fin du poème que la musique
se mêle étroitement à l'émotion.
Il est aisé de suivre la continuité
du mouvement qui entraîne sans effort le lecteur de ces strophes.
Aragon a réussi à nous suggérer la même ferveur incantatoire,
le même élan sensible que celui qui anime telle
ou telle litanie
de la liturgie catholique, en particulier la salutation évangélique :
« Je vous salue, Marie » ...
Cet élan est soutenu
par la reprise, de proche en proèhe, de
la formule d'invocation par laquelle débute le poème : «Je vous salue, ma France ».
Elle commande et lance la première,
la seconde et la quatrième strophe.
Elle se retrouve à une place
différente dans la troisième, sans doute pour rompre une régu
larité qui donnerait à ce poème chargé d'émotion, une allure
trop oratoire.
Elle revient aussi, reprise partiellement, comme
un écho, au début
du second vers : «Ma France .de toujours».
Et c'est sur elle enfin que s'achève le poème, dans l'évocation
prophétique, triomphante et riche d'une sérénité retrouvée,
de la patrie enfin libérée :
«Ma France d'au-delà le déluge, salut».
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Expliquez et commentez ces paroles de Ferdinand Alquié lors des Entretiens de Cerisy-la-Salle sur le surréalisme en juillet 1966 (Flammarion) : «Dans le surréalisme, c'est par l'acte poétique que l'on atteint le merveilleux. Mais le merveilleux se réduit-il à l'acte poétique lui-même ? C'est le problème. Est-ce que l'acte poétique nous le découvre ? Est-ce que l'acte poétique nous le dévoile, ou est-ce que l'acte poétique le crée de toutes pièces ? Car enfin, il faut bien insister auss
- On peut lire ou parcourir, parce qu'on en a envie, un recueil de poésies, étudier un poète en classe, lire des yeux un poème, le dire à haute voix; on peut l'analyser pour en faire une explication ; on peut aussi entendre chanter de la poésie mise en musique, en écouter au cours d'un récital ou d'un spectacle poétique, ou encore en écrire soi-même. Voilà, en effet parmi d'autres, plusieurs manières d'avoir accès à la poésie, et sans doute avez-vous eu l'expérience de l'une ou l'autre d
- « La poésie montre nues, sous une lumière qui secoue la torpeur, les choses surprenantes qui nous environnent et que nos sens enregistraient machinalement [...] Mettez un lieu commun en place, nettoyez-le, frottez-le, éclairez-le de telle sorte qu'il frappe avec sa jeunesse et avec la même fraîcheur, le même jet qu'il avait à sa source, vous ferez œuvre de poète. » Jean COCTEAU, Le secret professionnel. Éclairez par des exemples précis tirés de vos lectures ou par révocation d'expérien
- Charles Péguy a écrit : « On n'entend rien à la poétique de Corneille si l'on n'y voit qu'un Conflit pour ainsi dire intellectuel et livresque entre le devoir pris au sens des moralistes et la passion prise au sens des moralistes... Il ne fait aucun doute que, dans Corneille, l'honneur est aimé d'amour et que l'amour est honoré d'honneur ». Expliquez ce point de vue. Le partagez-vous ?
- Jean-Claude Renard, rendant compte de son expérience de poète, analyse dans les lignes qui suivent la relation qu'il entretient avec son propre langage : « Il a ses racines en moi comme j'ai mes racines en lui. Il est un miroir à double réflexion où je reconnais ce que je suis et ce que je ne suis pas. Par suite, c'est un miroir qui me trahit- aux deux sens de ce verbe. Car il donne de moi une image à la fois plus vraie et plus fausse que celle que je puis, consciemment ou inconscie