CIORAN (Émile Michel)
Publié le 20/02/2019
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CIORAN (Émile Michel), écrivain français d'origine roumaine (Rasinari, Roumanie, 1911). Fils d'un prêtre orthodoxe, il fait des études de philosophie qu'il couronne par une thèse sur Bergson (1936). Aux antipodes de l'action, de l'événement, du moi, il célèbre l'otium et la vacance, prétendant que « la création fut le premier acte de sabordage ». Ses romans et ses essais imposent l'air glacé de la chute, l'aboulie apocalyptique du cynisme, la fête du non-être, les fastes d'un nihilisme esthète [Précis de décomposition, 1949 ; Syllogismes de l'amertume, 1952 ; la Tentation d'exister, 1956). Proche du taoïsme, il voit dans l'histoire une cacophonie médiocrement scandée par les « tautologies » des systèmes philosophiques et les « mille humiliations de l'idée » [Histoire et utopie, 1960) : les révoltés, les assassins et les croyants lui semblent une seule et même « tourbe » ; l'utopie et l'histoire
«
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Ém ile Michel (né en 1911).
Moraliste et
essayiste français, d'origine roumaine, né à Ras inari
(Roumanie).
Il fait ses études de philosophie à Bucarest,
où il soutient une thèse sur Bergson.
L'Institut français
lui confie une mission en France en 1937, mais c'est à
partir de 1947 qu'il s'installe définitivement à Paris.
Tandis qu'il traduit Mallarmé, il décide d'écrire en fran
çais, tant pour se libérer de son passé que pour s'imposer
la discipline de cette langue rigoureuse, pourtant « aux
antipodes de [sal nature».
Ainsi Le Précis de décomposi
tion (1949) reçut-il quatre versions avant d'être consi
déré comme «du français » par ce juriste admirateur des
prosateurs du XVtll• siècle, ce temps où l'on parlait une
langue « parfaite et morte ».
Son essai inspiré de Kierke
gaard Sur Les cimes du désespoir (1933) est écrit en
roumain; ses autres ouvrages sont rédigés en français.
Cioran est avant tout l'auteur d'une dizaine de
recueils d'aphorismes dont le premier, Précis de décom
position, est le plus connu, mais parmi lesquels il fau
drait au moins citer Syllogismes de l'amertume (1952);
Histoire er utopie (1960); De l'inconvénienr d'être né
( 1973), etc.
Mais il a aussi écrit, en 1957, une importante
préface à des morceaux choisis de Joseph de Maistre
(republiée en 1977 sous le titre d'Essai sur la pensée
réactionnaire).
L'œuvre de Cioran se présente comme une méditation
ininterrompue sur le vide et le néant.
Une langue sobre
et classique donne à cette œuvre la couleur subtile d'une
déception froide.
Ce moraliste est trop nourri de pensée
bouddhique, des préso cratiques, des mystiques ou de
Kierkegaard pour donner dans le désespoir spectaculaire
ou le pessimisme tapageur.
La lucidité passionnée et
l'humour discret mettent l'œuvre à l'abri de la pesanteur
des démonstrations.
La lecture prolongée de ces recueils
donne, à travers le ressassement des thèmes, l'im
pression d'un mouvement immobile: «Il n'y a pas un
autre monde.
Il n'y a même pas ce monde-ci.
» C'est un
Mauvais Démiurge ( 1969) qui préside aux destinées de
l'Histoire, une puissance maléfique qui veut que tout
échoue (Ecartèlement, 1979).
Mais c'est peut-être un bonheur intensément vécu qui
gît au cœur de ce nihilisme.
Dégagé des illusions du réel
de l'Histoire ou de la divinité, J'esprit accèd e à une
indifférence supérieure, source d'une nouvelle « tenta
tion d'exister».
Avec le temps, le désir du suicide
s'émousse, et l'accoutumance au désespoir se crée.
Dans
Eùz Gespriich ( 1985), un dialogue avec Gerd Bergfleth
q u'i l a voulu en langue allemande, Cioran rend hommage
à Montaigne et à son scepticisme raisonnable, fondateur
de la culture française.
Le doute est une « planche de
salut » contre le scepticisme absolu et le désespoir, puis
qu'il peut les remettre en question (Aveux et anathèmes,
1987).
Et si cette extase du doute venait elle-même à
faillir, il resterait l'écriture, «le seul traitement quand
on ne prend pas de médicaments », la réflexion sur l'œu
vre de quelques grands maîtres (Exercices d'admiration,
1986) et le rire, « signe qu'on est encore maître de tout ».
BlBLIOGRAPHlE De nombreux titres de Cioran ont été publiés chez Gallimard,
dans la coll.
Idées, ou encore par l'Herne: Des larmes et des
saints, texte écrit en 1937 remanié en 1986 ( 1987).
Sur les cimes
du désespoir, te xt e écrit en roumain en 1933 et traduit en français
en 1990.
A consulter.
-H.
Amer, «Cioran, maître ès décadence s"·
N.R.F., 1961; la Nouvelle Revue française, septembre 1983:
l'Élan vers le pire, photographies de Cior an par Irmeli Jung,
Gallimard, 1988; Marianne Sora, Cioran jadis er naguère, suivi
de Entretien à Tübingen, L'Herne, 1989.
La revue roumaine le
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Vingtième Siècle, éditée par l'Union des écrivains de Roumanie,
a publié un numéro sur Cioran en 1991.
M.-P.
SCHMITT.
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