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Dom Juan de Molière: Une comédie métaphysique

Publié le 22/02/2012

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Le principal enjeu de l'histoire racontée dans Dom Juan n'est pas psychologique, ni politique, ni historique, il est idéologique, il est, surtout, métaphysique. Alex Szoguy a écrit : « Dom Juan constitue l'une des rares pièces de théâtre universelles où le langage mène à des conclusions d'ordre métaphysique. La pièce reflète un monde où Dieu est mort et où la destinée capricieuse nous joue toutes sortes de tours; un monde où l'on s'avance à l'aveuglette, conduits seulement par des qualités que nous savons cultiver en nous-mêmes, les vérités dans lesquelles nous croyons, les vertus intérieures qui nous prêtent notre force. » (Szogyi, 20, p. 142) La question centrale posée à travers le personnage de Dom Juan, à travers son attitude de défi envers l'ordre moral et envers les croyances qui le fondent, est la question de l'existence de Dieu.
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« te le donne pour l'amour de l'humanité ».

Mais il y a du Caligula en Dom Juan, au sens où l'entendait Camus.Cet insoumis imite dans ses rapports avec les hommes la cruauté objective de la nature.

Il est lui-même une forcede la nature, avec ce que cela suppose d'aveuglement, d'innocence, d'impassibilité, d'insensibilité.Dom Juan est donc par sa démesure même porté à se contredire doublement dans son combat contre l'ordre deshommes, auquel il est réduit finalement à se conformer et dans son combat contre l'ordre du monde qu'il est amenéà copier.Une autre question centrale dans Dom Juan est celle du temps.

Dom Juan représente la fidélité à l'instant.

Sadémystification de la notion de fidélité s'appuie sur la volonté de lutter contre l'usure des habitudes, de gardertoujours pareille à elle-même l'intensité du désir.

De cette aspiration découle sa passion de la nouveauté en amour,son goût de l'aventure.

Dom Juan ne se sent exister que dans la fulgurance de la surprise, l'émerveillement de l'éveilà la beauté des femmes, à la beauté du monde.

Dom Juan est toujours disponible, toujours dispos.

Il est l'esprit delégèreté, l'antithèse vivante de l'esprit de pesanteur, de sérieux.

Mais cette fragmentation du temps entraîne unerupture du principe d'identité.

En voulant échapper à l'emprise du même, de la continuité dans l'uniforme, Dom Juanse veut toujours autre.

Il est donc le personnage qui, par excellence, représente le mieux le drame de l'acteur qui, àforce de porter des masques, ne sait plus quel est son visage.Cet aspect du thème de Dom Juan est lié à une interprétation possible du conflit avec la Statue, celle-cireprésentant, non le dictat de la Providence, mais symbolisant à travers le retour du mort le poids du passé.

DomJuan serait châtié pour son irresponsabilité, son refus d'assumer les conséquences de ses actes : on est toujoursrattrapé par le souvenir, par les traces que l'on a voulu effacer.

La Statue rappellerait à Dom Juan que chacun estresponsable de sa liberté.Le point de vue du moraliste s'exprime à travers une ironie implicite, sous-jacente qui n'épargne pas le héros, dont ilest même la principale cible.Cette ironie engendre une perpétuelle ambiguïté qui conduit à s'interroger sur le sens des aventures de Dom Juan,qui ouvre le champ des interprétations contradictoires.On a parfois vu en Dom Juan un avatar de Lucifer, l'esprit qui toujours nie.

Il est vrai que ce séducteur apparaîtsurtout comme un tentateur.Il n'aime rien tant que de mettre à l'épreuve tous ceux qu'il rencontre, tous ceux qu'il côtoie, le pauvre commeSganarelle, Done Elvire comme Charlotte et Mathurine.

Ce provocateur est pris à son propre piège.

Après avoir tentéle pauvre et l'avoir incité au blasphème, il se laisser aller lui-même à blasphémer devant la Statue du Commandeurqui relève le défi.Mais on peut lire le texte autrement.

Ces mises à l'épreuve peuvent être des étapes sur le chemin de laconnaissance, et les procédés d'une démystification socratique d'esprits abusés par la superstition.La singularité de cette pièce est dans l'usage qui est fait de cette ambiguïté, elle n'ouvre pas, comme dansTartuffe, sur un éventail de lectures possibles, elle se referme sur une esthétique théâtrale fondée sur le jeu descontrastes et le choc des contraires.. »

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