Charles Perrault publie les « Contes de ma mère l'Oye »
Publié le 22/08/2013
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Auteur de pastiches burlesques, de poésies précieuses, de poèmes épiques et religieux, Charles Perrault a surtout été, vingt ans durant, un haut commis de l'État au service du ministre Colbert et de Louis XIV. Rien ne semblait prédestiner ce fonctionnaire, certes influent, ce membre de la Petite Académie et de l'Académie française à écrire des contes pour enfants.
«
DES CONTES A CLEF
Tout en gardant la saveur
du style populaire , Charles
Perrault s'attache à élaborer
à partir
des récits folkloriques
un véritable genre Jittéraiœ, en donnant parfois -à ces histoires
de nourrice des élégances
qui s'éloignent
de la diction
populaire .
Il s'autorise de
temps à autre un clin d'œil à
un public de citadins adultes et
cultivés et des moralités en
vers d'un raffinement poussé.
Il met son art savant au service
de l'art populaire des contes,
auxquels
il donne des significations multiples.
Les
« bottes de sept lieues » font
allusion
.à la.
p95te réorganisée par Louveis, le ministre-qui a
évincé le
poète des hautes sphères de l'administration .
En
lui permettant de s'en emparer,
Perrault fait de son héros, qui
supplante son ennemi,
le
« courrier du monarque » :
il est ainsi vengé . ..
littérairement du moins.
successeur de Colbert, c'est
pourtant vers
un,..g enre a priori
mineur que se tourne Charles
Perrault.
Hisgracié, il publie-en
1697les Contes de ma mè re l'Oy e.
Il
a
déjà soixante-neuf ans, et
mourra quelque six ans plus
tard .
Il attache peu
d'importan
ce à ce livre , qu'il mentionne à
peine dans ses Mé
moir es, mais
qui lui vaudra cependant de
passer à la postérité .
Au moment de la parution, l'ac
cueil réservé à ce modeste
ouvrage est véritablement déli
rant.
Il ne s'agit pourtant que
d'un petit recueil de deux cents
pages,
publié chez l'éditeur Bar
bin, portant au dos le titre Contes
de ma mère l'Oye et sur la premiè
re page la mention « Histoires
ou
Contes du temps passé avec
des
moralités ».
Perrault s'en
soucie si
peu pour sa gloire qu 'il
le fait paraître sous le nom de
son fils, alors âgé de dix ans :
Perrault d'Armancour .
Ces huit
contes, « Le Petit Chaperon
rouge », « La Belle au bois dor -
mant », « Barbe -Bleue », «Le
Chat
botté » ,« Les Fées »,« Cen
drillon ou La Petite Pantoufle de
vair », « Riquet à la houppe » et
«Le Petit Poucet », seront re
joints dans des éditions ulté -
~ rieu res par :trois · c ontes en vers
parus ~u cours des années pré
cédentes, « La Marquise de Sa
luces, ou La Patience de Griséli
dis >> ( 1691), « Les Souhaits >> et
«Peau-d 'âne >> (1694) .
Tous ren
contrent un succès immédiat et
foudroyant.
Aussitôt fleurissent
un
nembre incalculable de
contes , œuvres d'imitateurs
plus ou moins inspirés parmi
lesquels figurent mêmes
cer
taines -grandes dames de la
Cour.
La iédactien de contes
devient --uR jeu de société .
Per
rault a vraiment créé un genre
en vogue
! A vrai dire, cette
mode a démarré un peu avant
dans
les salons, et il n'a fait que
s'y conformer, mais en lui appor
tant un élément nouveau : un
ton
simple et naturel.
Fidèle à la
tradition orale
Celui qui, une dizaine d'années
auparav.ant, a été le chef de file
des
« Moderne s » lor s de la
« Querelle des Anciens et des
Modernes », n'a pas hésité pour
l'occasion à puiser dans la tradi
tion séculaire d'histoires main
tes fois narrées par les nourri
ces.
C'est ce recours direct au
folklore oral qui fait l'originalité
des
Contes de ma m è re l'Oye : avant
eux , on donnait
plutôt dans les
salons des féeries , des histoires
galantes .
Charles .
Perrault re
transcrit fidèlement , sans les
trahir , sans les
expliquer - lui
qui a toujours prôné un art fai
sant appel à l'intelligence et à la
raison
! -, ces faits extraordi-
~E DITIONS ~;a ATLAS
naires et merveilleux .
Il conser
ve les traditions propres au récit
folklorique, les formules
incan
tatoires ( « il était une fois »,
« tire
la chevillette » ...
), le pro
cédé des cycles (les appels à
sœur Anne, les
quest ions au
loup ...
), les détails concrets des
tinés à donner comiquement de
la vraisemblance à des faits qui
n'en ont aucune (manger les
enfants à la sauce Robert
...
).
Dans l'
épître dédicatoire qui
accompagne les Contes de ma
mè re l'Oye, celui qui a été le
chantre de la raison reconnaît :
« Il est vrai que ces contes don
nent une image de ce qui se
passe dans les moindres fa
milles, GÙ la louable impatience
d'instruire les enfants fait imagi
ner des histoires dépourvues
de raison, pour s'accommoder à
ces mêmes enfants, qui n'en ont
pas encore ; mais à qui con
vïent-il mieux de connaître com
ment vivent les peuples, qu'aux
personnes
que le ciel destine à
les conduire .
» Perrault a cons
cience d'introduire dans la civi
lisation moderne un art ances
tral, considéré jusque-là comme
barbare .
Mais ces histoires
qui
font appel à l'invention et à
l'imagination sont aussi une
façon d' innover , de distraire ,
d'amuser
et de faire rêver en un
temps où, la Cour vieillissant,
l'austérité sinistre des dévots
se
fait de plus en plus pesante .
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