Discussion de la phrase : « Nous avons le privilège - ou le grand malheur - d'assister à une transformation profonde, rapide, irrésistible, totale de toutes les conditions de la vie et de l'action humaines. » (VALÉRY.)
Publié le 17/01/2022
Extrait du document
Introduction.
• Position pessimiste de Valéry.
• Condition de l'homme moderne?
• Annonce du plan suivi.
I. Peut-on encore avoir confiance en la destinée de l'homme actuel?
• Attitude d'espérance dans les périodes enthousiastes :
- XVIe siècle (grandes découvertes. Renaissance) ;
- XVIIIe siècle des « lumières «, de la « cité des hommes «, des « philosophes « ;
- développement spectaculaire des sciences au XIXe siècle ;
- progrès techniques encore plus rapides et plus importants au XXe siècle.
• Triomphe incontestable de la science.
• D'où une certaine assurance de l'homme?...
• ... ou même de la suffisance?
II. Faut-il au contraire faire preuve de scepticisme au sujet de la destinée de l'homme moderne?
• Réactions contre le triomphe de la science.
• Abus matériels; conséquences = inquiétudes nouvelles = rupture de l'équilibre naturel, pollution...
• Déformation intellectuelle due au triomphe immodeste des sciences.
• Aucun progrès dans la morale individuelle ou politique internationale.
Aucun progrès esthétique.
• Aliénation de l'homme dans les sociétés des techniques.
• Pas de « supplément d'âme «. Bergson. (1)
• « Esclavage de la modernité. « Valéry. ( 1 )
Conclusion.
• Rythme trop rapide.
• Promiscuité.
• Automatisation.
• Uniformisation, dégradation de la « qualité de la vie «.
• Comment échapper aux contraintes collectives et à la complexité de la vie moderne?
• Mais la mode écologiste est-elle la solution?
«
garde la jeune génération à laquelle il s'adresse, sur les « dangers » qu'une mutation si profonde et appuyée sur tantde « contradictions] », risque de leur faire courir, s'ils n'y prennent précaution.
Il leur demande instamment deréfléchir à cet « avenir » si neuf, au problème de la condition humaine moderne, à ses rapports avec la Nature, sesprogrès éventuels, l'assurance ou l'angoisse du XXe siècle.
Que dirait-il en notre fin de siècle? Depuis 1914 et lesgrandes mutations de société qui vont se multiplier au cours du siècle, les avis se sont multipliés aussi sur cesproblèmes.
Peut-on encore avoir confiance en la destinée de l'homme actuel? Ne doit-on plus faire preuve que descepticisme à son sujet? Telles sont les deux attitudes qui se
succèdent régulièrement dans la pensée moderne.
* * *
Héritière de l'enthousiasme soulevé par les progrès indéniables des sciences, la première attitude est celle d'uneespérance d'anticipation évoquant le temps où régnera sur terre liberté et bonheur (spécialement grâce aux travauxdes savants).
Le chimiste Marcelin Berthelot imaginait ainsi l'an 2000 : « Dans ce temps-là...
le problème del'existence par la culture du sol aura été supprimé par la chimie...
» et « Dans cet empire universel de la forcechimique [...] dans ce monde renouvelé, chacun trouvera [...] les moyens pour pousser au plus haut point sondéveloppement intellectuel, moral, esthétique...
» Une telle confiance s'est manifestée à plusieurs reprises au coursdes siècles.
La Renaissance (du XVIe siècle) fut soulevée d'enthousiasme devant les grandes découvertes etinventions, « à partir des temps barbares et [...] de l'infélicité des Goths » (Rabelais); tandis que le XVIIe sièclevoyait fleurir la pensée de Pascal, Descartes ou Newton, plus vigoureusement encore le XVIIIe siècle pouvaitchanter les progrès de la chimie (Lavoisier), de l'« Histoire naturelle » (Buffon), de la médecine (vaccin), desapplications pratiques de la science (machine à vapeur)...; ainsi l'Encyclopédie conduite par Diderot, se faisait-ellel'écho de l'assurance commune que les « lumières de la raison » et les progrès de la science appuyée surl'expérience dissiperaient les ténèbres de la superstition.
On pourrait alors construire la « cité des hommes » oùrégnerait le bonheur.
Au XIXe siècle, l'utilisation toujours plus poussée de la houille, du pétrole, puis de l'électricitéjustifie l'espoir de dompter la nature; la synthèse des acides, des alcools, des corps gras fait entrevoir la possibilitéde suppléer aux produits naturels.
Le XXe siècle dépasse de loin toutes les conquêtes du XIXe siècle, dans tous lesdomaines : radioactivité, fusion de l'atome, découverte des antibiotiques, remplacement de la laine et du coton parles textiles artificiels, matières plastiques découvertes à partir du lait, du charbon, du pétrole, création de sciencesnouvelles, rajeunissement des anciennes permettent de transformer, de simplifier, d'améliorer sans discussionpossible les conditions matérielles de la vie.
Les sociétés contemporaines - écrit F.
de Closets à ce propos - « sontentretenues par la conviction que [le] rapport (entre les forces de la nature et l'homme) évolue [...] en faveur del'humanité.
Confronté à une difficulté, le monde moderne tend naturellement à la refuser et à rechercher un nouveaumoyen propre à l'éliminer.
C'est ainsi qu'une maladie mortelle n'est jamais qu'une maladie que la médecine ne sait pasencore guérir.
» Bref, le triomphe sur le plan matériel de la science et de la technique est incontestable et éveille enl'homme un certain type d'assurance, que les réussites des fusées spatiales et les étonnants progrès del'électronique et informatique confortent encore.
* * *
Pourtant, depuis quelques années surtout, les prises de position se multiplient contre cette confiance jugéeutopique.
Les écologistes mettent en garde contre la rupture fréquente de l'équilibre naturel, la baisse des valeursnutritives des produits agricoles et de l'élevage, l'utilisation de plus en plus abusive des colorants nocifs et d'unemédication mal comprise, la pollution continue des rivières, de la mer, des campagnes, - parmi tant d'autres excès ;ce gaspillage, cette façon d'abîmer, cet irrespect du patrimoine naturel : corps et environnement, provoquentobjections, critiques, même de véritables organisations et organismes de défense (avec marches « vertes »européennes).
D'autre part le confort n'est pas un signe certain de progrès; le réfrigérateur, les machines à laverlinge ou vaisselle, les multiples robots qui peuplent nos maisons ne sont pas des facteurs de civilisation.
Bien plusgrave encore est la déformation intellectuelle que le triomphe immodeste de la science a provoquée, car elle aconduit à un véritable matérialisme de fait.
L'égoïsme s'installe dans des sociétés repues, se double d'ennui etd'angoisse, puis de violence gratuite; les rapports entre individus et nations (jamais on n'a vu tant de guerres, detortures, de manque de respect des droits de l'homme) prouvent cruellement que ni fa morale individuelle, ni lapolitique internationale n'ont fait de progrès décisifs.
La crainte d'une guerre d'anéantissement, les menaces deservitude, l'accroissement des enlèvements, des prises d'otages, la désespérance ou l'indifférence effrayée d'unejeunesse qui peut aller des rêves de Katmandou à la mort par overdoses, ne peuvent plus permettre de considérer lascience comme la promotrice de la morale.
Elle n'a pas apporté le « supplément d'âme » que réclamait le philosopheBergson, pas plus que la supériorité technique du rabot électrique sur le ciseau de l'humble artiste édifiant lescathédrales gothiques n'a produit un nouveau ou plus parfait sourire que celui de l'ange de Reims.
On peut mêmedéplorer, au contraire, des tours d'affligeante laideur et d'habitat étouffant, l'extravagance de certaines peintures,sculptures, « inventions » musicales, même si l'on a su dans d'autres cas adapter aux besoins d'une société enévolution un certain sens de la beauté.
Et il ne s'agit ici que du domaine esthétique ! Dans ce dernier quart du XXesiècle, tout en profitant, sans même s'en rendre compte, de ses avantages et facilités, bien des penseurs, bien deshommes de la rue, aussi, sont devenus réticents face aux conquêtes scientifiques.
L'être humain ne leur semble pasplus libre qu'autrefois, mais au contraire plus asservi, plus aliéné, selon l'expression en cours.
Un simple citoyen dumonde occidental est certes plus puissant techniquement que Louis XIV, mais « l'esclavage de la modernité »(Valéry) n'en a que plus de poids.
Le confort amollit et multiplie les besoins; presse, radio, T.V.
conditionnentl'individu moyen; la mécanisation de l'existence provoque la tyrannie des horaires.
Le travailleur de 1983 pris dans lecircuit « métro-boulot-dodo » et qui n'a pas connu - heureusement ! - misère ni faim, en arrive pourtant à se juger.
»
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- Paul Valéry écrit dans Regards sur le monde actuel, (Propos sur le progrès, 1931 ) : « Supposé que l'immense transformation que nous vivons et qui nous meut, se développe encore, achève d'altérer ce qui subsiste des coutumes, articule tout autrement les besoins et les moyens de la vie, bientôt l'ère toute nouvelle enfantera des hommes qui ne tiendront plus au passé par aucune habitude de l'esprit. L'histoire leur offrira des récits étranges, presque incompréhensibles ; car rien dans le