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Commentaire de texte - Paul Claudel - Partage de Midi - Le Cantique de Mesa

Publié le 23/08/2012

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« Qu’est-ce qu’elle s’en vient faire avec nous ? est-ce que nous avions besoin d’elle ? Vous seul ! « (vers 335).  Mesa utilise le présent comme s’il s’indignait d’une situation actuelle avec le verbe « vient «. Ainsi, il remet alors en question l’ « utilité « de la femme sur Terre. Cette situation peut être un lien direct avec le récit d’Adam et Eve. Mesa rejette ainsi la faute sur la femme tentatrice et pècheresse : « est-ce que nous avions besoin d’elle ? «. Mesa se pose comme un homme qui ne comprend pas la situation et qui la subit. C’est encore une façon de montrer qu’il ne maîtrise pas son destin, comme s’il lui était imposé par Dieu. L’exclamation « Vous seul !« permet à Mesa d’extérioriser sa foi en Dieu en montrant qu’il n’avait besoin que de lui et non de l’amour charnel et féminin. Il comprend ainsi qu’il aurait souhaité un amour simple et divin, cependant, il s’en est détourné. Mais c’est peut être également un moyen de faire comprendre aux spectateurs que Dieu connaît les réponses de notre destin et qu’il en est le seul maître. La repentance de Mesa prend donc ici tout son sens et malgré l’Enfer dans lequel il est renfermé, il s’élève dans le pardon. 

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« faits, mais également le fait que ces-derniers s'additionnent et le culte peut alors signifier que les étoiles elles-mêmes dansent pour rendre hommage à Dieu qui créél'univers.

Mesa est donc au milieu même du culte dont il est également acteur, il rend ainsi hommage à son créateur mais redoute « l'immense clergé »• « Je vois l'immense clergé de la Nuit avec ses Evêques et ses Patriarches » (vers 221).Cette « immense clergé » se situe comme sur une voute (calotte hémisphérique) d'une cathédrale.

Dans ce lieu monastique, ouvert sur le ciel, Mesa voit le clergédéfiler devant ses yeux dignes d'un cérémonial religieux : « Me voici dans ma chapelle ardente ! » dit-il au commencement de son monologue.

Mesa se sent petitdevant l'immensité de ce clergé céleste qui l'entoure.

Le terme « immense » nous rappelle que l'homme n'est rien devant la force des lois divines mais égalementdevant ce ciel aux étoiles infinies.

C'est « le clergé de la Nuit », termes relativement austères, qui emmène Mesa vers son jugement dernier.

Mesa voit la mouvancedes étoiles, elles se changent en tribunal religieux.

La « Nuit » peut être ici employée comme étant une allégorie de la mort, en ce sens le clergé devient lugubre etemmène Mesa vers un destin funeste et certain.

Mais ce clergé est composé d' « Evêques », comme le stipule la préposition « avec » suivie de l'adjectif possessif « ses».

Ces-derniers ont un mode de vie contraire à celui de Mesa.

En effet, ils représentent un idéal religieux, comme le souligne le première épitre de Paul à Timothée,les devoirs des évêques et les devoirs des diacres : « Il faut donc que l'évêque soit irréprochable, mari d'une seule femme, sobre, modéré, réglé dans sa conduite,hospitalier, propre à l'enseignement.

».

En ce sens, Mesa est jugé par ses contraires cependant, le fait qu'évêque se pare d'une majuscule montre à quel point Mesa estadmiratif et respectueux.

De plus, « le clergé de la Nuit » est aussi constitué « de ses Patriarches ».

Là aussi, la majuscule est présente et symbolise l'importance deses individus du passé.

Les patriarches, d'un point de vue biblique, appartiennent à la lignée de personnages (historiques ou mythiques) avec laquelle Dieu a scelléune alliance, en vue d'engendrer une grande nation qui deviendra le peuple juif.

Les juifs et les chrétiens les considèrent comme les pères de notre civilisation.

En cesens, Mesa est jugé par ses pères spirituels qui sont entre autre : Ismaël, Abraham, Moïse, etc.

Mesa est donc entouré par les grandes figures chrétiennes du passé.C'est une astrologie judiciaire (jugement de Dieu annoncé par les astres), tradition très ancienne, qui se met en place ici.• « Et j'ai au-dessus de moi le Pôle et à mes côtés la tranche, et l'Equateur des animaux fourmillants de l'étendue, Cela que l'on appelle Voie lactée, pareil à une forteceinture !» (vers 322).Nous entrons ici dans une conception du monde céleste et imaginaire.

Les conjonctions de coordination « et » sont présentes pour énumérer les éléments présents dansla « Voie lactée ».

Le Pôle désigné par Mesa et possédant une majuscule pourrait être un cercle imaginé par lui pour se rassurer et ainsi se retrouver une fois encoreau milieu du monde.

L'expression « Equateur des animaux fourmillants » quant à lui, est profane puisqu'elle pourrait relevée du Zodiaque avec ces nombreuxanimaux astrologiques ou encore une voûte céleste qui serait peuplée d'animaux mythiques : comme nous pouvons le voir sur certaines cartographies du ciel duMoyen-Âge.

Le participe présent « fourmillant » est relativement péjoratif puisqu'il se rapporte à une espèce animale parasite, alors que les chimères célestesregorgent d'animaux nobles et majestueux.

Mesa a donc une vision fantastique de la nappe céleste mais aussi a contrario une image relativement faussée par la peurde mourir.

Cette mort, justement, peut-être exprimée comme étant « la tranche » qu'il voit à ses côtés.

C'est probablement l'allégorie de la faux qui « tranche » la viedes hommes.

Quant au terme de « Voie lactée », elle est comme un voile transparent qui protègerait Mesa, encore un peu, de la mort.

Celle-ci désigne la Galaxie enspirale, elle entoure donc le monde, en ce sens Mesa.

La « Voie lactée » est alors une « ceinture ».

L'adjectif « forte » donne l'impression d'un étouffement de la Voielactée, comme si elle allait exploser sous la pression.

Et cette hypothèse pourrait être appuyée par l'intonation même de la phrase : l'exclamation, puisqu'elle impliqueune augmentation de la hauteur de la voix.

Mesa est en train de quitter le monde instable, un monde prêt à exploser (comme la maison dans laquelle il se trouve).Après nous avoir détaillé sa vision, Mesa va parler aux éléments qui l'entourent.

Ainsi, il s'élèvera au plus haut des cieux, vers le céleste mystique.

Il se confronte à lacréation et au Ciel qui renferment un au-delà qui s'ouvrira violemment devant lui. • « Salut, mes sœurs ! aucune de vous, brillantes ! Ne supporte l'esprit, mais seule au centre de tout, la Terre A germé son homme, et vous, comme un million deblanches brebis, » (vers 324 – 325 - 326).Ici, Mesa « salut » ses sœurs, qui sont directement liées aux étoiles.

La Salutation est une façon d'adresser des marques de reconnaissance, de respect envers unepersonne.

C'est le sens qu'il faut donner au « Je vous salue Marie », prononcé par l'ange Gabriel lors de l'Annonciation.

Mais peut-être que Mesa considère les étoilescomme étant des sœurs religieuses, personnage contraire à Ysé, pour lesquelles il a du respect.

Nous avons l'impression qu'il commence une prière et qu'il voue unculte envers « ses sœurs » étoilées.

Cela peut également signifier qu'il s'identifie aux étoiles en créant un lien de filiation avec elles.

Il se considère ainsi comme leurfrère et cela implique qu'il s'élève à leur rang.

Il détache les étoiles de leur adjectif principal « brillantes » pour ajouter une expression négative « aucune de vous ».Cela peut susciter une confusion.

En effet, le fait que « Salut, mes sœurs » soient détaché de son adjectif « brillantes », peut nous surprendre et en cela nous pouvonsconfondre le sens du vers.

Nous avons l'impression que les étoiles ne sont pas brillantes : « aucune de vous, brillantes », de par la négation précédent l'adjectif.

Ce quiest relativement paradoxal et irréel.

Peut-être est-ce un effet de la part de l'auteur, qui va volontairement scinder son vers, pour nous rappeler que l'on est dans unetranse spirituelle et que les visions de Mesa sont irréelles.

Les sœurs de Mesa ont donc une portée ambivalente et elles illuminent le ciel et la terre, mais également lasuite négative du vers qui commence par « Ne supporte l'esprit ».

Cette expression montre bien la différence qui est faite entre le monde sensible et le mondeintelligible.

En effet, les étoiles ne tolèrent pas la parole d'Animus, c'est-à-dire la parole de l'Esprit.

Elles préfèrent donc que ce soit l'âme qui s'exprime, c'est-à-direl'Anima.

Par la suite, nous remarquons que la Terre est centrée et elle est la seule à occuper cette place de milieu absolu « mais seule au centre de tout ».

Ce n'est pasanodin que Claudel ai détaché le terme Terre des deux vers qui l'encadrent.

Le substantif se retrouve donc lui-même au centre des mots du Cantique et permet à Mesad'insister sur ce mot.

Mesa propose ensuite une vision de la vie profane par rapport à la religion chrétienne.

En effet, Mesa utilise le verbe « germer » dansl'expression « la Terre A germé son homme ».

Nous retrouvons alors l'idée antique selon laquelle le Ciel entretiendrait une relation amoureuse avec la Terre quiengendrerait l'homme.

La Terre symbolise alors Gaïa, mère de tous les hommes.

La Terre aurait donc un rôle matriciel, mais détrônerait également la penséechrétienne du Dieu créateur des hommes.

Nous pouvons alors avoir une autre lecture du Cantique de Mesa, celle d'un retour à un statut embryonnaire.

En effet, laTerre étant comparée à une mère, Mesa, allongé, retourne peut-être au stade d'embryon dans le ventre de sa mère.

Ce qui pourrait alors faire écho à son expression duvers 320 « au plus profond de l'univers ».

Mais, cela peut également faire écho à la prière « Je vous salue Marie » :« Je vous salue, Marie pleine de grâces ; le Seigneur est avec vous.

Vous êtes bénie entre toutes les femmes et Jésus le fruit de vos entrailles est béni »En ce sens, la Terre est considérée comme étant Marie et « le fruit de ses entrailles » peut faire référence à Mesa.

La Terre est donc une allégorie de la sainte mère quiprotègerait son fils Mesa, fruit pécheur.

Par la suite, Mesa compare les étoiles à de « blanches brebis », ce qui rappelle l'adjectif des étoiles « brillantes ».

Il éclairealors la pureté des astres afin d'en extraire une spiritualité divine.

Mais le « et vous » peut aussi être compris comme une prise à partie du public qui regarde la piècede théâtre.

Alors, c'est ici que le theatrum mundi apparaît, puisque ce sont les hommes qui font l'action.

Ces-derniers sont alors comparés à de « blanches brebis »,comme les fidèles de Dieu.

Mesa lui, est comme une brebis égarée (personne sortie du droit chemin, en particulier sur le plan religieux) seul sur cette scène dedésarroi intérieur.

Il admire ses « blanches brebis » qui le considèrent comme une brebis galeuse.• « Vous tournez la tête vers elle qui est comme le Pasteur et comme le Messie des mondes ! » (vers 327).Le pronom personnel « vous » est ambigu et ambivalent.

En effet, il peut s'adresser aux étoiles mais aussi aux spectateurs ou encore à Dieu lui-même.

Il y a ici ungéocentrisme lié aux termes « Pasteur », « Messie », comme si la Terre s'élevait au rang de la religion.

De plus, la comparaison « comme … et comme » amplifie lagrandeur de la planète.

Même si l'homme est décentré, la Terre, elle est recentrée puisqu'elle attire tous les regards sur elle.

Du coup, l'attirance des regards entraîneun désir de possession et peut nous rappeler la tentation de la pomme d'Eve : la Terre étant elle aussi ronde et séduisante.

Mesa va par la suite profaner la religionchrétienne puisqu'il dit que la Terre est le « Messie des mondes », comme s'il existait plusieurs mondes qui n'auraient pas été créés par Dieu.

Cela peut être comprispar la présence de l'article indéfini « des » et par l'absence de majuscule au terme « mondes ».

De plus, cette expression, « Messie des mondes », mêle à la fois lafemme, puisque c'est la Terre qui est le comparant, et le fils, « le Messie », (mélange le féminin et le masculin).

En ce sens, il y aurait une sorte d'androgynéité de lapensée de Mesa.

De plus, cette comparaison est relativement paradoxale, car le Messie est considéré comme le sauveur de tous les hommes.

Cependant, Mesa, lui,meurt seul sur cette Terre sainte sous le regard des étoiles.• « Salut, étoiles ! Me voici seul ! Aucun prêtre entouré de la pieuse communauté / Ne viendra m'apporter le Viatique » (vers 328 - 329).Mesa renouvelle la Salutation aux étoiles (nous retrouvons encore une fois un acte de prière et de respect), qu'il caractérisait, précédemment, de « sœurs ».

Mesa estcomme obsédé par les étoiles et comme derrière Mesa se cache Claudel, nous pouvons comprendre cette passion dévorante.

En effet, dans Le Poëte et la Bible (,. »

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