Étude de « Ça « de Tristan Corbière Problématique : Comment le poète fait-il d'un liminaire un véritable art poétique ? (Liminaire = préface d'un recueil) Corbière va se servir d’exordes de grands auteurs pour ensuite les détourner. Plan : I – Un liminaire conçu comme un véritable suicidaire littéraire ! La caricature des exergues Généralement, un exergue est une caution littéraire, un vernis critique et une injonction à laquelle l'auteur doit répondre et être à la hauteur de l'auteur qu'il site. 1er exergue : « What ! « → excise drôlerie : injonction comme une mise en demeure Est-il besoin d'écrire par la suite par rapport à l’écho du pronom démonstratif « ça « ? On s'imagine la fouille du douanier ; il y a aussi un jeu d'acteurs avec cet exergue : Corbière joue à l'apprenti poète. 2ème exergue : « Je voudrais que la rose – Dondaine ! Fut encore au rosier – Dondé « C'est une ritournelle qui contamine le texte et qui fait passer Ronsard comme un idiot, et qui arrive jusqu'au deuxième tableau : « repasser à la ritournelle et repasser «. Apologie du grotesque ou moyen de rigueur. 1er quatrain : Couplet d'une chanson populaire : « A la claire fontaine «. La rose coupée symbolise sa virginité qu'il perd en arrivant à Paris. Impression d'un dialogue intérieur entre pur naïveté du poète et part incomprise. → dialogue intérieur entre la part du poète naïf et désabusée. Vers 1 : « poète « : attribué au poète lui-même comme aux parisiens le reprenant à sa valeur. Le premier conseil du Parisien « il faut la chose « semble faire référence à l'élocution « Le nom ne fait rien à la chose « = « L'habit ne fait pas le moine «. La chose (en italique) marque une idée de snobisme, c'est quelque chose que la personne naïve ne peut comprendre. 3ème exergue : (Épitaphe) Sagesse des nations : Remarque, jugement, conseil de bon sens, résultant d'une longue expérience que les nations mettent en proverbe. Corbière se moque des proverbes et de la vision des choses. Un siècle en soldes : A la question dans Préfecture de police : « Mais est-ce du Huron, du Gagne ou du Musset ? « Du Huron : référence marquée à Voltaire, → référence à une sorte de dialecte canadien ; Du Gagne Polin (1808 – 1876) : qui revendiquait son excentricité, auteur de centaines d'ouvrages d'une extrême bizarrerie,dont par exemple : La satania du Spirisatarisme cité par Isidor Ducasse dans ses Poésie ; Musset est qu'en à lui cité en tant qu'auteur romantique (ex : Le mal du siècle) mais aussi en tant que père et référence pour Corbière ici. Nous pouvons voir qu'il y a un attachement au Grotesque, une « satura « (satyre). 3ème tableau : Apologie du grotesque, (qu'on peut aussi retrouver chez Scarron) Tentative de définition de la « chose « (diérèse en « lier «), la « chose « serait une tentative de sabotage, On assiste à une cour des miracles dans la tête de Corbière qui fait du poète un être génial et incompris, d'ailleurs l' « Incompris « est reprit au 2ème quatrain. La « chose « est le « Ça « (en psychanalyse : c'est l’inconscient qui dirige la personne). Corbière s'est crée tout un monde, et sera toujours incompris. Il se trouvait laid → (Quasimodo de Hugo) : construction d'une personnalité avec psychomaquie. Idée de retour aux origines pour écrire LE poème. « On a le pied fait à sa chaîne « = il ne peut échapper à son destin de poète, et on ne peut revenir en arrière : « - Trop tard ! «. Il est ce qu'il est, il fait ce qu'il fait et n'attend rien en retour. « Le mélange du grotesque et du tragique sont agréables à l'esprit et aux oreilles blasées. « (Baudelaire) Ce poème est véritablement la définition du poète d'après Corbière : animal incompris, tantôt naïf, tantôt grandiose qui parfois essaye, parfois peut faire des choses assez viles. Être poète pour lui, c'est pouvoir exprimer toute la pléthore des esprits et des êtres, joindre les contraires, offrir des associations douteuses, être à la fois extrêmement proche de par le vocabulaire employé mais aussi extrêmement détaché, et finalement à travers ce dernier tersait, on voit ici que Corbière manie l'art du contre pied. Il ne se sent pas glorieux d'être se qu'il est. « Le parnasse en escalier « = jeu de mots issu du latin : « Gradus ad Parnassum « (marcher vers le Parnasse «. (Le mont parnasse est une montagne du centre de la Grèce, qui surplombe la cité de Delphes. Particulièrement vénéré dans l'Antiquité, il était consacré à la fois au dieu Apollon et aux neuf Muses, dont il était l'une des deux résidences.) « Le Dégouteux, la Chlorose et les Bedeaux« : ces majuscules utilisées (antonomases) font de ces substantifs les poses en vogue dans ce siècle : il faut avoir le culte pour le morbide, le romantisme, le malheur, la folie... Corbière est un professeur de dégoût. « Chlorose « = sinistrose (forme d'anémie) « Bedeaux « (= laïc) : repris dans les Amours jaunes pour désigner un poème de Lamartine : « un poète qui s'en va «, ou Lamartine lui-même (« un doux bedeau «) « mancenillier « (petit d'arbre dont le latex et les fruits sont très toxiques) : endroit de mort, il sert du poison : aide le poète à trouver sa prose → incompris → qui boit, qui sombre dans l'ivresse... Vers 9 : diérèse ou synérèse de « rosier « Vers 11 et 12 : les commentaires du parisien incompris tournent en dérision les regrets de l’irrémédiable («- Trop tard -«) et celui très stéréotypé d'un état de nature dans toutes les acceptions du mot. Vers 13 et 14 achèvent le portrait lamentable de celui qui échoue à Paris : le poète ou l'arti...