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« Dans les livres, affirme Montesquieu, ou trouve les hommes meilleurs qu'ils ne sont. » Est-ce vrai des livres du XVIIe siècle que vous avez étudiés ?

Publié le 16/02/2012

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montesquieu

 

 

Peut-être Montesquieu entendait-il parler de ses propres ouvrages, ou des livres de son temps, auquel cas il aurait en partie raison. Si dans les Lettres Persanes il n'épargne pas ses compatriotes et les peint souvent plus laids que nature, ses Romains sont singulièrement embellis; et à côté des Français dépréciés, il a eu soin de placer ses chers Troglodytes, exemplaires de toutes les vertus humaines. Depuis Fénelon, il est de mode, en effet, de représenter dans les livres une humanité quelque peu artificielle. Fontenelle, Vauvenargues, Voltaire à ses heures, Rousseau surtout, Diderot et les Encyclopédistes, Buffon même ont obéi à cette tendance, chacun selon sont tempérament et le dessein qu'il poursuivait....

 

montesquieu

« raissent pas meilleurs dans l'ceuvre de Retz que dans celle de La Roche- foucauld.

Quelle vilaine humanite, menee exclusivement par l'interet, la vanite, la cupidite, la basse envie! Comme Pascal, La Bruyere assez sombre en general, nous montre quel- ques beaux cotes de l'homme.

Observateur attentif, en un milieu oil s'agitent toutes les passions, la verite l'oblige a peindre des types assez proches de ceux de La Rochefoucauld.

Mais it croit, lui, a la vertu, a l'amitie, au desin- teressement, a la pitie.

Et si la plupart de ses Caracteres n'embellissent pas les originaux, plusieurs comme /Emile (Conde) et Louis XIV sont certaine- ment flattes.

4La confession, remarque Nisard, a 'lyre l'homme au moraliste chretien... Le moraliste mondain ne juge l'homme que par ses actions » ; au tribunal de la penitence « les pensees dementent les actions » :seul le moraliste chretien sait toute la verite sur nous. Bossuet, eclaire par l'Ecriture, les Peres, le confessionnal, penetre dans le caeur humain plus loin que tons les anciens.

Peintre veridique, it decrit et flagelle le vice, it deflnit et Mare la vertu.

Et comme ce confesseur est aussi un homme de genie qui a scrute son propre cceur, cette double peinture est une des plus penetrantes, des plus emouvantes.

Aux « mortels ignorants de leurs destinees », it n'hesite pas a dire : t La premiere chose que Dieu mit dans le cceur de l'homme, c'est la bonte.

» Il nous presente en saint Bernard, en saint Paul des heros authentiques qu'il n'a point embellir et si, dans ses eloges funebres, il est oblige de passer sous silence ce qui peut choquer ou maledifier, it reste vrai, le sermonnaire sait etre historien. Bourdaloue, qui « frappe comme un sourd », n'embellit ni n'enlaidit les hommes; it leur dit leur fait, tout simplement.

Il les place en face du miroir on tout : bien et mal se reflete.

Est-ce sa faute si les rides et les verrues y sont plus nombreuses et visibles que nous le desirerions? Mais il se garde egalement d'ecraser sous son mepris ceux qu'il instruit et morigene.

Il les sait guerissables, capables de s'elever au-dessus d'eux-memes, et ne cesse de les convier a cette ascension vers les times du parfait. Fenelon =--- celui de Telemague -, pour avoir trop admire les Anciens et les heros d'Homere, s'est fait un ideal quelque peu chimerique de l'homme. Il regrette le temps oil celui-ci, se conformant a la « nature », menait une vie « aisee et tranquille », goOtait des plaisirs « sensibles et faciles », entre- tenait une humeur « aimable et sage ».

A cette humanite idyllique, devenue chretienne, it manquait la doctrine du « pur amour », l'esprit d' « enfance »,de « simplicite » et de « liberte ».

L'ami de Mme Guyon les lui apporte!... Mais it y a un autre Fenelon : celui de PEducation des Filles, qui connait A fond le cceur feminin; celui qui transforme le nature/ du duc de Bour- gogne, son eleve.

Il a done, lui aussi, connu tout Phomme, et les peintures de Telemague sont loin de representer toutes des hommes idealises! Le mot de La Bruyere : « Corneille peint les hommes comme ils devraient etre, Racine tels qu'ils sont » est devenu un lieu commun.

Il a ete maintes fois rectifle.

Sans doute, « une certaine grandeur, egalement eloignee d'un herolsme impossible et d'une vertu ordinaire, est le trait commun aux principaux personnages de Corneille.

» (Nisard.) Mais tons ses personnages ne sont pas des hems; ses heros eux-memes ont des hesitations, des fai- blesses en face du devoir a remplir, de l'obstacle a surmonter.

Si nous ne considerons que Rodrigue, Horace, Polyeucte, Nicomede, les hommes de Corneille nous apparaissent comme des Ames libres, maitresses d'elles- memes et de leur dentin, se connaissant admirablement, se conduisant avec une lucidite merveilleuse et douees d'une volonte souveraine et inflexible. Si nous etudions les Curiace, les Camille, les Maxime, les Felix, les Prusias, nous comprenons que Corneille ne s'est pas illusionne sur les hommes. Son theatre nous offre des heros, car il en existe et il est utile de les donner en spectacle; mais il nous presente aussi des hommes petris du meme limon que nous.

Qu'il ait embelli, « stylise » un Rodrigue, un Auguste, personnages qui nous apparaissent beaucoup moins grands dans l'histoire, que dans la tragedie, c'est la une necessite de son art.

Et ici Montesquieu a raison.

Racine, si realiste, a subi les memes exigences.

Son Andromaque ne ressemble que de loin a celle de l'antiquite, son Britannicus n'est pas celui raissent pas meilleurs dans l'œuvre de Retz que dans celle de La Roche­ foucauld.

Quelle vilaine humanité, menée exclusivement par l'intérêt, la vanité, la cupidité, la basse envie! Gomme Pascal, La Bruyère assez sombre en général, nous montre quel­ ques beaux côtés de l'homme.

Observateur attentif, en un milieu où s'agitent toutes les passions, la vérité l'oblige à peindre des types assez proches de ceux de La Rochefoucauld.

Mais il croit, lui, à la vertu, à l'amitié, au désin­ téressement, à la pitié.

Et si la plupart de ses Caractères n'embellissent pas les originaux, plusieurs comme iEmile (Condé) et Louis XIV sont certaine­ ment flattés.

« La confession, remarque Nisard, a livré l'homme au moraliste chrétien...

Le moraliste mondain ne juge l'homme que par ses actions » ; au tribunal de la pénitence « les pensées démentent les actions » : seul le moraliste chrétien sait toute la vérité sur nous.

Bossuet, éclairé par l'Ecriture, les Pères, le confessionnal, pénètre dans le cœur humain plus loin que tous les anciens.

Peintre véridique, il décrit et flagelle le vice, il définit et célèbre la vertu. Et comme ce confesseur est aussi un homme de génie qui a scruté son propre cœur, cette double peinture est une des plus pénétrantes, des plus émouvantes.

Aux « mortels ignorants de leurs destinées », il n'hésite pas à dire : « La première chose que Dieu mit dans le cœur de l'homme, c'est la bonté.

» Il nous présente en saint Bernard, en saint Paul des héros authentiques qu'il n'a point à embellir et si, dans ses éloges funèbres, il est obligé de passer sous silence ce qui peut choquer ou malédifier, il reste vrai, le sermonnaire sait être historien.

Bourdaioue, qui « frappe comme un sourd », n'embellit ni n'enlaidit les hommes; il leur dit leur fait, tout simplement. Il les place en face du miroir où tout : bien et mal se reflète. Est-ce sa faute si les rides et les verrues y sont plus nombreuses et visibles que nous le désirerions? Mais il se garde également d'écraser sous son mépris ceux qu'il instruit et morigène.

Il les sait guérissables, capables de s'élever au-dessus d'eux-mêmes, et ne cesse de les convier à cette ascension vers les cimes du parfait.

Fénelon — celui de Télémaque pour avoir trop admiré les Anciens et les héros d'Homère, s'est fait un idéal quelque peu chimérique de l'homme.

Il regrette le temps où celui-ci, se conformant à la « nature », menait une vie « aisée et tranquille », goûtait des plaisirs « sensibles et faciles », entre­ tenait une humeur « aimable et sage ».

A cette humanité idyllique, devenue chrétienne, il manquait la doctrine du « pur amour », l'esprit d' « enfance », de « simplicité » et de « liberté ». L'ami de Mme Guyon les lui apporte!...

Mais il y a un autre Fénelon : celui de l'Education des Filles, qui connaît à fond le cœur féminin; celui qui transforme le naturel du duc de Bour­ gogne, son élève.

Il a donc, lui aussi, connu tout l'homme, et les peintures de Télémaque sont loin de représenter toutes des hommes idéalisés! Le mot de La Bruyère : « Corneille peint les hommes comme ils devraient être, Racine tels qu'ils sont » est devenu un lieu commun. Il a été maintes fois rectifié. Sans doute, « une certaine grandeur, également éloignée d'un héroïsme impossible et d'une vertu ordinaire, est le trait commun aux principaux personnages de Corneille. » (Nisard.) Mais tous ses personnages ne sont pas des héros; ses héros eux-mêmes ont des hésitations, des fai­ blesses en face du devoir à remplir, de l'obstacle à surmonter. Si nous ne considérons que Rodrigue, Horace, Polyeucte, Nicomède, les hommes de Corneille nous apparaissent comme des âmes libres, maîtresses d'elles- mêmes et de leur destin, se connaissant admirablement, se conduisant avec une lucidité merveilleuse et douées d'une volonté souveraine et inflexible.

Si nous étudions les Curiace, les Camille, les Maxime, les Félix, les Prusias, nous comprenons que Corneille ne s'est pas illusionné sur les hommes.

Son théâtre nous offre des héros, car il en existe et il est utile de les donner en spectacle; mais il nous présente aussi des hommes pétris du même limon que nous.

Qu'il ait embelli, « stylisé » un Rodrigue, un Auguste, personnages qui nous apparaissent beaucoup moins grands dans l'histoire, que dans la tragédie, c'est là une nécessité de son art.

Et ici Montesquieu a raison.

Racine, si réaliste, a subi les mêmes exigences. Son Andromaque ne ressemble que de loin à celle de l'antiquité, son Britannicus n'est pas celui. »

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