Deuil et tragédie dans l'Etranger de Camus
Publié le 22/11/2012
Extrait du document

Analysé dans cette perspective, L'Etranger ne peut
que nous apparaître comme une tragédie moderne sur
laquelle règne inflexible une fatalité solaire. Dans un
cadre ainsi défini, soulignons-le, Meursault n'est pas un
être libre. Son destin ne lui appartient pas qui se décide
en dehors de lui. Il n'est que le jouet de forces anonymes
et supérieures qui le mènent jusqu'à la mort.
Il y a là presque un paradoxe. On a souvent défini
Meursault comme l'image la plus exacte de l'individu
moderne. Mais à lire L'Etranger, on dirait que, dans un
monde sans Dieu et où les valeurs qui guidaient autrefois
les hommes ont disparu, la liberté n'existe pas et
que l'individu plie sous le poids d'une fatalité innommée,
mais plus inexorable encore que les anciens mythes.

«
84 1 Etude de l'Etranger
Une tragédie solaire
Cet ordre, on peut tout d'abord poser qu'il est celui
de la tragédie.
Semblable à Œdipe
et aux autres grandes figures du
théâtre antique, Meursault nous apparaît comme mené
par une fatalité qui confère son inflexible rigueur au
récit.
Dès le début du roman, en effet, tout semble
joué : le mécanisme est remonté qui conduira le héros
jusqu'au crime
et à sa perte.
Lorsque nous lisons la
première partie du roman, tous les actes de Meursault
peuvent nous paraître anodins
ou dénués de véritables
conséquences.
N'avoir pas pleuré aux funérailles de sa
mère, avoir assisté à la projection d'un film de Fernan
del, avoir aidé un ami à rédiger une lettre : comment
l'existence
d'un individu pourrait-elle se jouer sur de
tels faits?
Et pourtant, lorsque nous considérons rétros
pectivement ces faits et, plus encore, lorsque nous ap
prenons le sens qu'on peut leur donner, nous réalisons
qu'il n'est pas un seul de ces gestes qui n'ait été comme
un piège, tendu
par le hasard, dans lequel Meursault
est tombé tête baissée.
Dans le plus innocent de ses
actes, nous aurions dû découvrir déjà le signe avant
coureur de la catastrophe finale.
Dès lors,
L'Etranger
n'est plus pour nous la chronique d'un fait divers; c'est
déjà le récit d'une tragédie au sein de laquelle chaque
scène prépare, en secret, la chute du héros.
Camus ne se refuse pas d'ailleurs à multiplier les
signes à notre intention.
Dès le premier chapitre du
roman, lorsque Meursault veille le cadavre de sa mère,
il a «l'impression ridicule» que les vieillards de Ma
rengo sont réunis là pour le juger.
Avant même d'avoir
été réuni, c'est comme
si le jury des assises siégeait
déjà.
Avant même que
le crime ait été commis, c'est
comme
si la condamnation avait été prononcée.
La
conclusion du roman est déjà tout entière contenue
dans sa scène inaugurale.
Pour le personnage principal,
il ne saurait y avoir d'issue..
»
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