Devoir de Philosophie

COLLÈGES AU XVIe SIÈCLE (les)

Publié le 22/11/2018

Extrait du document

COLLÈGES AU XVIe SIÈCLE (les). Si l’on ne connaissait pas l’importance des collèges au xvie siècle en France, on la découvrirait immédiatement à la simple vue d’un plan du Paris de l’époque — celui de 1550, par exemple —, où ils sont indiqués au même titre que palais et églises. Leur développement très rapide au cours de ce siècle est en effet le phénomène le plus marquant de la vie scolaire du temps, et leur institution devait fonder le système d’éducation en France.

 

Origine des collèges

 

A la fin du Moyen Age, les collèges sont, à l’instar des couvents, de simples pensionnats qui accueillent des étudiants boursiers issus des « nations » étrangères à la ville (picarde, allemande, normande, etc.). Leurs hôtes vont suivre les cours de la faculté des arts. Mais celle-ci devient alors l’objet des critiques de plus en plus vives

 

et justifiées — des humanistes, en même temps que le recrutement des collèges apparaît de moins en moins conforme aux règlements (des bourgeois aisés y prennent la place de boursiers pauvres). Peu à peu, les collèges vont assurer partie ou totalité de l’enseignement de la faculté pour remédier à sa décadence morale et culturelle.

 

Ce fut le cas des frères de la Vie commune, congrégation fondée aux Pays-Bas par Gérard Groote : en s’installant à Paris, au collège de Montaigu, Standonck ébauche, à partir de 1499, des statuts nouveaux qui organisent un enseignement par classes (à huit niveaux) et instituent une discipline très sévère fondée sur la dureté extrême des conditions matérielles, sur la délation et le châtiment. Quoique Standonck, à Montaigu, et Raulin, au collège de Navarre, se soient montrés foncièrement hostiles aux visées mondaines et laïques des humanistes, leur organisation a pu servir de modèle aux futurs collèges. Malgré les violentes critiques d’Érasme, qui en fut l’élève, on a coutume de faire remonter la naissance des collèges modernes à ce « collège de pouillerie » raillé par Rabelais.

 

Mais d’autres faits ont été déterminants, en particulier la montée d’une riche bourgeoisie marchande — à laquelle il faudrait joindre déjà les riches « laboureurs » — qui ne veut plus faire de ses fils des clercs, mais des hommes instruits, capables de la relayer dans le « gouvernement » des villes. Par les collèges, elle espère échapper à la mainmise de l’Église (chapitres et évêchés) sur les petites écoles et l’Université. Ainsi verra-t-on s’installer très tôt (à partir de la fin du xve siècle, mais surtout au début du xvie) des collèges dans les grandes villes marchandes dépourvues d’université : Rouen, Lyon, Bordeaux, Marseille, Bayonne, etc. Cette bourgeoisie est, dès le xve siècle, favorable à l’humanisme et considère l’enseignement du latin cicéronien et du grec comme un facteur obligatoire de progrès [voir Gréco-latine (littérature)].

 

Les collèges parisiens

 

Outre ceux, déjà nommés, de Navarre et de Montaigu, ils sont nombreux et d'importance variable; on les voit se modifier dans la première moitié du siècle et passer progressivement sous le contrôle des humanistes : les collèges de Beauvais, du Cardinal-Lemoine, de Presles, de Boncourt, de Coqueret, de Lisieux, de l’Ave Maria, des Cholets, de Sainte-Barbe, etc., ont pour élèves — et souvent ensuite pour régents et principal — à peu près tout ce qui a compté dans la pensée et la création au xvic siècle. Parmi les grands maîtres : Govéan, Ramus, Tar-tas, Galland, Baduel... Leur mobilité est extrême, et ils passent d’un collège à un autre, de Paris à la province, en restant toujours fort respectés.

 

Malgré une grande variété dans leur organisation et leurs enseignements, les collèges ont en commun de mener à la maîtrise ès arts, sous la direction de régents spécialisés par disciplines et gouvernés par un principal qui assure lui-même une part de l’enseignement. Les élèves peuvent y entrer pour une à dix années selon leur niveau initial (les classes sont déterminées par la compétence et non par l’âge de l’étudiant, qui peut être inscrit aussi bien vers dix ans qu’à dix-sept ans ou plus); ils sont aussi bien internes — boursiers ou payants — qu’externes, les « martinets ». Les disciplines enseignées sont celles des anciens trivium et quadrivium, mais l'accent est mis sur les langues anciennes, latin et grec surtout, et sur des sciences en plein développement, comme les mathématiques et la botanique. Pour bien comprendre le renouvellement imposé par ces collèges à l'éducation, il faut savoir que les régents ont complètement modifié les anciens manuels et fait progressivement disparaître le Donat et le Doctrinal au profit d’ouvrages plus vivants, comme les Colloques d'Erasme ou de Cordier, et des éditions humanistes des grands auteurs grecs et latins (Plutarque et Cicéron, particulièrement). Car l’élément le plus caractéristique des collèges parisiens est le souci pédagogique d’adaptation à la « nature » de l’élève, que l’on veut instruire sans contraintes excessives.

 

C’est tout cet effort sur la pédagogie, sur l’apprentissage des langues anciennes et des disciplines nouvelles qui a fait la réputation européenne de la « manière parisienne » (le modus parisiensis), imitée dans toute la France, mais aussi à Genève et dans toute l’Europe. Ainsi, Paris fournit-il en régents la majorité des collèges en plein développement.

 

Les collèges provinciaux

 

Jusqu’aux années 1560-1570, environ deux cents villes françaises se dotent de collèges publics et laïques, à la charge des municipalités et ouverts gratuitement à tous les enfants en âge de recevoir un enseignement : à cinq ou sept ans si le collège comporte des classes abécédaires. Ils couvrent généralement l’enseignement secondaire. Les régents et le principal sont la plupart du temps recrutés sur concours public et selon leurs titres, le maître ès arts venu de Paris étant le plus estimé. Quoique bien payés et faisant dès lors partie des notables de la ville, ils ont des charges considérables : toute l’organisation matérielle leur incombe — ils réclament sans cesse des crédits supplémentaires —, et ils doivent prouver qu’ils ne contreviennent pas aux desseins des échevins. Les dissensions religieuses, de plus en plus violentes, vont progressivement désorganiser cet édifice remarquable : les régents, très mobiles et indépendants, sont très favorables aux idées nouvelles, mais les municipalités aussi, avec le temps, penchent d’un côté ou de l’autre au cours des guerres de Religion. Peu à peu ces collèges, qui avaient souvent groupé plusieurs centaines d’élèves dans des classes hiérarchisées, perdent leur crédit; les municipalités, appauvries par les conflits, paient de plus en plus mal des régents qu’elles ont des difficultés à recruter, ou dont elles se montrent mécontentes. L’esprit enthousiaste de la première moitié du siècle disparaît partout.

« Lyon, Bordeaux, Marseille, Bayonne, etc.

Cette bour­ geoisie est, dès le xv• siècle, favorable à l'humanisme et considère l'enseignement du latin cicéronien et du grec comme un facteur obligatoire de progrès [voir GRÉCO­ LATINE (littérature)].

Les collèges parisiens Outre ceux, déjà nommés, de Navarre et de Montaigu, ils sont nombreux et d'importance variable; on les voit se modifier dans la première moitié du siècle et passer progressivement sous le contrôle des humanistes : les collèges de Beauvais, du Cardinai-Lemoine, de Presles, de Boncourt, de Coqueret, de Lisieux, de l'Ave Maria, des Chalets, de Sainte-Barbe, etc., ont pour élèves -et souvent ensuite pour régents et principal - à peu près tout ce qui a compté dans la pensée et la création au xvi• siècle.

Parmi les grands maîtres : Govéan, Ramus, Tar­ tas, Galland, Baduel ...

Leur mobilité est extrême, et ils passent d'un collège à un autre, de Paris à la province, en restant toujours fort respectés.

Malgré une grande variété dans leur organisation et leurs enseignements, les collèges ont en commun de mener à la maürise ès arts, sous la direction de régents spécialisés par disciplines et gouvernés par un principal qui assure lui--même une part de 1 'enseignement.

Les élèves peuvent y entrer pour une à dix années selon leur niveau initial (les classes sont déterminées par la compétence et non par 1' âge de l'étudiant, qui peut être inscrit aussi bien vers dix ans qu'à dix-sept ans ou plus); ils sont aussi bien internes -boursiers ou payants - qu'externes, les« martinets ».

Les disciplines enseignées sont celles des anciens trivium et quadrivium, mais l'ac­ cent est mis sur les langues anciennes, latin et grec sur­ tout, et sur des sciences en plein développement, comme les mathématiques et la botanique.

Pour bien comprendre le renouvellement imposé par ces collèges à 1 'éducation, il faut savoir que les régents ont complètement modifié les anciens manuels et fait progressivement disparaître le Donat et le Dc•ctrinal au grofit d'ouvrages plus vivants, comme les Cl•lloques d'Erasme ou de Cordier, et des éditions humanistes des grands auteurs grecs et latins (Plutarque et Cicéron, particulièrement).

Car l'élément le plus caractéristique des collèges parisiens est le souci pédagogique d'adaptation à la« narure »de l'élève, que 1' on veut instruire sans contraintes excessives.

C'est tout cet effort sur la pédagogie, sur l'apprentis­ sage des langt1es anciennes et des disciplines nouvelles qui a fait la réputarion européenne de la « manière pari­ sienne » (le modus parisiensis), imitée dans toute la France, mais aussi à Genève et dans toute l'Europe.

Ainsi, Paris fournit-il en régents la majorité des collèges en plein développement.

Les collèges provinciaux Jusqu'aux années 1560-1570, environ deux cents vil­ les françaises se dotent de collèges publics et laïques, à la charge des municipalités et ouverts gratuitement à tous les enfants en âge de recevoir un enseignement : à cinq ou sept ans si le collège comporte des classes abécédai­ res.

Ils couvrent généralement l'enseignement secon­ daire.

Les régents et le principal sont la plupart du temps recrutés sur cc•ncours public et selon leurs titres, Je maî­ tre ès arts venu de Paris étant le plus estimé.

Quoique bien payés et faisant dès lors partie des notables de la ville, ils ont des charges considérables : toute J'organisa­ tion matérielle leur incombe -ils réclament sans cesse des crédits supplémentaires -, et ils doivent prouver qu'ils ne contreviennent pas aux desseins des échevins.

Les dissensions religieuses, de plus en plus violentes, vont progressivement désorganiser cet édifice remarqua- ble : les régents, très mobiles et indépendants, sont très favorables aux idées nouvelles, mais les municipalités aussi, avec le temps, penchent d'un côté ou de l'autre au cours des guerres de Religion.

Peu à peu ces collèges, qui avaient souvent groupé plusieurs centaines d'élèves dans des classes hiérarchisées, perdent leur crédit; les municipalités, appauvries par les conflits, paient de plus en plus mal des régents qu'elles ont des difficultés à recruter, ou dont elles se montrent mécontentes.

L'esprit enthousiaste de la première moitié du siècle disparaît partout.

C'est à la place de certains de ces collèges que s'ins­ tallent des collèges de jésuites, d'oratoriens ou de doctri­ naires : ils n'ont jamais à les créer en province, mais à les reprendre, surtout au début du xvu• siècle, avec l'aide de 1' Eglise gallicane et du pouvoir royal.

Fondés en 1540 par Ignace de Loyola -qui avait lui-même suivi pen­ dant sept ans l'enseignement des collèges parisiens -, les jésuites sont autorisés à enseigner à partir du colloque de Poissy (1561 ).

Interdits momentanément en 1595, après avoir établi une vingtaine de collèges, ils se déve­ loppent définitivement sous Louis Xlll.

Leur Ratio stu­ diorum, élaborée entre 1591 et 1599, modifie considéra­ blement l'idéal humaniste des collèges parisiens, le rééquilibrant au profit de l'éloquence et des « humani­ tés», aux dépens des savoirs spécialisés [voir JÉSUITE].

Parallèlement, dans les villes où l'édit de Nantes (1598) autorisait la pratique réformée, se développe un ensei­ gnement confessionnel protestant.

Mais, dès la fin du xvi• siècle, la bourgeoisie riche recommençait à envoyer ses enfants dans des établisse­ ments réputés, éloignés souvent de leur ville; et les familles aristocratiques préféraient à ces établissements les nouvelles. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles