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Corneille - Le Cid – Commentaire composé : Acte I, scène 1 : « Et dans ce grand bonheur je crains un grand revers »

Publié le 12/11/2013

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corneille

La pièce de Corneille, Le Cid, jouée pour la première fois en 1637, est la seconde tragi-comédie de Corneille. Elle montre, à travers le personnage Rodrigue déchiré entre son amour pour Chimène et la nécessité de venger son père, l’antagonisme entre les sentiments et l'honneur qui s’applique au théâtre cornélien.

La scène d'exposition du Cid est originale par sa structure et son contenu. Après une brève introduction, une longue tirade d’Elvire se déploie qui expose pour la seconde fois à

Chimène son entretien avec Don Gormas, son père. La scène se termine sur l’évocation des craintes de la jeune fille. Le contenu oriente vers ce qui sera la trame de la pièce : malgré les certitudes réitérées par Elvire, la fin de la scène renferme quelques atténuations de ces certitudes. Ce passage donne donc des indications sur la situation présente mais aussi sur les événements à venir. Dès le début de la scène, le spectateur reçoit ainsi des informations diverses concernant les personnages et les prémices de l'intrigue.

ACTE PREMIER

SCÈNE PREMIÈRE - CHIMÈNE, ELVIRE

CHIMÈNE

Elvire, m'as-tu fait un rapport bien sincère ?

Ne déguises-tu rien de ce qu'a dit mon père ?

ELVIRE

Tous mes sens à moi-même en sont encor charmés :

Il estime Rodrigue autant que vous l'aimez,

Et si je ne m'abuse à lire dans son âme,

Il vous commandera de répondre à sa flamme.

CHIMÈNE

Dis-moi donc, je te prie, une seconde fois

Ce qui te fait juger qu'il approuve mon choix ;

Apprends-moi de nouveau quel espoir j'en dois prendre ;

Un si charmant discours ne se peut trop entendre ;

Tu ne peux trop promettre aux feux de notre amour

La douce liberté de se montrer au jour.

Que t'a-t-il répondu sur la secrète brigue

Que font auprès de toi don Sanche et don Rodrigue ?

N'as-tu point trop fait voir quelle inégalité

Entre ces deux amants me penche d'un côté ?

ELVIRE

Non, j'ai peint votre cœur dans une indifférence

Qui n'enfle d'aucun d'eux ni détruit l'espérance,

Et sans les voir d'un œil trop sévère ou trop doux,

Attends l'ordre d'un père à choisir un époux.

Ce respect l'a ravi, sa bouche et son visage

M'en ont donné sur l'heure un digne témoignage,

Et puisqu'il vous en faut encor faire un récit,

Voici d'eux et de vous ce qu'en hâte il m'a dit :

« Elle est dans le devoir, tous deux sont dignes d'elle,

Tous deux formés d'un sang noble, vaillant, fidèle,

Jeunes, mais qui font lire aisément dans leurs yeux

L'éclatante vertu de leurs braves aïeux.

Don Rodrigue surtout n'a trait en son visage

Qui d'un homme de cœur ne soit la haute image,

Et sort d'une maison si féconde en guerriers,

Qu'ils y prennent naissance au milieu des lauriers.

La valeur de son père en son temps sans pareille,

Tant qu'a duré sa force, a passé pour merveille ;

Ses rides sur son front ont gravé ses exploits,

Et nous disent encor ce qu'il fut autrefois.

Je me promets du fils ce que j'ai vu du père ;

Et ma fille, en un mot, peut l'aimer et me plaire. «

Il allait au conseil, dont l'heure qui pressait

A tranché ce discours qu'à peine il commençait ;

Mais à ce peu de mots je crois que sa pensée

Entre vos deux amants n'est pas fort balancée.

Le roi doit à son fils élire un gouverneur,

Et c'est lui que regarde un tel degré d'honneur ;

Ce choix n'est pas douteux, et sa rare vaillance

Ne peut souffrir qu'on craigne aucune concurrence.

Comme ses hauts exploits le rendent sans égal,

Dans un espoir si juste il sera sans rival ;

Et puisque don Rodrigue a résolu son père

Au sortir du conseil à proposer l'affaire,

Je vous laisse à juger s'il prendra bien son temps,

Et si tous vos désirs seront bientôt contents.

CHIMÈNE

Il semble toutefois que mon âme troublée

Refuse cette joie, et s'en trouve accablée :

Un moment donne au sort des visages divers,

Et dans ce grand bonheur je crains un grand revers.

ELVIRE

Vous verrez cette crainte heureusement déçue.

CHIMÈNE

 

Allons, quoi qu'il en soit, en attendre l'issue.

corneille

« ACTE PREMIER ------------ SCÈNE PREMIÈRE - CHIMÈNE, ELVIRE CHIMÈNE Elvire, m'as -tu fait un rapport bien sincère ? Ne déguises -tu rien de ce qu'a dit mon père ? ELVIRE Tous mes sens à moi -même en sont encor charmés : Il estime Rodrigue autant que vous l'aimez, Et si je ne m'abuse à lire dans son âme, Il vous commandera de répondre à sa flamme.

CHIMÈNE Dis -moi donc, je te prie, une seconde fois Ce qui te fait juger qu'il approuve mon choix ; Apprends -moi de nouveau quel espoir j'en dois prendre ; Un si charmant discours ne se peut trop entendre ; Tu ne peux trop promettre aux feux de notre amour La douce liberté de se montrer au jour.

Que t'a -t-il répondu sur la secrète brigue Que font auprès de toi don Sanche et don Rodrigue ? N'as -tu point t rop fait voir quelle inégalité Entre ces deux amants me penche d'un côté ? ELVIRE Non, j'ai peint votre cœur dans une indifférence Qui n'enfle d'aucun d'eux ni détruit l'espérance, Et sans les voir d'un œil trop sévère ou trop doux, Attends l'ordre d 'un père à choisir un époux.

Ce respect l'a ravi, sa bouche et son visage M'en ont donné sur l'heure un digne témoignage, Et puisqu'il vous en faut encor faire un récit, Voici d'eux et de vous ce qu'en hâte il m'a dit : « Elle est dans le devoir, tous deux sont dignes d'elle, Tous deux formés d'un sang noble, vaillant, fidèle, Jeunes, mais qui font lire aisément dans leurs yeux L'éclatante vertu de leurs braves aïeux.

Don Rodrigue surtout n'a trait en son visage Qui d'un homme de cœur ne soit la haute image, Et sort d'une maison si féconde en guerriers,. »

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