Edgar Morin, L'Esprit du temps
Publié le 11/01/2020
Extrait du document

Il y a implicitement, dans tout spectacle de théâtre, cinéma, télévision, une composante ludique(1), du reste difficile à isoler. Elle émerge dans les spectacles sportifs, les jeux radiophoniques et télévisés. Elle est mêlée plus ou moins à des préoccupations utilitaires dans les bricolagés, à des préoccupations érotico-amicales dans les «parties», à des préoccupations hygiéniques dans les sports. Elle se dégage avec une grande netteté dans les «hobbies»<2), sorties, balades, amusements. Un des aspects du divertissement moderne est cet épanouissement du jeu «en tant qu'activité qui a sa fin dans le plaisir qu'on en éprouve, et nulle part ailleurs» (Montherlant).
(1) ludique : en rapport avec le jeu.
(2) hobby : passe-temps favori.
Analyse du sujet
Parties du programme abordées :
— Problèmes de société.
— Réflexion sur l'image (et la reproduction du réel).
Analyse du sujet :
— Thèmes : le voyage, le jeu, le spectacle, le rôle des images dans nos civilisations.
— Points d'histoire littéraire : quelques textes littéraires sur le voyage (Baudelaire, Loti, Rimbaud, Le Clézio, etc.).
Conseils pratiques :
— Résumé difficile : texte riche, assez «touffu». En outre, difficulté de la mise en forme.
— Discussion plus classique, mais il ne faut pas se laisser piéger par le texte (essayer d'aller au-delà, sans en reprendre seulement le thème).
Nature du sujet : de synthèse.
Difficulté du sujet : * * *
L'auteur écrit : «Le touriste ne s'intéresse qu'à l'univers des guides bleus et fuit la vie réelle, quotidienne, sauf lorsque celle-ci est classée comme «pittoresque» c’est-à-dire redevient digne de l'image».
Vous commenterez et, si vous le jugez bon, vous discuterez cette opinion dans un développement composé, illustré d'exemples précis.

«
Session de juin 1990
Ainsi, en même temps que le spectacle, la culture du loisir
développe le jeu.
Dualité à la fois antagoniste -puisque le spectacle
est passif, le jeu actif - et complémentaire, qui non seulement
s'inscrit dans le loisir, mais le structure en partie.
C'est la tendance
d'une partie du loisir, effectivement, à prendre la forme d'un grand
.
jeu-spectacle.
-
Cette tendance §'exprime de façon p_articuli~rement significative.
clans les vacances modernes, clans la mesure où elles représentent
le temps vraiment vivant, vraiment vécu, par rapport au temps
sclérosé et exsangue de l'année de travail.
Ces vacances ne sont pas
seulement des entractes récupérateurs au sein de la nature (som
meil, repos, marche), mais aussi le temps des plaisirs et des jeux soit
par l'exercice ludiquement retrouvé d'activités ancestralement vita
les (pêche, chasse, cueillette), soit par la participation aux nouveaux
jeux (sports de plage, ski nautique, pêche sous-marine).
La vie de
vacances devient ainsi un grand jeu : on joue à être paysan,
montagnard, pêcheur, homme des bois, à lutter, courir, nager.
..
Parallèlement, le tourisme devient un grand voyage-spectacle au
sein d'un univers de paysages, monuments, musées.
Le touriste ne
s'intéresse qu'à l'univers des guides bleus et fuit la vie réelle,
quotidienne, sauf lorsque celle-ci est classée comme "Pittoresque•.,
c'est-à-dire redevient digne de l'image.
Il porte son appareil photo
en bandoulière et, à la limite, il est plus préoccupé .de clicher que
de voir.
Dans cette débauche imageante au premier degré (voir pour
se souvenir) et au second degré (photographier pour voir ses
souvenirs), le tourisme moderne présente des analogies frappantes
avec le cinéma.
Il est succession précipitée d'images, voyeurisme l3l
ininterrompu.
La parenté tourisme-cinéma s'affirme clans les voya
ges collectifs en cars panoramiques: les spectateurs enfoncés dans.
leur fauteuil regardent à travers le plexiglas, membrane de même
nature que le vidéo de télévision, l'écran de cinéma, la photo du
journal et la grande baie vitrée de l'appartement moderne : fenêtre
de plus en plus cinémascopique l4l sur le monde et en même temps
frontière invisible.
(3) voyeurisme : curiosité indiscrète et éventuellement malsaine.
(4) cinémascopique: comparable au grand écran de cinéma.
174.
»
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