DORGELÈS Roland : sa vie et son oeuvre
Publié le 22/11/2018
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DORGELÈS Roland, pseudonyme de Roland Léca-velé ( 1885-1973). Romancier né à Amiens. Venu à Paris, il suit les cours de l'École des beaux-arts, devient journaliste (au Sourire, à Paris-Journal) et habite Montmartre, menant joyeuse vie avec ses amis Carco et Mac Orlan, lorsque éclate la guerre. L’épreuve des tranchées (il s’engage en 1914) lui inspire alors, comme à Barbusse, à Genevoix, le sujet d’un roman qui fera sa gloire : les Croix de bois (1919), auquel le jury Goncourt préfère pourtant A l'ombre des jeunes filles en fleurs. Il avait déjà publié en 1917 un premier livre, écrit avec R. Gignoux : la Machine à finir la guerre. Suivent trois autres ouvrages sur la guerre, le Cabaret de la Belle Femme (1919), Saint-Magloire (1922), le Réveil des morts (1923). En 1929, Dorgelès entre à l’académie Goncourt.
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déjà
publié en 1917 un premier li v re, écrit avec R.
Gignoux : la Machine à finir la guerre.
Suivent trois
autres ouvrages sur la guerre, le Cabaret de la Belle
Femme (1919), Saint-Magloire (1922), le Réveil des
morts (1 923).
En 1929, Dorgelès entre à 1' académie
Goncourt.
La vigueur de ses premiers livres tient à leur sobriété :
l'héroïsme est endurance plus que bravoure, entre la dis
cipline de fer et les distributions d'alcool.
Aucune
recherche de l'horreur : la guerre est vécue au jour le
jour, dans une hantise de la mort, avec ses souffrances
quotidiennes atteignant parfois 1' insupportable (1' épi
sode de la mine dans les Croix de bois).
Mais ces livres
de mort proposent aussi une certaine idée du bonheur :
au-delà d'un certain seuil de misère physique et morale,
«le bonheur est partout » : «c'est le gourbi où il ne pleut
pas», une litière de paille; ou bien, à la faveur d'une
relève, d'un instant de silence entre deux tirs d'artillerie,
le desserrement de l'angoisse, l'émerveillement soudain
d'être et de vivre, ce« délai d'espoir» tout à coup infini
(les Croix de bois).
Les pages les plus sombres s'éclai
rent soudain d'une joie foudroyante, presque à 1 'état pur.
Mais un tel« martyre » (Quand j'étais montmartrois,
1936) ne s'oublie pas facilement.
«Serons-nous jamais
lavés d'une telle souffrance?» (les Croix de bois).
Dor
gelès tente d'exorciser le cauchemar en ressuscitant,
avec une plume d'anarchiste rangé, des personnages à la
Murger, rapins et cousettes au grand cœur, et la vie
pittoresque du village de Paris où il a passé sa jeunesse
(Montmartre mon pays, 1928; le Château des brouil
lards, 1932; Bouquet de bohème, 1948; Portraits sans
retouches, 1952; le Marquis de la Dèche, 1971).
L'exo
tisme lui fournit un autre terrain d'évasion.
Mais son
récit de voyage à travers 1' Indochine, Sur la route man
darine ( 1925), propose aussi une profession de foi colo
nialiste à la Kipling.
Contre la nostalgie de Pierre Loti
enclin à regarder toute coutume ancienne « à travers un
prisme enchanteur » (ibid.), Dorgelès défend un« nouvel
exotisme», né de la rencontre de deux civilisations.
Et
s'il se plaît à décrire des types légendaires, il les choisit
plutôt du côté des planteurs, saluant le « miracle du
caoutchouc» et 1' afflux des capitaux.
II exploitera cette
même veine dans Vive la liberté! (1937), Sous le casque
blanc (1942), Route des tropiques (1944).
Mais ses relations avec les puissances d'argent sont
plus sereines sous les tropiques qu'en« métropole ».
Le
héros de Tout est à vendre ( 1956), vertueux Zorro appar
tenant à une police privée, fait rendre gorge à des maîtres
chanteurs et à des financiers véreux : lointain écho du
manichéisme qui opposait jadis le «Front >> à l'« Ar
rière», intégrité, courage et force d'un côté, de l'autre
lâcheté, politique, argent facile.
Ce thème de la corrup
tion reviendra dans un de ses derniers romans, A bas
l'argent (1965).
En réalité, Dorgelès s'est-il jamais remis de ses
débuts, courageux dans la vie, héroïques dans les lettres?
Correspondant de guerre pour Gringoire en 1939-1940
(articles recueillis dans la Drôle de guerre, 1957), il
tente de réveiller le patriotisme en évoquant ses expé
riences antérieures.
Mais la notoriété même de son chef
d'œuvre le rattache à une époque révolue, tout comme
la nostalgie de ses chroniques montmartroises, qui lui
valurent d'être appelé le «dernier des gosses à
Poulbot »..
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