CINNA DE CORNEILLE: LA SOUMISSION AUX CENSEURS DU CID
Publié le 07/04/2011
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1640 est pour Corneille l'année triomphale. Il a 34 ans; il est en pleine gloire depuis le triomphe du Cid (1636). Il est déjà l'auteur de 6 comédies et de 4 tragédies. Son nouveau chef-d'œuvre., il le médite au terme d'un silence de trois années, tandis qu'est jouée avec succès sa dernière œuvre, Horace, achevée dès la fin de 1639.
«
• Il a transgressé les règles en présentant un drame
en tableaux et en s'accordant de multiples libertés.
• Il a violé la vraisemblance.
• Il a manqué de tout souci moral.
C'est ainsi qu'il est « scandaleux » « que ce soit l'amour qui finisse par triompher».
Chimène « ne devait point se relâcher dans la vengeance de la mort de son père...
En ceci il faut avouer que sesmœurs sont scandaleuses, si elles ne sont dépravées...
Au moins ne peut-on nier qu'elle ne soit, contre labienséance de son sexe, amante trop sensible et fille trop dénaturée.
»
Corneille dans Cinna va tenter de désarmer les critiques en s'attachant à éviter tous ces reproches :
• par le choix du sujet : écartant les sujets modernes, il puisera celui-ci dans l'histoire pour mieux en assurer lavraisemblance ;
• par la façon dont il le traitera : renonçant à ses velléités d'indépendance, il respectera les règles (voir enappendice : Corneille, juge de Cinna) ; il veillera d'autre part à purger les passions et à élever l'âme.
Emilie sera uneChimène qui n'aura pas le front de se relâcher par amour dans la vengeance de la mort de son père.
Si le poète s'est arrêté pour méditer son destin, se replier sur lui-même, un temps ruminer avec amertume ses griefsmi-imaginaires, mi-réels, il s'est ressaisi; il cherche maintenant des raisons de croire encore en son génie; il sediscipline davantage, il travaille avec opiniâtreté, réfléchissant longuement sur les conditions de son art, s'efforçantde conquérir son originalité en se constituant une technique.
Et ces années 38-40 sont les plus fécondes de sa vie :à la fois il compose ses deux tragédies romaines et il ébauche sa.
tragédie chrétienne.
C'est la plus magnifiqueréponse à ses censeurs.
« Au Cid persécuté Cinna doit sa naissance » dira justement Boileau (Épître à Racine, 1675) — avec cette réserve àfaire que la « persécution » à proprement parler n'est sans doute qu'une légende.
Voilà donc les conseils du silence, à quoi il faut ajouter peut-être l'idée de se faire de l'art une patrie idéale, ou sejouer des choses et des êtres, ou se délivrer de ses démons intérieurs, ou dominer, se venger, ou représenter latragédie de sa propre gloire ; car qui sait si la peinture des ambitions de Cinna ne rejoint pas les vagues songes d'unhomme de lettres qui eût souhaité jouer le plus grand rôle?
Il est donc vrai de dire que cette crise morale a précipité la maturité de son génie, qui va se traduire dans Cinna.Cinna est né d'une méditation sur la valeur de la discipline..
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