Corrigé de dissertation : La cloche fêlée, Les Fleurs du Mal, Baudelaire
Publié le 25/07/2012
Extrait du document
Enfin, la personnification du vers 11, « sa voix affaiblie « renforce encore l’analogie, déjà amorcée par la métaphore, entre l’usure de la cloche et l’affaiblissement du poète. Cette personnification de la cloche se double d’un emploi en syllepse qui met en évidence un double référent : la cloche d’une part, et le poète d’autre part. Cette syllepse établit donc au final, par un jeu de miroir, une relation étroite entre l’état de la cloche et l’état de la vie du poète dont il réalise qu’elle va prendre fin. De plus, cette expression est mise en évidence par un effet de discordance syntaxique propre à l’écriture poétique. En effet, « sa voix affaiblie « est l’objet d’un contre-rejet qui met en valeur ce syntagme dans le cadre d’une évocation renforcée de l’angoisse de la mort. L’emploi de cette expression dans le cadre d’une proposition subordonnée relative introduite par « que « intervenant après la césure de l’alexandrin avec une organisation métrique 6/6 accentue encore cette valorisation.
«
de place au poète pour s'exprimer.
Cependant, une émotion de pitié ambiguë apparaît de manière très diffuse dans le sonnet mais laisse entendre une voix solennellequi pourrait être celle de Baudelaire traduisant la relation de ce dernier avec sa propre mort.
(Phrase de transition)
II Le poète et la mort : une relation ambiguë
L'expression de l'ironie, autre motif du symbolisme baudelairien en dehors de l'idée de surnature, engage la voix du poète dans une relation ambiguë avec la mort.
A/ La voix du poète dans l'énonciation
La voix du poète dans l'énonciation se fait d'abord discrètement pour évoluer vers une prise de conscience de la certitude de la mort.
L'antithèse « amer/ doux » duvers 1 laisse subtilement entendre la parole du poète par le recours à deux adjectifs qualificatifs de valeur.
Cette opposition révèle la forte ironie qui caractérisel'expérience de la mort du poète dans la mesure où elle renvoie à deux états affectifs à priori inconciliables.
La dualité du sentiment de légèreté et d'amertume vis àvis de la mort relayée par l'antithèse, procède d'une stratégie rhétorique du poète pour minimiser en apparence son angoisse de mourir mais pour au final la renforcer.Pour cela, Baudelaire recourt, outre l'antithèse, à la figure de l'antiphrase pour solliciter l'intelligence lecteur et lui faire comprendre son angoisse de la mort.
Parailleurs, cette légèreté teintée d'ironie se poursuit dans la métaphore du vers 3 : « Les souvenirs lointains (Cé) lentement s'élever (Ca) ».
Le verbe « s'élever » établitune analogie entre les souvenirs de la vie qui s'évacuent avec douceur à la manière d'un vol d'oiseaux.Mais la prise de conscience de l'évidence de la mort n'intervient qu'au vers 9 avec l'implication du poète dans l'énonciation avec le dérivé morphologique du pronompersonnel « je », « Moi » (vers 9) mis en début de vers pour souligner l'irruption soudaine du poète dans l'énonciation.
En apposition, et pour redoubler cette prise deconscience, la métaphore « mon âme est fêlée » établit une relation symbolique entre l'usure de la cloche et l'épuisement de la vie du poète.
En effet, « mon âme »(Cé) renvoie de façon métonymique au poète et « fêlée » (Ca) renvoie par référence au titre du sonnet à la cloche.Enfin, la personnification du vers 11, « sa voix affaiblie » renforce encore l'analogie, déjà amorcée par la métaphore, entre l'usure de la cloche et l'affaiblissement dupoète.
Cette personnification de la cloche se double d'un emploi en syllepse qui met en évidence un double référent : la cloche d'une part, et le poète d'autre part.Cette syllepse établit donc au final, par un jeu de miroir, une relation étroite entre l'état de la cloche et l'état de la vie du poète dont il réalise qu'elle va prendre fin.De plus, cette expression est mise en évidence par un effet de discordance syntaxique propre à l'écriture poétique.
En effet, « sa voix affaiblie » est l'objet d'uncontre-rejet qui met en valeur ce syntagme dans le cadre d'une évocation renforcée de l'angoisse de la mort.
L'emploi de cette expression dans le cadre d'uneproposition subordonnée relative introduite par « que » intervenant après la césure de l'alexandrin avec une organisation métrique 6/6 accentue encore cettevalorisation.Mais cette prise de conscience de la fatalité de la mort ne se fait pas naturellement sans une résistance de la part du poète qui passe par deux attitudes contradictoiresdans sa relation à la mort.
B/ Lexiques de la vie et de la mort/ Revolte et acceptation du poète
Le poète manifeste une double attitude vis à vis de sa propre fin : une attitude caractérisée par la pulsion de vie et la révolte d'une part, et part l'acceptation et l'idée,conformément à l'esthétique symboliste d'une libération, d'un salut de l'âme.Cette double attitude est en premier lieu présente dans l'antithèse du vers 1 qui structure l'ensemble du sonnet et établit une séparation entre pulsion de vie et pulsionde mort de part et d'autre du pronom personnel « moi ».
L'expression de pulsion de vie se répartit alors dans les deux quatrains, et la pulsion de mort motivée par unevolonté de libération dans les deux tercets.En effet, la pulsion de vie et la révolte sont exprimées au moyen de la métaphore « feu qui palpite » (vers 2) qui, par un mécanisme de personnification, établit uneanalogie implicite entre le cœur (Cé) , siège de la vie, et le feu (Ca), comparant symbolique de l'ardeur de la vie.Cette métaphore inscrit la figure du poète dans une lutte pour la vie mais celle ci est renforcée par un lexique sonore qui imite, par une métaphore phonétique, lesbattements du cœur.
Une allitération en [p] vient, dans les vers 1 et 2, illustrer cette harmonie sonore qui reproduit et imite phonétiquement le bruit du cœur.Ensuite, on trouve dans les deux quatrains un lexique de la vie très développé : « vigoureux » (vers 5), « alerte et bien portante » (vers 6), « veille » (vers 8) quirenforce l'idée même du désir de vivre du poète.En revanche, dans les deux tercets, suite à la prise de conscience du poète de l'inéluctabilité de la mort on trouve un réseau très dense du lexique de la mort : « fêlée »(vers 9), froid (vers 10), « affaiblie » (vers 11) , « oublie » (vers 12), « sang » (vers13), « morts » (vers 13) et « meurt ».Enfin, l'antithèse du vers 1 « amer (A) et doux (B)» est reprise dans le vers 14 de part et d'autre de la césure de l'alexandrin par un jeu de miroir avec une oppositionportant sur le lexique de l'immobilité et de la lutte : « […]meurt, sans bouger(B), dans d'immenses efforts (A).
L'antithèse du vers 14 retourne le sens de la premièreen soulignant la valeur de salut pour le poète de la victoire de la mort et renverse ainsi la dialectique entre révolte et acceptation.
Les deux antithèses font égalementapparaître un chiasme thématique selon le mécanisme suivant : révolte/ libération- libération/ révolte.
Ce chiasme produit un effet de clôture du sonnet et lie sous unangle thématique le vers 1 et le vers 14.On note aussi d'un point de vue de l'organisation des rimes que le vers 1 est isolé puisqu'il ne développe pas d'homophonie finale avec aucun des vers suivants desdeux quatrains qui développent des rimes croisées en A/B.A/B.
Ainsi, le vers 1 est sans ancrage sonore avec le reste de la strophe et fait donc office de versintroducteur.
Cependant, les deux tercets développent des rimes plates de structure A/A, B/B, C/C, ce qui vient redoubler la rupture lexicale entre vie et mortintervenue au vers 9..
»
↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓
Liens utiles
- Dissertation:Les fleurs du mal: Charles Baudelaire. En quoi le recueil Les Fleurs du mal peut-il apparaître “bizarre” au lecteur?
- Dissertation sur Les Fleurs du mal de Charles Baudelaire
- Texte d’étude : Charles Baudelaire, « L’Ennemi », Les Fleurs du Mal (1857): Le temps mange-t-il la vie ? (HLP Philo)
- Fiche de révision Les Fleurs du mal, Charles Baudelaire (1857)
- Baudelaire, dans l’appendice aux Fleurs du mal, écrit : « Tu m’as donné ta boue et j’en ai fait de l’or. » En quoi ce vers éclaire-t-il votre lecture du recueil de Baudelaire ?