ELOGE DE L'HYPOCRISIE - DOM JUAN OU LE FESTIN DE PIERRE (ACTE V, SCENE 2)

« favorable, il s'agit d'une dénonciation illustrée d'exemples, traitant de l'hypocrisie dans la société.

A la manière d'unavocat, il désigne, accuse: ceux là, ceux là, dis-je, ils. Dans une seconde partie, Don Juan explique à Sganarelle et au spectateur comment il va tirer parti de l'hypocrisie.

Ils'agit donc ici d'une double argumentation: tout d'abord, il se justifie en accusant la société d'être hypocrite, puistente de nous convaincre de l'utilité qu'aura pour lui ce nouveau masque. II) Intérêt psychologique de l'hypocrisie 1) Don Juan apparaît comme un homme traqué dont l'hypocrisie est le seul recours. En effet, Don Juan est poursuivi; c'est pourquoi il met l'accent sur sa sécurité: je veux me sauver - mettre ensûreté mes affaires - que si je viens à être découvert.

Ainsi, s'il abandonne son plaisir de provoquer ouvertement,l'hypocrisie lui permet d'agir avec encore plus de perversion, puisqu'il est non seulement impuni mais approuvé.

Pourmontrer la force protectrice de l'hypocrisie, Don Juan personnifie celle-ci avec l'expression de sa main et utilise lesmétaphores de l'habillement et de la guerre: l'hypocrisie devient un manteau - un bouclier. 2) Don Juan se justifie: toute la société est hypocrite Cette tirade est en effet une justification: il y en a tant d'autres.

Le personnage prend plaisir à décrire leshypocrites, la comédie sociale en maniant l'hypotypose: quelque baissement de tête (...) roulements d'yeux (phraseharmonieuse).

Ainsi, il révèle indirectement ses dons de comédien.

De plus, il use d'un métalangage théâtral :profession, art, imposture, grimaces, grimaciers, habit, personnage et pousse le raffinement jusqu'à imiter lescenseurs à la fin de sa tirade. Pour convaincre le spectateur de la justesse de ses idées et de son attitude, la parole est efficace : emploi dupronom indéfini on, évocations concrètes ferme la bouche. 3) l'hypocrisie permet à Don Juan de satisfaire son immense appétit de vivre Cette tirade au rythme de plus en plus ample est assortie à la fin de treize futurs prophétiques (m'érigerai, jugerai,n'aurai, pardonnerai, garderai, ferai, pousserai, accuserai, saurai, crieront, accableront, damneront).

Cetteénumération de verbes fondée sur une gradation traduit l'esprit de liberté et de domination de Don Juan.D'ailleurs, celui-ci exprime bien son appétit de vivre comme il l'entend dans cette phrase je ne quitterai pas mesdouces habitudes.

Dans l'expression je serai défendu par elle, l'hypocrisie est placée en complément d'agent.

AinsiDon Juan est plus fort que l'hypocrisie, l'utilise comme il utilise les autres hommes, en joue mieux que quiconque, etla dépasse avec son habituelle démesure. III) Intérêt dramaturgique 1) le dramaturge règle ses comptes avec la cabale des dévôts : La phrase de Don Juan qui en choque un se les attire tous sur les bras sonne comme une maxime : en effet, derrièrela voix de Don Juan se cache une voix pleine d'expérience et de rancoeur, celle du dramaturge qui dénonce lacorruption, l'esprit rancunier et la puissance autoritaire de celle-ci, qui frappe aveuglément ses ennemis.Toute la rancoeur du dramaturge éclate dans ce superlatif relatif les plus méchants hommes du monde. les singes de leurs actions : singer veut dire imiter.

Rappelons aussi que dans la tradition chrétienne, le diable estconsidéré comme le "singe" de Dieu.

C'est effectivement une expression péjorative.• "et quelque baissement de tête, un soupir mortifié, et deux roulements d'yeux rajustent dans le monde toutce qu'ils peuvent faire" : Don Juan décrit les attitudes extérieures de l'hypocrite qui imite le dévot, le signe del'humilité, le signe de la contrition, le signe de l'élévation de l'esprit ou de la prière. 2) le dramaturge nous livre une observation minutieuse de la société : Molière nous montre ici que tout homme joue un rôle au XVIIème siècle (le personnage d'homme de bien, vice à lamode) et que les hommes sincères sont les dupes de la société.

Il utilise les métaphores de l'habillement et de laguerre (bouclier, manteau), montrant ainsi l'hypocrisie comme un moyen de défense, de protection obligé auXVIIème siècle. 3) cette tirade est une annonce du dénouement : Une nouvelle fois, Don Juan s'emporte dans son discours et va trop loin.

En effet, la provocation est trop forte, DonJuan franchit les extrêmes limites de la bienséance: "je me ferai vengeur des intérêts du Ciel – damneront -profiter des faiblesses des hommes... Conclusion: Don Juan ne veut d'autre règle que son bon vouloir, c'est lui qui prétend décider de ce qui est bien et mal.

La. »