Commentaire littéraire du texte ci-dessous - coeff.
Publié le 21/04/2017
Extrait du document
«
Scène III
Une maison de paysans dans les
environs de Varsovie.
PLUSIEURS PAYSANS sont assemblés.
UN PAYSAN (entrant)
Apprenez la grande nouvelle.
Le roi est
mort, les ducs aussi et le jeune
Bougrelas s’est sauvé avec sa mère
dans les montagnes.
De plus, le Père
Ubu s’est emparé du trône.
UN AUTRE
J’en sais bien d’autres.
Je viens de
Cracovie, où j’ai vu emporter les corps
de plus de trois cents nobles et de cinq
cents magistrats qu’on a tués, et il
paraît qu’on va doubler les impôts et
que le Père Ubu viendra les ramasser
lui-même.
TOUS
Grand Dieu ! Qu’allons-nous devenir ?
Le Père Ubu est un affreux sagouin et
sa famille est, dit-on, abominable.
UN PAYSAN
Mais, écoutez : ne dirait-on pas qu’on
frappe à la porte ?
UNE VOIX (au-dehors)
Cornegidouille ! Ouvrez, de par ma
merdre, par saint Jean, saint Pierre et
saint Nicolas ! Ouvrez, sabre à
finances, corne finances, je viens
chercher les impôts ! (La porte est
défoncée, Ubu pénètre suivi d’une
légion de Grippe-Sous.)
Scène IV
PÈRE UBU
Qui de vous est le plus vieux ? (Un
paysan s’avance.) Comment te
nommes-tu ?
LE PAYSAN
Stanislas Leczinski.
PÈRE UBU
Eh bien, cornegidouille, écoute-moi
bien, sinon ces messieurs te couperont
les oneilles.
Mais, vas-tu m’écouter
enfin ?
STANISLAS Mais Votre Excellence n’a encore rien
dit.
PÈRE UBU
Comment, je parle depuis une heure.
Crois-tu que ji vienne ici pour prêcher
dans le désert ?
STANISLAS
Loin de moi cette pensée.
PÈRE UBU
Je viens donc te dire, t’ordonner et te
signifier que tu aies à produire et
exhiber promptement ta finance, sinon
tu seras massacré.
Allons,
messeigneurs les salopins de finance,
voiturez ici le voiturin à phynances.
(On apporte le voiturin.)
STANISLAS
Sire, nous ne sommes inscrits sur le
registre que pour cent cinquante-deux
rixdales que nous avons déjà payées, il
y aura tantôt six semaines à la Saint
Mathieu.
PÈRE UBU
C’est fort possible, mais j’ai changé le
gouvernement et j’ai fait mettre dans
le journal qu’on paierait deux fois tous
les impôts et trois fois ceux qui
pourront être désignés ultérieurement.
Avec ce système j’aurai vite fait
fortune, alors je tuerai tout le monde et
je m’en irai.
PAYSANS
Monsieur Ubu, de grâce, ayez pitié de
nous.
Nous sommes de pauvres
citoyens.
PÈRE UBU
Je m’en fiche.
Payez.
PAYSANS
Nous ne pouvons, nous avons payé.
PÈRE UBU
Payez ! ou je vous mets dans ma poche
avec supplice et décollation du cou et
de la tête ! Cornegidouille, je suis le roi
peut-être !
TOUS.
»
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