CHESSEX (Jacques)
Publié le 20/02/2019
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CHESSEX (Jacques), écrivain suisse de langue française (Payeme 1934). Après des poèmes {le Jour proche, 1954 ; Batailles dans l'air, 1959) et des récits {la Tête ouverte, 1962 ; Reste avec nous, 1967) qui préparent un premier roman d'inspiration très gidienne {la Confession du pasteur Burg, 1967), il publie un Portrait des Vaudois (1969), mais son originalité se déploie avec Carabas (1971), puis l'Ogre (1973), qui lui vaut le prix Goncourt. Ces deux romans inaugurent une suite de récits {ïArdent Royaume, 1975 ; les Yeux jaunes, 1979) qui évoquent dans un style truculent les drames de la passion aux prises avec les contraintes familiales et la réprobation sociale, thèmes qui animent aussi ses esquisses de personnages à la banalité agressive {le Séjour des morts, 1977 ; Où vont mourir les oiseaux, 1980) et qu'éclairent son recueil lyrique le Calviniste ( 1983) et les Feux d'orée ( 1984). Élu (1979) membre étranger de l'Académie Goncourt, Chessex a également consacré des essais aux écrivains de la Suisse française {les Saintes Écritures, 1972) et aux maîtres français du réalisme {Mau-passant et les autres, 1981).
«
Powered by TCPDF (www.tcpdf.org)CHESSEX Jacques
(né en 1934).
Premier romancier
suisse à avoir reçu le prix Goncourt (l'Ogre, 1973), Jac
ques Chessex, né à Lausanne, découvre l'écriture «sur
les genoux de son père», professeur que la calomnie
conduira au suicide.
Au cours de ses études, il rédige un
mémoire sur Francis Ponge, puis participe au mo�ve
ment littéraire né autour des revues Rencontre et Ecri
ture, débute en littérature par des poèmes où se dit la
précarité de la vie sous le « masque >> du printemps :
Chant de printemps ( 1955), Une voix dans la nuit ( 1959).
Un premier roman, la Tête ouverte ( 1962), plaît à
Paulhan, qui lui confie une rubrique à la Nouvelle Revue
française et exerce sur le jeune écrivain une fascination
quasi castratrice, que Chessex intériorise sous la forme
d'une pointilleuse conscience littéraire: «Qu'est-ce que
Paulhan aurait pensé? » continuera-t-il à se demander
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longtemps après la mort de son protecteur.
Il renouera
avec cette expérience en publiant un essai sur Flaubert,
Flaubert ou le désert en abîme (1992).
Chessex ne ces
sera de conjurer et de conjuguer les deux figures obsé
dantes du père déchu et du censeur exigeant.
D'où une
thématique reconduisant de livre en livre «le très long
drame du père et du fils » : la Confession du pasteur
Burg (1967); l'Ardent Royaume ( 1975), histoires d'« une
joie immense et d'une déchéance banale» (cf.
ses Entre
tiens avec Jérôme Garein, 1979); l'Ogre, métaphore du
père, « l'homme de vigueur, le propriétaire, la loi! »
Mais cette œuvre ne se limite pas aux exercices litté
raires issus d'une névrose obsessionnelle (cf.
encore le
Bréviaire, 1976).
A cent lieues des « marquis de Tel
Quel», son lyrisme l'entraîne au-delà de cette thémati
que étroite : le monde interdit par une censure sociale
venue d'une longue tradition calviniste lui est rendu au
centuple dans un imaginaire d'une exceptionnelle
richesse.
Témoin le titre symbolique de Carabas (1971 ),
roman autobiographique, histoire d'un personnage pas
sablement démuni au départ, mais que la fantaisie de sa
plume introduit dans le riche royaume de la chair et du
sexe.
Les romans de Chessex font scandale -après
Carabas, notamment, l'écrivain reçoit un courrier d'une
furieuse violence -, mais ils passent avec succès les
barrières de la censure littéraire : 1 i béré par l'écriture,
l'auteur dit avec une ivresse grandissante, même si la
déchéance doit s'ensuivre, la Beauté « égarante >> de la
nature, son amour des femmes, sa soif de plaisir (Jonas
1987; Morgane madrigal, 1990; la Trinité, 1993).
Adjec
tifs voluptueux, images sensuelles, travelling le long du
corps féminin transmuent sensations et conduite honnies
des «pères punisseurs >>(l'Ogre) en représentations éro
tiques auxquelles s'ajoute la jouissance attachée à l'acte
même d'écrire.
Mais Chessex reste fidèle à son pays de Vaud, qui lui
décerne en 1992 le prix de sa Fondation pour la promo
tion et la création artistique (cf.
Portrait des Vaudois,
1969, et les Saintes Écritures, 1985, recueil d'essais sur
la littérature romande).
Plus encore que la mort, le pour
rissement reste un des thèmes sous-jacents de son sen
sualisme.
«J'ai toujours rôdé dans les cimetières»,
confie-t-il dans ses Entretiens, et les héros de 1 'Ogre
s'enlacent à même les pierres tombales.
Dans les paysa
ges qui lui sont les plus chers lui apparaissent en surim
pression les « massacres » qui les défigureront; des fem
mes qu'ils étreignent, ses héros palpent Je squelette sous
les chairs appétissantes.
Somme toute.
sublimant les
contraintes qui se sont exercées sur sa riche personnalité,
Chessex rejoint par l'écriture les obsessions de son épo
que, commandées par les mythes conjoints de Dionysos
et du Minotaure.
[Voir aussi SUISSE.
Littérature d'ex
pression française)..
»
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