Dans sa fable intitulée Les Deux Pigeons (IX, 2, v.54), La Fontaine écrit : « un fripon d'enfant (cet âge est sans pitié) » Après avoir recherché les causes qui ont pu amener La Fontaine à formuler ce jugement sévère, vous direz quelles réflexions il vous suggère.
Publié le 18/02/2011
                             
                        
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Depuis La Fontaine jusqu'au début du XXe siècle, la critique a désapprouvé la sévérité avec laquelle le fabuliste jugeait les enfants, On ne croyait pas que cet âge fût « sans pitié «. En 1968 l'actualité nous force à reconsidérer le problème. Et l'on est tenté de se demander si en définitive le « bonhomme « n'avait pas raison.
 
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                                                                                                                            III.
                                                            
                                                                                
                                                                    LA Pitié CHEZ L'ENFANT
a) L'éducation.On peut, sans contredire  pleinement La Fontaine, soutenir  que la pitié chez l'enfant  est uniquement  une affaired'éducation et qu'il est presque plus facile de l'attendrir et de l'apitoyer que de l'endurcir et de le rendre cruel.
                                                            
                                                                                
                                                                    Onsait comment  Fénelon sut adoucir  son élève,  le duc  de Bourgogne.
                                                            
                                                                                
                                                                     Si l'exemple  est donné  par les parents  etéducateurs,  la pitié  naît naturellement.
                                                            
                                                                                
                                                                     Mais si les  parents  sont semblables  aux paysans   de  Balzac  ou àl'archevêque de Reims évoqué dans une lettre célèbre de Mme de Sévigné, l'enfant sera à son tour impitoyable.La pitié, le respect envers la nature souhaités ici par La Fontaine, se sont développés en France à partir du momentoù les instituteurs des campagnes ont instruit leurs élèves à ce sujet.
                                                            
                                                                                
                                                                    Apparemment que les pédants ridiculisés dansles Fables ne valaient pas plus cher que leurs élèves.
b) La nature de l'enfant.L'enfant paraît  sans pitié parce qu'il est  naturel, inconscient.
                                                            
                                                                                
                                                                    Tant  qu'on ne l'a pas éduqué,  il reflète l'humanitéprimitive encore dans son enfance : dans cet état de pure nature, l'homme n'avait que son instinct.
                                                            
                                                                                
                                                                    Comme lesbêtes, il ne connaissait ni la cruauté ni la pitié.
                                                            
                                                                                
                                                                    Avait-il seulement la notion du bien et du mal? Mais un tel hommedont l'enfant nous offre le reflet, est inadapté à l'état social actuel, au monde transformé.
                                                            
                                                                        
                                                                    L'enfant a donc besoind'éducation pour avoir de la pitié.
c) L'action de la société.On peut donc soutenir, contrairement aux affirmations de Rousseau, que la pitié est un sentiment essentiellementdéveloppé par la société.
                                                            
                                                                                
                                                                    Dans le cas du pigeon de La Fontaine, l'enfant a peut-être obéi à l'instinct nutritif quipoussait ses ancêtres à chasser pour survivre.
                                                            
                                                                                
                                                                    Mais cet instinct s'exerce maintenant à vide chez un être social quin'en a nul besoin.
                                                            
                                                                                
                                                                    Et l'enfant ne réfléchit pas sur le mal qu'il fait à l'animal.
                                                            
                                                                                
                                                                    Il faut que la société le lui explique, sinonil se pervertira encore plus en y prenant plaisir comme s'il avait vaincu un ennemi.
CONCLUSION
Il ne faut donc pas rejeter a priori le jugement de La Fontaine, en s'attendrissant niaisement sur la prétendue bonténaturelle du jeune âge.Inversement il n'y a pas à s'étonner de la survivance des instincts primitifs de chasse, de défense, de lutte, denutrition.
                                                            
                                                                                
                                                                    L'éducateur doit donc faire pratiquer quotidiennement la pitié à l'enfant, comme Montaigne proposait, avecun sourire, qu'on donnât à l'enfant  des devoirs, des problèmes  pratiques de vertu.
                                                            
                                                                                
                                                                    Il doit faire sortir l'enfant  dustade de l'inconscience observé par La Fontaine, l'arracher à un mimétisme funeste en lui apprenant à distinguer lebeau du laid : « Bien penser : voilà le principe de la morale » (Pascal)..
                                                                                                                    »
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