commentaire Proust du côté de chez Swann Combray
Publié le 25/04/2024
Extrait du document
«
Du côté de chez Swann, publié en 1913, constitue le premier des sept tomes et
l’une des pièces maitresse de l’oeuvre de Marcel Proust intitulée « À la recherche du
temps perdu ».
Il s’agit de l'une des plus importantes oeuvres romanesques du
XXème siècle.
Le narrateur, souvent identifié à l'auteur, cherche à transcrire au
travers de l'écriture une réflexion sur la mémoire et le temps.
Le passage que nous
allons étudier, intitulé « Combray », est tiré de la première des 3 parties de ce premier
volume.
Combray est en fait le village réel d'Illiers situé près de Chartres qu’il a
choisi de rebaptiser dans son roman et qui a depuis adopté ce nom emprunté à la
littérature.
Dans cet extrait, situé juste après le chapitre de la madeleine, le narrateur
nous raconte ses souvenirs d’enfance.
Plus précisément lorsqu’il rendait visite dans
ce village, pendant les vacances de Pâques, à sa tante Léonie malade et toujours
alitée.
Il se souvient plus particulièrement des sensations ressenties dans la chambre
contigüe à celle de sa tante dans laquelle il patientait avant de pouvoir entrer
l’embrasser.
Nous nous demanderons comment l’auteur arrive à nous transporter et à
nous faire réfléchir à travers l’évocation de souvenirs d’enfance émanant d’une
expérience involontaire vécue au coeur d’une chambre provinciale.
Nous verrons
dans un premier temps l’importance qui est accordée aux descriptions sensorielles
dans ce passage, puis nous aborderons le cadre réaliste et épidictique dans lequel il se
dresse.
Enfin, nous remarquerons que cet extrait constitue un souvenir introspectif
émanant de sensations perçues involontairement et permettant de les ancrer dans
l’intemporalité.
Dès le début, Proust s’attèle à nous décrire les chambres de province au coeur
d’un panorama sensoriel où les sensations olfactives et gustatives sont exacerbées.
Tout d’abord, nous remarquons qu’un tableau olfactif, parfumé de la vie à la
campagne se dresse et qu’il va perdurer tout au long du texte.
Cela nous rappelle la
plupart du temps des odeurs agréables qui sont retranscrites à travers de nombreuses
métaphores olfactives, fil conducteur de la description des chambres de la tante
Léonie « parfumées », « nous enchantent des odeurs », « odeurs naturelles »,
« odeur de pain chaud », « odeur de suie », « appétissantes odeurs ».
D’ailleurs
pour décrire ces odeurs, l’écrivain va user d’une accumulation adjectivale utilisée
métaphoriquement comme instrument pour favoriser la création des phénomènes
olfactifs.
Cette diversité est intensifiée par l’absence de répétitions.
Chaque adjectif
n’est utilisé qu’une fois.
En se rapportant aux champs lexicaux de la nature,
«naturelle », « matinale », « saisonnière », « fruitée », de l’individu,« ponctuelle »,
« flâneuse », « insoucieuse », « dévote », « heureuse », « casanière », du goût
« appétissante », « fade », « indigeste », ou de la maison ,« renfermée »,
« mobilière », « domestique », « lingère », et associés aux odeurs, ces qualificatifs
vont constituer une métaphore sensorielle liée au bonheur des souvenirs d’enfance du
héros à Combray.
Ainsi, même les Odeurs, qui pourraient paraitre désagréables ou
neutres, « odeur médiane, poisseuse, fade » ne perturbent pas la perception
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principale de l’odeur agréable.
Elles contribuent à la réminiscence de ce moment
heureux tant désiré par le narrateur comme le montre le nom « convoitise ».
Puis,
l’importance des sensations olfactives est également renforcée par la continuité
métonymique de l’air et de l’odeur reflétée tout au long de l’extrait.
Ainsi, l’odeur
devient simplement l'air.
L’intensité olfactive est aussi mise en exergue par la
concomitance du nom « air » avec d’autres mots relatifs aux odeurs dans la même
phrase « des parties entières de l’air ou de la mer sont illuminées ou parfumées
par des myriades de protozoaires que nous ne voyons pas ».
D’ailleurs, on peut
également penser que l’air associé à « la fraicheur humide et ensoleillée du matin »
comporte la notion de respiration et offre une ouverture, de la chambre vers
l’extérieur.
La fraicheur est perçue par la respiration de l'air pur et frais entrant par la
fenêtre.
Cet acte olfactif est en fait la perception de l'odeur naturelle, de la campagne
du bonheur et de la joie qui permet en outre aux odeurs intérieures et extérieures de
se mêler harmonieusement.
Le substantif « arôme », synonyme des noms « odeur »
et « parfum » et qui est employé avec d'autres termes relatifs aux odeurs, vient
amplifier la valeur accordée aux sensations olfactives.
Ensuite, on voit que la Description ne mobilise pas seulement les odeurs.
Le
narrateur nous invite également à le suivre au travers d’un voyage au coeur de
sensations gustatives.
En effet, le champ lexical du goût avec les adjectifs mélioratifs
« appétissantes », « succulent » , du nom « gourmandise », ou des verbes
« goûtais », « cuit » nous engage à partager cette description goûtue.
La métonymie
constituée par « le feu cuisant comme une pâte les appétissantes odeurs dont l'air
de la chambre était tout grumeleux » permet à l’air de se fondre en un arôme
comestible.
La présence du vocabulaire de la pâtisserie avec « gelée exquise »,
« fruitée » ,« gâteaux provincial », « chausson », ne vient que renforcer le
sentiment de gourmandise lié aux sensations gustatives.
De surcroit, avec la gradation
constituée par les verbes liés au vocabulaire culinaire « feuilletait, dorait, godait,
boursouflait » la description du « gâteau provincial» qui cuit est valorisée.
La
boursouflure est mise en relief, pouvant même suggérer la madeleine si chère à
Proust.
Enfin, nous pouvons voir de multiples références aux températures ressenties par
l’auteur dans cette chambre.
Cela vient créer un contraste qui oscille entre le chaud et
le froid comme le suggère les champs lexicaux de la chaleur et du froid tels que
«gelée », « froids », « neige », « hivernage », « hiver » d’un côté et «chaud »,
« soleil », « feu », « cheminée », « ensoleillée » de l’autre.
Cette opposition entre les sensations physiques ressenties du froid extérieur et du
chaud intérieur met en relief le bien-être perçu par le héros dans cette chambre
provinciale.
Le parallélisme « le piquant de la gelée blanche par la douceur du
pain chaud » souligne encore davantage ce sentiment.
Ainsi, nous comprenons que
l’auteur fait intervenir un tableau sensoriel pour nous livrer ses souvenirs d’enfance
dans la ville de Combray.
Il y attache des odeurs, des goûts et des sensations
particulièrement évocatrices.
S’il choisit de nous faire voyager à travers les sens,
nous pouvons remarquer que celui-ci nous livre également une traduction réaliste et
élogieuse d’une vie à la campagne.
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Les souvenirs transparaissent au travers du réel et du registre épidictique de
l’extrait.
En premier lieu, nous pouvons noter que cette scène se dresse dans un décor rural
réaliste.
L’aspect visuel y est évoqué avec le nom couleur « cette ville à la couleur
de la campagne », et la description nous livre des détails sur l’aspect bien
campagnard de la ville.
La précision du lieu où se déroule ce texte « Combray »
permet d’ancrer le roman dans la réalité.
Le champ lexical de la campagne
« verger », « village », intensifié par le polyptote « province » et « provincial »,
vient créer un espace naturel qui tend à s’inscrire dans le réel.
De surcroit,
l’importance de la nature est mise en valeur par la répétition du substantif « fleur(s)»
et par l’idéalisation de toutes les campagnes, suggérée par la comparaison « comme
celles de la campagne voisine » .
De plus, les fruits vont être mis en valeur, grâce au
travail de fabrication des confitures.
L’adjectif mélioratif « industrieuse », qui fait
référence à ce travail de transformation « domestiques » évoqué, amplifie cette
intention.
Le verger entre ainsi dans la maison et les odeurs de fruits vont perdurer
tout au long de l’année grâce à ce travail de conservation.
Le syntagme de « la gelée
exquise, industrieuse et limpide de tous les fruits de l’année », avec l’assonance en
[i] harmonise la diversité des arômes et met en relief cette idée.
Il constitue également
un hypallage pour les odeurs de la chambre de Léonie où flotte un parfum de
confiture qui accentue cette vision.
Le champ lexical des meubles et des objets dont,
« armoire », « fauteuil », « commode », « placard », « briques », « horloge »,
« four », « cheminée », « manteau » manifeste le désir de donner une description de
l’extrait qui s’inscrit bien dans un cadre réel.
En second lieu, l’auteur va plus loin puisqu’il dépasse la réalité prosaïque en
conférant une tonalité affective par l’ éloge des odeurs et une imagination poétique.
En effet, on trouve sans peine dans ce texte le registre épidictique puisque Proust fait
l’éloge des « odeurs » et de cette chambre de province en employant de nombreux
termes mélioratifs tels que « fine fleur », « exquise », « appétissantes »,
« succulent ».
Le verbe « enchanter » conjugué....
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