Commentaire Ovide , l’Art d’aimer, l’Age d’Or des poètes. (II, v.273 sqq)
Publié le 28/09/2011
Extrait du document
Problématique : une digression satirique comme il en existe quelques-unes dans l’Art d’aimer et qui ont sans
doute à la fois expliqué le succès de l’oeuvre mais aussi sa dangerosité. Comme d’habitude, Ovide glisse d’un
sujet à l’autre mais s’attarde particulièrement sur le statut de poète à son époque.
I. Une lamentation moraliste
Comme d’habitude, Ovide se pare d’un ton inhabituel pour lui et un peu surprenant pour le lecteur ; ici c’est la déploration classique des horreurs du temps ; on s’attend d’ailleurs à un éloge non moins classique du mos majorum… qui ne vient pas. Et c’est sans doute un indice montrant que, comme d’habitude, Ovide ne fait que jouer avec des clichés....
«
Transition : Cette « lamentation » était en fait assez comique et ironique finalement.
Ovide reste
ensuite dans le même ton de plainte amusante, et se lance dans un registre typiquement latin, la satire.
Il y
effleure brièvement quelques types sociaux, victimes habituelles des poètes latins.
II.
Une satire « à la romaine ».
Quintilien (X, 1, 9): « satura tota nostra est ».
La satire est un registre qui correspond bien à l’esprit de ce
peuple railleur, et qui signifie à l’origine « pot pourri ».
un registre varié, donc.
1. Le nouveau riche
- Un seul vers lui est consacré, mais on songe vite à un personnage du type Trimalcion : affranchi,
métèque, ou simplement étranger, certainement oriental pour être aussi riche, le Barbare brille par son
mauvais goût et son désir de clinquant ( dummodo sit dives ).
D’une phrase, brève et allusive, Ovide nous
rappelle la diversité de la population romaine au moment de son embellissement sous Auguste, et des
richesses qui y affluent de toutes les provinces de l’Empire.
2. La femme savante
La critique des femmes, venue de la poésie grecque, se double du goût romain pour la satire et donne naissance à
la figure de la femme savante, que l’on retrouvera chez Martial ou Juvénal.
- Le comique du texte réside dans l’effet de surprise : on s’attend, après le premier vers consacré aux
femmes, à un éloge des femmes cultivées ( rarissima turba ).
Mais l’éloge cède vite la place à la satire.
- ici, Ovide fustige la mode de l’intellectualisme qui touche toutes les femmes sans exception ( altera ,
l’autre des deux, implique toutes les autres femmes), mais aussi le goût de l’apparence ( esse volunt ,
elles prétendent l’être).
- Le dernier effet comique consiste à mettre les deux types de femmes sur le même plan ( utraque, His
aut illis ), dans un amoralisme assez amusant.
Le poète ne dédaigne pas les prétentieuses ou les incultes,
et déclare qu’elles feront toutes les deux une cible acquise au mauvais poète ( Utraque laudetur per
carmina .)
3. Le poète du dimanche
- c’est finalement la vraie cible de la satire d’Ovide, qui se moque de son lecteur et de ses prétentions
littéraires : les vers peuvent avoir une qualité très discutable ( qualiacumque ) ; c’est la voix suave du
lecteur qui leur donnera leur valeur ( dulci sono commendet ).
- Le vigilatum carmen est peut-être une allusion à Lucrèce, mais aussi aux travaux d’écriture de mauvaise
qualité, lieu commun de la satire romaine, qui « sentent l’huile » à force de travail nocturne.
Le peu de
valeur de ce type de concurrence est souligné par instar exigui muneris , « ersatz de petit cadeau ».
Ovide en rajoute avec le modalisateur forsitan , peut-être, qui suggère avec beaucoup de brièveté et de
force le tableau comique d’une femme insatisfaite renvoyant au visage du poète du dimanche ses
impromptus ratés.
Conclusion : la qualité principale de ce poème, c’est sa force d’évocation mêlée à une extrême brièveté.
Quelques mots suggèrent des scènes entières, rappellent des passages célèbres d’autres poèmes, renouvellent les
clichés.
En une dizaine de vers, Ovide parvient à réécrire Horace, Virgile et Lucrèce, à railler les pratiques
littéraires de son temps, à se lancer dans la satire, et à appeler Mécène à se souvenir de lui.
Ce faisant, il se
valorise aux dépends de son lecteur, créant ainsi avec lui un lien inédit !.
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