Commentaire Lettre 24 des Lettres Persanes de Montesquieu
Publié le 28/03/2020
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Charles Louis de Secondat, baron de Montesquieu est un écrivain, philosophe français et père de la sociologie. Il est né le 18 janvier 1689 à Brède et mort le 10 février 1755, à Paris. Il appartient au mouvement du siècle des Lumières (XVIII e siècle). Il a écrit de nombreux livres comme les Lettres Persanes publié en 1721 anonymement à Amsterdam ; il est aussi l’auteur de L’Esprit des Lois (1748). Les Lettres Persanes est un recueil de lettres, écrites par deux Persans venus en France : Rica et Usbek. Les lettres sont donc écrites à travers le regard d’étrangers, ce qui permet de faire une présentation originale et critique des mœurs et coutumes françaises. Rica est à Paris depuis un mois quand il écrit la « Lettre 24 ». Il y fait une présentation étonnante de Louis XIV puis du pape Clément XI. Le roi et le pape sont, à l’époque deux figures d’autorité importantes : le roi est souverain absolu et l’influence du pape et de la religion sont considérables. A travers cette description vue par les yeux d’un voyageur persan, de nombreux reproches leurs sont adressés. Comment se met en place une critique violente de l’autorité royale et pontificale à travers le regard faussement naïf d’un étranger ? Nous verrons en premier lieu, le caractère plaisant du texte, ensuite nous étudierons le fonctionnement de l’ironie et enfin évoquer la critique virulente de la société qui apparaît.
Premièrement, Les Lettres Persanes de Montesquieu sont rendues plaisantes par le choix de l’épistolaire. La lettre 24, tout particulièrement, est très amusante parce que Rica, le destinateur est un habile conteur et que sa naïveté est désopilante.
Tout d’abord, le choix de l’épistolaire est une façon pour Montesquieu de faire un récit plaisant. Les noms même des deux persans « Rica » et « Ibben » (l.1) a quelque chose d’exotique et original qui fascine le lecteur. Le choix du lieu « Smyrne » (l.2) fait également rêvé parce qu’il évoque un lieu lointain. Et la précision de la date « le 4 de la lune de Rebiab, 2, 1712 » (l.21) fait sourire parce que sous couvert de vraisemblance, elle n’a rien de réaliste. Ainsi, l’épistolaire et le choix des personnages donne au texte un caractère plaisant. Ensuite, Montesquieu choisit de donner la parole à un Persan au regard naïf, ce qui confère au texte son caractère amusant. Rica semble découvrir la France avec étonnement et la présenter à Ibben pour la lui faire découvrir à son tour. Il présente donc deux des plus grands personnages de l’époque : le roi et le pape. Il n’utilise pas leurs noms (Louis 14 et Clément XI), comme si cela n’avait finalement pas d’importance. Il les présente comme si c’était de parfaits étranger pour son lecteur avec des tournures comme « ce que je te dis… »( l.16) ou « il y a… ce magicien s’appelle »(l.18) et il les compare tous les deux à un « grand magicien ». Avec cette métaphore, on imagine le roi de France avec un chapeau et qui fait sortir des billets en fonction de ses besoins. L’image le décrédibilise totalement. Rica utilise aussi de nombreuses périphrases pour remplacer des termes spécifiques dont il ignore le nom comme « trois ne sont qu'un » (l.18) pour désigner la trinité. En procédant de la sorte, Montesquieu rend la naïveté de Rica amusante pour le lecteur. Enfin, ce personnage est également un habile conteur et cela rend aussi le texte plaisant. Il fait preuve notamment d’une habileté déconcertante dans la progression de sa description. Le texte s’articule autour de deux mouvements : la présentation du roi, puis du pape qui suit un ordre hiérarchique logique. Rica ménage son interlocuteur et prévoit ses réactions avec des remarques comme « ne doit pas t’étonner » (l.16) alors qu’évidemment, ses descriptions du « prince » (l.3) et du « pape » (l.18) sont très surprenantes. Il pique la curiosité du lecteur et le tient en haleine. Par exemple, la rencontre des deux propositions dès le début du texte « il n’a pas de mines d’or » et « mais il a plus de richesses » (l.4) suscite les questions du lecteur qui attend une explication. Ainsi, le discours de Rica doit tenir son destinataire, Ibben, en haleine parce qu’il suscite son intérêt. Avec lui, la curiosité du lecteur est piquée.
Donc, l’efficacité du texte tient à son caractère plaisant. Le regard que le Persan porte sur la société lui procure une certaine légèreté et provoque l’intérêt du lecteur qui pénètre dans cette correspondance. Les aspects amusants sont associés à l’ironie.
«
la rencontre des deux propositions dès le début du texte « il n’a pas de mines d’or » et « mais il a plus
de richesses » (l.4) suscite les questions du lecteur qui attend une explication.
Ainsi, le discours de
Rica doit tenir son destinataire, Ibben, en haleine parce qu’il suscite son intérêt.
Avec lui, la curiosité
du lecteur est piquée.
Donc, l’efficacité du texte tient à son caractère plaisant.
Le regard que le Persan porte sur la
société lui procure une certaine légèreté et provoque l’intérêt du lecteur qui pénètre dans cette
correspondance.
Les aspects amusants sont associés à l’ironie.
Deuxièmement, l’ironie est omniprésente dans cet extrait et c’est sur elle que repose tout
l’intérêt du texte .
En premier lieu, l’ironie est créée par l’épistolaire : la correspondance entre les deux Persans
est fictive.
Cette fiction lui permet de critiquer la société tout en évitant la censure.
La lettre est écrite
de Rica à Ibben mais en amont, Montesquieu s’adresse au lecteur du 18e siècle pour le faire réfléchir
sur la société dans un style propre à l’esprit des lumières.
La date « 1712 » renvoie au moment
supposé de l’écriture de la lettre.
Cela donne de la vraisemblance au récit mais en même temps la
précision « le 4 de la lune de Rebiab » (l.2) est très exotique et amusante.
La date de parution « 1721
» montre le décalage avec l’écriture et souligne la présence d’un double système d’énonciation.
Le
décalage entre la naïveté de Rica et la portée de ses paroles ne peut être saisie par le lecteur qu’avec
l’idée que la voix de Montesquieu s’exprime derrière.
Ainsi, l’épistolaire permet la mise en place de
l’ironie.
En second lieu, l’ironie
s’exprime en grande partie à travers les périphrases que le lecteur doit comprendre.
Le texte présente
de grand nombre d’allusions à des faits historiques : « mines d'or comme le roi d'Espagne » (l.3)
faisant allusion à la conquête des « Indes » américaines par les dirigeants espagnols, « de grandes
guerres » (l.6) se réfèrent à la guerre de la ligue d’Augsbourg et à la guerre de succession d’Espagne,
on peut apercevoir des références faisant écho aux nombreuses dévaluations qui ont eu lieu sous le
règne de Louis XIV : « un écu en vaut deux »( l.10) ; « un morceau de papier est de l'argent » (l.13).
«
Trois ne sont qu'un » (l.18) est une référence à la Trinité chrétienne, de plus l’Eucharistie est présente
avec « le pain qu'on mange n'est pas du pain » et « le vin qu'on boit n'est pas du vin » (l.19).
Le
lecteur doit saisir avec les multiples périphrases toutes ces allusions, qui ne sont pas toujours
évidentes, pour comprendre la portée du texte.
Ainsi, l’ironie est omniprésente à travers tout le texte.
Donc, une connivence s’établit entre Montesquieu et son lecteur qui, grâce à l’ironie, rend le
texte savoureux à double titre.
D’abord le lecteur éprouve le plaisir de découvrir un texte plaisant qui
présente un regard neuf sur la société.
Ensuite le fait d’être capable de déchiffrer l’ironie et de
comprendre son sens donne une certaine fierté qui fait l’efficacité du texte.
En procédant ainsi,
Montesquieu met le lecteur de son côté et le rend réceptif à la critique
Troisièmement, dans cette lettre est développée toute une critique du pouvoir politique et
religieux et une satire du roi et du pape.
A travers, le peuple est également pris pour cible.
D’une part, le roi apparaît comme un terrible manipulateur qui joue avec ses sujets comme
avec des pantins.
Il est vaniteux comme le montre la comparaison « la vanité de ses sujets, plus
inépuisable que les mines » (l.5).
Les sujets sont à l’image du roi : les mots « vanité » et « inépuisable
» sont presque oxymoriques car la « vanité » désigne le vide.
Autrement dit, il tire sa puissance d’un
vide inépuisable.
La figure de style fait sourire le lecteur tout en critiquant violemment le monarque..
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