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Eloge de la folie Lecture Analytique

Publié le 06/10/2012

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folie
I. La critique de la folie humaine Cet extrait de l'Eloge de la Folie est l'occasion de pointer du doigt un des travers majeurs de l'humanité qui est sa crédulité et sa facilité à croire toutes sortes de superstitions et autres fables, c'est qu'Erasme critique ici, mais cette critique se veut plus profonde et nous verrons ensuite qu'il s'agit surtout de mettre en cause la religion qui se sert de cette faiblesse humaine « pour son plaisir ou son profit «. 1. Se placer du point de vue de la folie Dans l'Eloge de la folie, Erasme choisit de donner la parole à la Folie, et s'efface derrière elle. C'est le cas ici : « voici un genre d'hommes qui, sans aucun doute, est tout à fait de notre farine « (le déterminant possessif renvoyant à la folie elle-même). La folie est donc personnifiée car présentée sous des traits humains, du fait notamment que c'est elle qui parle. Le choix de cette instance narrative permet une mise à distance, un ton critique et l'exclusion du narrateur de cette crédulité puisqu'il ne s'agit pas d'un membre de la communauté humaines, comme le rappelle l'utilisation du « ils « : « ils aperçoivent «, «s'ils n'adorent «, « ils ne mourront pas « et du « on « qui vise un vaste ensemble duquel le narrateur reste exclu : « on salue «, « on reviendra «, « on rend visite «. De même cette mise à distance est réactivée par les occurrences du pronom démonstratif : « ceux « (« ceux qui se bercent «, « ceux qui s'appuient «...). Choisir la folie permet donc d'avoir un point de vue distant et critique sur les actions des hommes. En même temps, il est intéressant de voir que la masque de la folie derrière lequel se tient l'auteur semble s'effacer à la fin du texte pour laisser entendre la voix de l'auteur et son indignation, car lorsqu'il utilise un registre polémique et marque l'implication du narrateur, nous sommes en droit de nous demander si le narrateur est toujours la folie ici : « Et de pareilles folies, si folles qu'elle me font presque honte, sont approuvées non seulement du vulgaire mais de ceux qui enseignent la religion «. 2. Le portrait de l'homme crédule Comme le narrateur ne fait pas partie de l'humanité, il peut à loisir faire le portrait d'une catégorie d'homme, celle des hommes crédules, naïfs, cible potentielle pour les charlatans et... la religion. Apparition d'un champ lexical du monstrueux dans une énumération : « fables «, « histoires monstrueuses «, « spectres «, « lémures «, « larves «, « enfers «, « merveilles «. Portrait d'...
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« bien agréable ».

Volonté d’être concret par la multiplication d’exemples, et l’association de saint aux « miracles » qu’ils sont censés accomplir : « s’ils aperçoivent un Polyphème, (…) ils ne mourront pas dans la journée… » (le choix de l’hypothétique n’est à ce titre anodin puisqu’il permet de ne pas utiliser de connecteur entre les deux proposition signifiant ainsi l’absence de lien logique entre les 2 actions même si elles sont associées.

De même, il utilise des énumérations et des renchérissements : « tant de parjures, tant de débauches, tant d’ivrogneries, tant de rixes, tant de meurtres, tant d’impostures, tant de perfidies, tant de trahisons »(énumération)/ « non seulement à soulager l’ennui des heures, mais aussi à procurer quelque profit, surtout pour les prêtres et les prédicateurs » ou « sont approuvées non seulement du vulgaire mais de ceux qui enseignent la religion » (renchérissement). II.

La dénonciation de la religion Si la critique de la crédulité humaine se fait de façon légère, la dénonciation de la religion qui est faite doit être considérée avec plus de sérieux, car les religieux manipulent le peuple, eux, étant plus instruits, ils encouragent l’absence de sens critique du peuple pour mieux le posséder et en tirer profit. 1.

L’hypocrisie : un repentir de façade La première critique mise en relief par le texte est le fait que la religion chrétienne favorise un repentir apparent, de façade, totalement disproportionné vis-à-vis des fautes qu’il est supposé racheter.

Disproportion entre les attentes et les efforts : « ceux qui s’appuient sur certaines petites formules ou prières magiques qu’un pieux imposteur a inventées pour son plaisir ou son profit, et s’en promettent tout : richesses, honneurs, plaisirs, abondance, santé toujours florissante, très longue vie, verte vieillesses, et pour finir une place auprès du Christ, mais le plus tard possible, quand les voluptés de cette vie les abandonneront, malgré leurs efforts opiniâtres pour les retenir, et céderont la place aux délices célestes ».

Ton ironique, présence d’oppositions : longueur excessive de la 2ème partie de la phrase faisant état des attentes, par rapport aux efforts déjà minimisés par une caractérisation péjorative (« petites », « magiques » , ou l’oxymore ironique : « pieux imposteur »).

Au contraire, les attentes sont amplifiées par le pronom indéfini « tout », l’énumération qui suit, l’utilisation de pluriels, la multiplication d’adjectifs mélioratifs et qui donne l’impression que le phrase qui devrait être terminée ne cesse d’être rallongée.

On trouve le même procédé à l’inverse quelques lignes plus loin, cette fois c’est l’énumération de méfaits qui s’oppose au faible investissement qui doit les effacer : « estime que tant de parjures, tant de débauches, tant d’ivrogneries, tant de rixes, tant de meurtres, tant d’impostures, tant de perfidies, tant de trahisons sont rachetés comme par un comme par un contrat, et si bien rachetés qu’il peut maintenant repartir à neuf pour un nouveau cycle de crimes ».

La disproportion entre les crimes et les actes de repentir permettant soit- disant le pardon est mise en avant par le choix des métaphores utilisées : « s’imagine, avec une petite pièce de monnaie prélevée sur ses rapines, avoir purifié d’un seul coup ce marais de Lerne qu’est sa vie » (métaphore : vie comparée à un marais malsain, celui où vivait l’hydre de Lerne mythologique tué par Hercule). 2.

La religion chrétienne mise sur le même plan que les croyances irrationnelles et les superstitions La religion est progressivement mise en cause au sein même des exemples. Habile transition entre de véritables superstitions et des pratiques chrétiennes ce qui implicitement les place sur le même plan : on passe ainsi insensiblement de ceux qui adorent le cheval de Saint Hippolyte, sorte de paroxysme dans l’énumération d’exemples de croyances populaires à ceux qui comptent avec précision la durée de leur séjour au Purgatoire (ce qui n’est pas encore tout à fait une pratique chrétienne) aux prières prononcées pour demander le pardon du seigneur.

On voit donc comment Erasme a réussi à faire des rites religieux une manifestation supplémentaire de la croyance des hommes dans des superstitions.

D’ailleurs le sens critique du lecteur est déjà sollicité lors des différents exemples, il devra donc se méfier vis-à-vis de ce qui lui est relaté : la répétition de « certains » marquant justement le caractère incertain de ce genre de croyances est un indice du fait qu’il faut rester vigilant : « si on rend visite à saint Erasme (ironie), certains jours, avec certains petits cierges, certaines petites prières, on deviendra bientôt riche ».

De même, il souligne la « magie » qu’il associe depuis le début du texte à la religion lorsqu’il dit : « tant de parjures, tant de débauches, tant d’ivrogneries, tant de rixes, tant de meurtres, tant d’impostures, tant de perfidies, tant de trahisons. »

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