Commentaire du Prologue de Juste la fin du monde de Jean-Luc Lagarce
Publié le 16/03/2024
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Commentaire du Prologue de Juste la fin du monde de Jean-Luc Lagarce
Problématique : nous nous demanderons en quoi ce Prologue est à la fois conforme à la
tradi4on théâtrale dans sa présenta4on d’une situa4on et d’un personnage et profondément
déconcertant pour le lecteur/spectateur
I.
Un Prologue qui joue son rôle : informer, mettre l’intrigue de la pièce en perspective.
a) Une décision difficile
- Le verbe décider est exactement au centre du prologue « je décidai de retourner les voir ».
C’est ce dont il sera question : Louis a pris la décision d’annoncer qu’il va mourir à un « eux »
qui reste encore vague (effet d’attente chez le public).
- Une décision qui fait suite à « de nombreux mois » d’attente, de déni (« à tricher »),
d’indécision et de passivité (« j’attendais d’en avoir fini »)
- Une décision qui a demandé du courage (« comme on ose bouger… » ; « danger extrême » ;
« malgré tout, la peur, prenant ce risque… »)
b) Un personnage complexe et en crise
- Louis se présente au public d’emblée comme traversant une profonde crise personnelle :
« j’allais mourir ».
D’où sa décision (rappel du sens étymologique de « crise » : choix, décision,
jugement) : un retour (« retourner », « revenir sur mes pas »).
Un retour géographique (« faire
le voyage ») mais aussi un retour sur soi-même.
- Un personnage qui se présente seul face aux « autres », à « eux », ce qui préfigure les conflits
à venir, notamment avec Antoine.
- Un personnage qui se veut précis et rigoureux (pour se rassurer ?) : cherche le mot
« juste » (accumulation d’expressions de sens voisins, autoparaphrase ? : « revenir sur mes pas,
aller sur mes traces » ; « lentement, calmement, d’une manière posée » ; « annoncer, dire,
seulement dire » ...
qui miment une pensée qui s’affine, se précise.) C’est la recherche fébrile
d’une vérité qui transparaît dans sa manière de parler.
Ne veut plus « tricher », mot connoté
négativement.
Sa parole trahit son état d’esprit réel :
- Mais un personnage qui joue un rôle.
Un « homme posé », mais « pour les autres » (cf.
p.
36,
la mère qui lui reproche « cette façon si habile et détestable d’être paisible en toute
circonstance ») Louis veut « paraître », « donner l’illusion » d’être « son propre maître ».
Il
apparaît ainsi d’emblée comme un personnage de théâtre.
Le prologue comme passage de la
réalité à la fiction théâtrale.
Son calme et son apparente maîtrise de lui-même sont un masque
(cf.
p.
47, à propos du petit sourire de Louis : « c’était tellement faux, je faisais juste mine de.
»)
Une stratégie pour mettre la crise à distance ? Une façon de protéger son entourage ? D’éloigner
le spectre omniprésent de la mort ?
c) La mort omniprésente
- La mort de Louis est « prochaine et irrémédiable », annoncée dès la deuxième ligne et rappelée
par l’expression « cette extrémité » à la fin du prologue.
Cf.
également le futur « mourrai »
(valeur de certitude).
Idée appuyée par « j’attendais d’en avoir fini » (8e ligne) et « sans espoir
jamais de survivre » (18e ligne) : dimension tragique du Prologue (rappel tragédie antique) +
Louis a 33 ans : l’âge de la mort du Christ, mais un tragique que le personnage cherche à
atténuer, voire à passer sous silence
- Implicite d’une autre mort qui précède celle de Louis : « j’allais mourir à mon tour » : mort de
l’ancien amant ? (cf.
Gary)
- analogie (« comme on ose… ») avec la mention d’un « danger extrême » et le champ lexical
de la guerre : « ennemi », « détruirait ».
II.
Mais une entrée en matière déroutante.
Incertitudes, hésitations
a) Confusion et lacunes informationnelles.
Excès ou insuffisances d’informations.
- question d’un événement fondateur par rapport auquel se situe Juste la fin du monde, mais qui
reste flou : « Plus tard, l’année d’après » (plus tard par rapport à quoi ? L’année d’après quoi ?)
- la question du lieu : le prologue s’inscrit dans la didascalie initiale, mais où est Louis ? à la
gare ? devant la maison ? où sont les autres ? Faut-il voir une didascalie interne dans le « toi,
vous, elle, ceux-là » ? Qui....
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