De nombreux écrivains, de nombreux artistes ont été, depuis des siècles, inspirés par le thème de la mer, que l'on retrouve dans des genres aussi différents que l'épopée, la poésie lyrique, la chanson, le roman, le récit d'aventures... En vous appuyant sur quelques exemples de votre choix — que vous pourrez emprunter aussi à la musique et au cinéma — vous direz ce qui fait, selon vous, la richesse de ce thème.

« mais surtout celui qu'il imite : Ulysse dans L'Odyssée (Homère), lors de son errance «à travers la mer violette» se trouvent confrontes a Poséidon, «l'ébranleur du sol».

Les tritons représentent les ressacs et tourbillons, les sirènes: les Gouffres où sombrent les navires, Charybde et Scylla : les écueils et passages dangereux. D'ailleurs elle est imprévisible comme toute héroïne, car autre monde Que l'homme; or le monde des héros est celui de l'épopée.

Tantôt elle offre ses «gouffres amers» et sa «plainte indomptable et sauvage», tantôt elle semble guider les hommes, tandis que «L'équipage endormi [ ] flotte sur les mers» (Emmanuel Signoret, La Souffrance des eaux.

Le vaisseau). La peinture romantique utilisera de tels traits en son inspiration tumultueuse : Le Radeau de la Méduse. Mais ce qui est inspiration primordiale pour un artiste c est la beauté. Or étale ou déchaînée la mer est toujours belle.

Elle offre donc la diversité dans la beauté, ce que tout artiste recherche puis tente de rendre par les mots les notes de musique, les couleurs ou les images. Elle est réflection des profondeurs célestes : « La mer, mouvant miroir des cieux S'endort au soleil couchant» (chanson de Guy Ropartz). Elle possède toutes les couleurs de «l'azur phosphorescent de la mer des Tropiques » à la brillance de la «barre d'écume» (Heredia). Ces couleurs s'allient à formes et mouvements, mouvances même : «la gerbe d'eau jaillissant]...

avec égalitéet traversée d'un feu obscur comme un corps fait de larmes» (Claudel). Beauté de sa voix, tantôt murmure, tantôt «doux chant», tantôt mugissement : «C'est un bruit d'eau qui souffre et gronde et se [lamente Derrière les arbres, sans qu'on la voie, Calmée ou écumante...» (H.

de Régnier : Les Médailles d'Argile), tantôt ses sonorités sont presque humaines et le langage utilise pour les présenter des termes réservés aux hommes : « La mer qui se lamente en pleurant les sirènes » (Heredia). Donc beauté visuelle, auditive, mais aussi tactile (contact de l'eau).

Cf. Camus dans la Mort heureuse : «Elle (la mer) était chaude comme un corps, fuyait le long de son bras, et se collait à ses jambes d'une étreinte insaisissable et toujours présente.

» Beauté olfactive aussi (odeur des embruns, de l'eau salée, du sable chaud...) qui fait «chavirer» Camus dans «l'odeur d'absinthe de la mer cuirassée d'argent» (Noces à Tipasa). Beauté gustative enfin que perçoit si bien Colette, elle qui rejoint la mer et sa force originelle par l'intermédiaire du goût salé dont elle imprègne la peau (Belgazou).

De même Ulysse, roulé par la tempête et ruisselant d'eau et de petites pierres qui brûlent sa peau, «avale le sel par la bouche et les narines » (Homère). • Poésie ou romans à langue poétique (cf.

Pêcheur d'Islande de Pierre Loti ou certaines pages des Mémoires d'outre- tombe de Chateaubriand) possèdent alors plus d'atouts que d'autres arts (ainsi le cinéma trop spécifiquement visuel) pour transposer tant de variances qui atteignent tous nos sens. Épopée, lyrisme, romanesque et fantastique présentent même la mer comme un être vivant, tantôt assez monstrueux : «Elle sifflait doucement au pied des grands blocs de la jetée et, comme ils les gravissaient, elle (la mer) leur apparut, épaisse comme du velours, souple et lisse comme une bête» (Camus, La Peste); tantôt d'une douceur étrange laissant percevoir le sentiment profond du tout et de l'harmonie, même si son imagerie reste proche des chimères : « L'hydre Océan tordant son corps écaillé d'astres.

» C'est peut-être Hugo (le vers précédent est de lui) qui a su le mieux dans une forme d'hymne serein et. »