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Discours entendu et Discours lu. Pourquoi un discours fait-il généralement plus d'impressions sur ceux qui l'entendent que sur ceux qui le lisent ?

Publié le 15/02/2012

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discours

 

C'est là un fait d'expérience : nous vibrons, nous sommes émus, entraînés en entendant un orateur authentique; nous restons froids en lisant le même discours. Autre chose est un débat suivi à la Chambre et lu le lendemain dans l'Officiel. Nous avons peine à nous expliquer l'enthousiasme d'une Sévigné au retour d'un sermon du Père Bourdaloue. Berryer, l'un des maîtres de la parole au XIXe siècle, ne voulut pas qu'on imprime ses discours et plaidoyers, tant il était convaincu que le charme disparaîtrait dans un livre, cendre refroidie d'un ardent brasier. D'où vient cette différence? De ce que l'état d'âme de l'auditeur est tout différent de l'état d'âme du lecteur; c'est ce que nous allons tâcher d'établir....

discours

« mimique est, pour certains, moins bien partages du cote de la voix, un moyen de compenser cette inferiorite.

L'on sait quel usage en font les Hitler et les Mussolini.

Des gestes appropries, taut& imperieux, tantot caressants, enveloppants ou bien menacants, implorants, evasifs, inspires, soulignent a propos les paroles.

La prestance, autre element qui joue par- fois son role, n'est pas davantage transmissible a un texte ecrit.

En un mot tout ce que l'on a designs sous le nom synthetique d'action oratoire disparait sur le papier.

Enfin le discours, cela va sans dire, parce qu'il est fait pour etre parle et non pour etre lu, offre un certain nombre de caracteres qui ne con- viennent pas aux oeuvres &rites; strictement composees pour le lecteur. Ce que l'on appelle abondance oratoire et qui constitue une qualite dans le discours ne saurait convenir a la prose du journal ou du livre.

On trouve vite fastidieux les developpements qui, a la tribune, ne paraissent que riches.

L'eloquence parlee est souvent le don de repeter les memes choses sans se redire.

t De toutes les figures de rhetorique, avait coutume de dire E.

Drumont, la plus eloquente est la repetition.

z.

Il avait raison, mais ce qui sied a l'orateur ne convient plus a recrivain.

La force de conviction et de persuasion se manifeste aussi d'autre ma- niere ici et la.

Le choix, la disposition, l'enchainement habiles des argu- ments dans un discours oral n'apparaissent pas necessairement aussi heureux a la lecture.

D.

existe une optique oratoire comme une optique theatrale, dont il faut tenir compte.

La Bruyere retouchant l'Avare et ('Hypocrite de Moliere prouvait qu'il n'avait pas saisi cette nuance impor- tante.

Quiconque, pour gagner les esprits et les coeurs ecrirait comme s'il avait devant lui un millier de personnes, risquerait de manquer son but. Les adjurations pathetiques, les points d'interrogation et d'exclamation, seants a la tribune sont deplaisants sous la plume.

Les effets produits par la repartie cinglante, l'improvisation entrainante, l'esprit qui fuse subitement, venant en aide a la raison et a remotion toute la strategie et la tactique des joutes oratoires, une certaine negligence voulue, une familiarite bon enfant, un abandon calcule, le grossissement qui sied en public, autant de particularites du discours parle que Pecriture est impuissante a reproduire fidelement.

Il n'est, pour bien comprendre tout ce qui echappe au lecteur, que de relire la page oil Louis Barthou a portraiture l'un des plus prestigieux ora- teurs frangais, Aristide Briand.

On petit n'avoir pour l'homme qu'une me- diocre estime et deplorer sa politique, on doit s'incliner devant son talent merveilleux : monte a la tribune d'un pas lent; il ne depose sur le marbre aucune note; il commence d'une voix sourde; it tate son auditoire comme un pianiste prelude ou pint& comme un nageur prend la tempera- ture de l'eau; puis it affermit son ton, il releve; il se sert de toutes les richesses d'un organe incomparable, qui va de la gouaillerie a la tendresse, de l'ironie au lyrisme, de l'abattement a l'indignation, de la douceur a la menace, de la resignation a in revolte, de la conversation au fracas, de la familiarite a reclat, de la Comedie-Francaise a l'Ambigu.

Namnetus (1) parle avec ses yeux et avec ses mains comme avec cette voix unique.

Ses yeux ont toutes les nuances comme sa voix a tous les tons.

Il la colore de tous les sentiments qui l'animent.

Il y passe de l'emotion, de retonnement, de la colore, de la stupeur, du mepris, de l'indulgence, de la bonte, de la rancune, du pardon, des Hammes ardentes et des feux apaises : quand illes couche ils sont irresistibles.

Namnetus a des mains ravissantes, fines comme celles d'un aristocrate, onctueuses comme celles d'un eveque, et il s'en Berta ravir; il les avance et il les ramene; il les 'eve et il les abaisse; il les prend l'une dans l'autre, mais it sait aussi tirer parti de l'une tandis que I'autre est au repos.

Namnetus est un grand artiste.

Vous demandez s'il improvise? Il guette son auditoire; il le flake; it recoute; il le devine.

Il sent ce qui peut le flatter ou le heurter, ('exalter ou l'irriter, dechainer ses applaudissements ou ses protestations.

II va a son but, mais voit les obstacles; s'il faut les briser, it s'y efforce, mais, de preference, il les cotoie. Sa parole a une souplesse infinie.

Il Mend ou la resserre a sa guise; il en est -le maitre, et il lui asservit les assemblees, qui en subissent rirresistible seduction...

Mais je n'ai pas encore dit que Namnetus improvise.

Il a (1) Aristide Briand (1860-1932) est, ne a Nantes, ancienne capitale des Naninetes, peuplade gauloise. mimique est, pour certains, moins bien partagés du côté de la voix, un moyen de compenser cette infériorité.

L'on sait quel usage en font les Hitler et les Mussolini.

Des gestes appropriés, tantôt impérieux, tantôt caressants, enveloppants ou bien menaçants, implorants, évasifs, inspirés, soulignent à propos les paroles.

La prestance, autre élément qui joue par­ fois son rôle, n'est pas davantage transmissible à un texte écrit.

En un mot tout ce que l'on a désigné sous le nom synthétique d'action oratoire disparaît sur le papier.

Enfin le discours, cela va sans dire, parce qu'il est fait pour être parlé et non pour être lu, offre un certain nombre de caractères qui ne con­ viennent pas aux œuvres écrites; strictement composées pour le lecteur.

Ce que l'on appelle abondance oratoire et qui constitue une qualité dans le discours ne saurait convenir à la prose du journal ou du livre.

On trouve vite fastidieux les développements qui, à la tribune, ne paraissent que riches.

L'éloquence parlée est souvent le don de répéter les mêmes choses sans se redire.

« De toutes les figures de rhétorique, avait coutume de dire E.

Drumont, la plus éloquente est la répétition.

» Il avait raison, mais ce qui sied à l'orateur ne convient plus à l'écrivain.

La force de conviction et de persuasion se manifeste aussi d'autre ma­ nière ici et là.

Le choix, la disposition, l'enchaînement habiles des argu­ ments dans un discours oral n'apparaissent pas nécessairement aussi heureux à la lecture.

Il existe une optique oratoire comme une optique théâtrale, dont il faut tenir compte.

La Bruyère retouchant l'Avare et l'Hypocrite de MoJière prouvait qu'il n'avait pas saisi cette nuance impor­ tante.

Quiconque, pour gagner les esprits et les cœurs écrirait comme s'il avait devant lui un millier de personnes, risquerait .de manquer son but.

Les adjurations pathétiques, les points d'interrogation et d'exclamation, séants à la tribune sont déplaisants sous la plume.

Les effets produits par la répartie cinglante, l'improvisation entraînante, l'esprit qui fuse subitement, venant en aide à la raison et à l'émotion, toute la stratégie et la tactique des joutes oratoires, une certaine négligence voulue, une familiarité hon enfant, un abandon calculé, le grossissement qui sied en public, autant de particularités du discours parlé que l'écriture est impuissante à reproduire fidèlement.

Il n'est, pour bien comprendre tout ce qui échappe au lecteur, que de relire la page où Louis Barthou a portraituré l'un des plus prestigieux ora­ teurs français, Aristide Briand.

On peut n'avoir pour l'homme qu'une mé­ diocre estime et déplorer sa politique, on doit s'incliner devant son talent merveilleux : « ...

Il monte à la tribune d'un pas lent; il ne dépose sur le marbre aucune note; il commence d'une voix sourde; il tâte son auditoire comme un pianiste prélude ou plutôt comme un nageur prend la tempéra­ ture de l'eau; puis il affermit son ton, il l'élève; il se sert de toutes les richesses d'un organe incomparable, qui va de la gouaillerie à la tendresse, de l'ironie au lyrisme, de l'abattement à l'indignation, de la douceur à la menace, de la résignation à la révolte, de la conversation au fracas, de la familiarité à l'éclat, de la Comédie-Française à l'Ambigu.

Namnetus (1) parle avec ses yeux et avec ses mains comme avec cette voix unique.

Ses yeux ont toutes les nuances comme sa voix a tous les tons.

Il la colore de tous les sentiments qui l'animent.

Il y passe de l'émotion, de l'étonnement, de la colère, de la stupeur, du mépris, de l'indulgence, de la bonté, de la rancune, du pardon, des flammes ardentes et des feux apaisés : quand il les « couche », ils sont irrésistibles.

Namnetus a des mains ravissantes, fines .

_comme celles d'un .

aristocrate, onctueuses comme celles d'un évêque, et il s'en sert à ravir; il les avance et il les ramène; il les lève et il les abaisse; il les prend l'une dans l'autre, mais il sait aussi tirer parti de l'une tandis que l'autre est au repos.

Namnetus est un grand artiste.

Vous demandez s'il improvise? Il guette son auditoire; il le flaire; il l'écoute; il le devine.

Il sent ce qui peut le flatter ou le heurter, l'exalter ou l'irriter, déchaîner ses applaudissements ou ses protestations.

Il va à son but, mais il voit les obstacles; s'il faut les briser, il s'y efforce, mais, de préférence, il les côtoie.

Sa parole a une souplesse infinie.

Il l'étend ou la resserre à sa guise; il en est le maître, et il lui asservit les assemblées, qui en subissent l'irrésistible séduction...

Mais je n'ai pas encore dit que Namnetus improvise.

Il a (1) Aristide Briand (1860-1932) est né à Nantes, ancienne capitale des Namnètes, peuplade .

gauloise.. »

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