« Électre » est-elle une « pièce policière » ?
Publié le 06/01/2020
Extrait du document
Non seulement Électre traque sa mère, mais elle débusque ses mensonges et ses faux-fuyants. Contrainte d'avouer qu’elle a un amant, Clytemnestre refuse de révéler son identité. Par peur, dit-elle, du scandale politique : « Comment imaginer que le peuple d’Argos laisse jamais Oreste succédera une mère indigne? (Il, 5, p. 94). Par honte de révéler qu'elle aimerait, elle qui est reine, un simple roturier.
Électre ne croit aucun de ces prétextes. Elle connaît trop sa mère pour se laisser convaincre par de tels arguments. « Tu te moques d’être reine », lui objecte-t-elle. « Tu es réfléchie, tu calcules » (II, 5, p. 95). Telle une enquêtrice, Électre vérifie les alibis, les analyse et les balaie.
Electre de Jean Giraudoux
«
Une intuition de départ
Voilà « sept ans » qu'Agamemnon est mort et qu'Électre vit
dans le souvenir de son père.
La version officielle a conclu au
décès accidentel du roi des rois.
Longtemps Électre ne l'a pas
mise en doute.
Le premier acte la conduit confusément à le faire.
C'est par la haine qu'Électre porte à sa mère et à Égisthe que
naissent ses premières interrogations.
Cette haine, Électre ne
se l'explique pas:« Je les hais d'une haine qui n'est pas à moi»,
dit-elle à Oreste (1, 8, p.
57).
Le culte qu'elle voue à son père et
la tendresse dont elle entoure son frère prouvent qu'Électre n'est
pas étrangère à tout amour filial.
Sa haine est donc justifiée.
Mais
par qui ou par quoi? À ce stade, Électre cherche une vérité encore
mal entrevue.
li lui faut absolument savoir pourquoi elle hait tant
Clytemnestre.
La nuit passée auprès d'Oreste agit sur elle comme une révé
lation.
La plénitude qu'Électre ressent lui fait comprendre par un
raisonnement contraire que si une femme peut être heureuse
près d'un homme 1, elle peut aussi être malheureuse et le haïr.
Électre en vient de la sorte à penser qu'elle hait sa mère parce
que celle-ci haïssait son père.
De là à tuer, il n'y a qu'un pas qu'un
rêve lui fait franchir 2.
Cette intuition qui se présente à elle avec la force de la certi
tude ne repose toutefois sur aucune preuve.
Pour les établir,
Électre se révèle dès lors la plus acharnée des enquêtrices.
Une succession d'interrogatoires
Chaque rencontre avec sa mère se transforme en interroga
toire.
La scène 4 de l'acte 11 voit Électre presser Clytemnestre de
questions:
-Oui appelles-tu ? Lui? -Oui est-ce, mère? -Quel est ton amant? (p.
87-89)
1.
Sur le caractère trouble de cette scène, voir lecture méthodique 5, p.
133 ..
2.
Dans la tragédie, le songe révélateur ou prémonitoire est un procédé courant.
Jean Giraudoux le réutilise, sans chercher à le rendre vraisem blable ou réaliste, à la différence par exemple de Racine dans Athalie (1691 }, où l'héroïne du même nom fait un songe prémonitoire et vrai semblable..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Dans un entretien accordé à André Warnod (Le Figaro, 11 mai 1937) Giraudoux présente Électre comme «une pièce policière; mais considérée non du point de vue du détective, mais du point de vue du juge. L'action se déroule en une nuit, en douze heures. Au matin, la vérité est découverte.» Qu'en pensez-vous?
- Dans un entretien accordé à André Warnod (Le Figaro, II mai 1937) Giraudoux présente Électre comme «une pièce policière; mais considérée non du point de vue du détective, mais du point de vue du juge. L'action se déroule en une nuit, en douze heures. Au matin, la vérité est découverte.» Qu'en pensez-vous ?
- DEUIL SIED A ÉLECTRE (Le) (résumé & analyse) Ettgen O’Neill
- ÉLECTRE (résumé) d’Euripide et de Sophocle
- ÉLECTRE. Pièce en deux actes et en prose de Jean Giraudoux (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)