COMMENTAIRE COMPOSE INCIPIT DE THERESE DESQUEYROUX

« ressent (« elle sentit sur sa face » l.2, « elle avait peur » l.3) et également sa perception et son audition (« Elle reconnut », « elle entendait confusément »).

L’histoire nous est rapportée selon la jeune femme. Ainsi, le lecteur à l’impression qu’elle ne se sent pas concernée par ce que disent les deux hommes, elle est détachée de la conversation.

La brume, énoncée à la seconde ligne, peut d’ailleurs être un moyen de montrer que Thérèse reste dans le doute devant l’inconnu.

Cependant, la jeune femme se soucie de savoir si elle est observée : la place déserte la rassure.

Ceci est d’ailleurs confirmé ligne 7 par le discours indirect libre « Oui, la petite place était déserte ».

Mais le discours direct occupe également une place importante.

En plus d’apporter des informations sur le thème du roman, il nous en apporte sur Thérèse et son entourage.

La phrase « Après la déposition de mon gendre, c’était couru » l.14 nous montre bien que Thérèse est protégée par son mari.

Quant à « Du moment que, de son propre aveu, il ne comptait jamais les gouttes… » à la seizième ligne, on apprend que la mari de Thérèse est à la fois victime et défenseur, un paradoxe renforçant le côté flou de la scène.

De plus, lors du mot « victime » Thérèse intervient enfin dans le dialogue entre les deux hommes, comme offensée « Il n’y a pas eu de victime », mais ce sera la seule réplique au discours direct que la jeune femme exprimera.

Le dialogue ne fait donc pas intervenir Thérèse qui se trouve à l’écart.

Thérèse Desqueyroux est finalement une héroïne classique.

Son portait physique, aux deux dernières lignes de l’extrait, nous présente une « jeune femme immobile, serrée dans son manteau », avec un « blême visage qui n’exprimait rien ».

Ainsi, on comprend que Thérèse est l’archétype de la jeune femme passive, triste et maladive représentée dans de nombreux romans.

Elle est inhibée et fermée aux autres. Mais ce n’est pas tout, puisque Thérèse est particulièrement méprisée.

Les deux hommes l’observent, « un instant » seulement, ils ne lui accordent que très peu d’attention.

Elle ne parait pas vivante, « qui n’exprimait rien ».

On lui donne l’image d’une femme qui n’éprouve rien.

Quant à son père, il ne lui adresse aucune affection, comme il est dit à la huitième ligne « Son père ne l’embrassa pas (…) pas même un regard ». Ainsi, le narrateur met sur le même plan l’avocat et le père de Thérèse (« Les deux hommes ») et laissent Thérèse de côté, malgré son statut de personnage principal.

L’incipit de Thérèse Desqueyroux est donc un début très différent des débuts classiques de roman, très déceptif.

Il permet cependant efficacement de présenter ce dont il sera question dans la suite du roman, ainsi que son héroïne, femme coupable et effacée, ayant commis un crime, mais tout reste tout de même flou aux yeux du lecteur qui se pose de nombreuses questions.

Mais il reste vrai que l’on peut se demander ce qu’il en était des véritables intentions de Mauriac, en ce qui concerne Thérèse.

La jeune femme, la plus impliquée dans ce crime, ne se sentirait elle pas réellement concernée, où s’agirait -il au contraire des hommes qui la mettraient de côté. »