CENSURE & LITTERATURE
Publié le 21/11/2018
Extrait du document

CENSURE. La censure est une action de répression dans la communication des idées et des sentiments. C’est un fait psychologique, communicationnel, sociologique, politique. Si la description historique des faits de censure est indispensable et préliminaire, la compréhension de cette institution ne peut être obtenue sans faire intervenir la théorie des modèles ou schémas.
C’est donc à la schématisation que nous aurons recours. Nous présenterons successivement : le schéma collectif du concept de censure, le schéma communicationnel de la censure, les schémas sociopolitiques structurels et dialectiques, en faisant intervenir la théorie des sociétés dominantes et dominées. Enfin nous vérifierons ces théories sur le plan des civilisations, décrivant les modèles antique, chrétien, monarchique, libéral et socialiste de la censure.
Le schéma collectif de la censure
L’évocation du terme censure fait naître dans l’esprit une image, ou schème, liée à une impression de danger : c’est un individu ou une institution ayant un caractère officiel, appliquant des lois et des règlements, muni d'un pouvoir sur les œuvres et les auteurs, intervenant pour contrôler les textes, ayant le droit de les modifier, de les supprimer et d’agir d’une manière policière sur les individus. Une telle image correspond à une intuition juste. Mais c’est un résultat, l’aboutissement d’un processus et, plus précisément, d’un circuit. Comment, dès lors, non seulement décrire mais expliquer le phénomène de censure des écrits, des livres?
Les définitions de {'Encyclopédie de Diderot
Le mot censure est d’origine latine. Il vient de cen-sere, « estimer, évaluer ». A propos de Censeurs, on lit, dans l'Encyclopédie : « Gens de lettres chargés d’examiner les livres qui s’impriment ... afin que rien ne soit rendu public qui puisse séduire les esprits par une fausse doctrine... », et, pour Censure des livres : « C’est une note ou une qualification à tout ce qui blesse la vérité...; la note... est d’autant plus flétrissante que (le livre) ... s’éloigne de la vérité ».
Le schéma communicationnel de la censure
La censure est un acte de rupture de la communication. On peut donc comprendre la censure en général et la censure des livres en particulier sans avoir recours, dès le départ, à un circuit simple de communication. Si l’on utilise le schéma canonique de Shannon, impliquant un émetteur, un message et un récepteur, on parlera d’une action extérieure qui vient couper ce circuit de communication d’une rupture nécessairement opérante entre le message et le récepteur. Cette rupture créera donc un « bruit », une manifestation d’entropie. La censure réduit l’information circulante. Cette réduction peut atteindre un niveau tel qu’aucune information ne passe plus. Le bruitage qui couvre une émission radio censurée en est un exemple familier. Dans cette perspective matérielle, la censure sera définie comme un « obstacle », parmi d’autres, à la communication. (Ce terme d’obstacle a fait l’objet du thème d’un colloque [Inforcom] tenu à l’Université de Bordeaux III en 1981.) Mais en procédant ainsi, on risque de dissimuler le caractère sociopolitique de la censure. On censure la critique de la censure. C’est la procédure de détournement bien connue dans l’avant-garde. Que la censure soit une rupture objective dans le circuit de la communication, cela est vrai en première approche. Puisque le média est nécessairement objectif, son arrêt est aussi un fait matériel, réalisé par un obstacle. En rester là, c’est demeurer dans la perspective des sciences de la communication telle qu’elle est pratiquée dans l’étude du téléphone, de la radio, de la télévision, etc. Mais la censure est d’abord autre chose. C’est un fait culturel et idéologique. Le censeur n’arrête le livre en tant qu’objet que parce qu’il contient des idées jugées par lui pernicieuses. Il est là d’abord pour cela : juger si les idées sont acceptables. C’est donc bien au-delà d’une théorie scientifique d’inspiration positiviste et libérale de la communication qu’il faut s’orienter si l’on veut comprendre la censure. Il faut avoir recours à une théorie sociopolitique de la communication dont la théorie scientifique n’est qu’un aspect — d’ailleurs très important. Comment, dès lors, comprendre la censure comme fait sociopolitique? Comment faire progresser la théorie communicationnelle de la censure?
Le schéma sociopolitique de la censure
Le schéma structurel
En reprenant le schéma communicationnel, il faut constater que l’acte de censure se superpose à l’acte de communication. Celui-ci n’est rien d’autre que l’échange de deux ou plusieurs subjectivités par l’intermédiaire d’un moyen de communication, oral, audio-visuel, écrit. L’acte de censure suppose donc l’intervention d’un tiers investi d’un pouvoir. C’est donc un fait politique. Mais cet acte concerne le contenu, voire la forme, du message. C’est donc aussi un acte idéologique, en fonction des valeurs sur lesquelles s’appuie le pouvoir politique. Ainsi la censure repose sur un dualisme manichéen : le bon et le mauvais message. Il faut laisser faire, laisser passer ce qui est bon, ce qui est conforme aux valeurs du pouvoir; il faut arrêter ce qui est mauvais, ce qui est contraire à ces mêmes valeurs. Ainsi se constituent dans l’appréhension du message deux concepts bien connus : le conformisme et l’anticonformisme.
Comment expliquer cette situation? Il faut, ici, faire intervenir le modèle des circuits idéologico-politiques conformistes et anticonformistes. On est en droit de concevoir la théorie suivante : dans le cadre d’un espace géographique donné, une population ayant une histoire (voire une langue) commune constitue un groupe donné, une nation. Cette population doit assurer sa survie. Pour y parvenir, elle est obligée de produire des biens nécessaires à sa consommation. Cette production, qui relève de l’économie, divise la population en classes ou groupes sociaux plus ou moins distincts par leur mode de production, leur culture, leurs intérêts. Cette situation conflictuelle se résout par la volonté et l’accession au pouvoir politique. La possession de ce pouvoir divise la société en deux groupes distincts : celui qui participe au pouvoir; celui qui en est exclu; les classes dominantes et les classes dominées.
Les premières organisent la vie sociale en fonction des valeurs théoriques de leurs intérêts. Cela concerne aussi bien le pouvoir militaire et de police, permettant de maintenir la domination de la classe au pouvoir par la force, que l’organisation de la vie économique et culturelle. La société dominante forme alors, par l’enseignement, et alimente, par la propagande, une psychologie collective pénétrée de ses valeurs. Pour réussir dans cette opération, dont le but est la pérennisation et le renouvellement de l’idéologie dominante, le pouvoir politique
organise la communication individuelle et sociale notamment par les communications de masse, dont l’écrit fait partie. Pour montrer le sens de l’action idéologique et pour en accélérer le mouvement, les classes dominantes ont recours à la promotion des individus placés dans le circuit en utilisant deux principes psychologiques de motivation : les honneurs, l’argent. Des premiers relèvent, notamment, les institutions académiques (l’Académie française, par exemple). Des seconds, les prix littéraires, les bourses, les pensions, etc. Ainsi se crée le circuit conformiste dont nous parlions plus haut, qui est jugé bon et qu’on s’empresse de « laisser passer ». Ses produits viendront, par la lecture, alimenter et renouveler l’idéologie dominante dans le public. Mais la vie sociale repose sur la contradiction; le rêve de toute idéologie dominante est de supprimer la dialectique au profit d’un monisme éternel. C’est le projet des dogma-tistes. Les sociétés ou groupes sociaux dominés restent insatisfaits mais ne peuvent être éliminés. A leur tour, leur combat vise la prise du pouvoir. Ils créent des organisations fondées sur des principes comparables à ceux qui régissent les précédentes : élaboration d’un projet de société et d’une table des valeurs; création de moyens militaires en vue d’éliminer le pouvoir en place; création d’écoles de partis; mise en place d’une structure de communication parallèle; action dans le public pour pénétrer celui-ci et faire pièce à l’idéologie dominante.
Une telle action est évidemment pernicieuse pour le gouvernement. Elle vise à saboter sa base légale. Cette action de communication doit donc être interrompue. C’est ici qu’intervient la censure des écrits. On créera une organisation qui dépendra du pouvoir policier et judiciaire et dont la mission — parallèlement aux autres actions de justice, mais sur un plan différent — sera d’arrêter le mouvement de l’idéologie oppositionnelle.
Ainsi le pouvoir politique, d’une part, accélère le mouvement de communication de l’idéologie conformiste par les honneurs et par les avantages matériels, d’autre part, arrête la communication par la censure : la carotte et le bâton. Cette action devra être organisée. Ainsi, ce pouvoir est conduit à décliner son projet en plusieurs étapes successives : légitimer son intervention par la création de lois et de règlements regroupés dans un code pénal; créer une institution — rattachée, en France, au ministère de la Justice et au ministère de l’intérieur — chargée de les appliquer; recruter un personnel intellectuel et policier ayant pour mission de mettre concrètement en œuvre la censure : il faudra intervenir sur les œuvres par l’examen des textes; il faudra, quand cela sera nécessaire, agir sur les hommes — auteurs, éditeurs, distributeurs — pour les intimider en prévoyant un éventail de peines allant de la simple amende à la contrainte physique. Ainsi la « protection » du lecteur suppose la surveillance de l’émetteur et du message à toutes les phases de sa reproduction et de son trajet.
Du circuit oppositionnel interne au circuit oppositionnel externe
Cette action du pouvoir dominant comporte une part de naïveté. Sa réussite dépend du degré de lassitude de l’émetteur, l’écrivain oppositionnel. Mais les plus dangereux sont aussi les plus convaincus, donc les plus volontaires. Éliminée du circuit officiel de production et de distribution, l’idéologie anticonformiste et oppositionnelle va chercher d’autres voies. Elle en trouve une d’abord sur place par la création, la reproduction et la distribution clandestines des textes. La voie est dangereuse et souvent réprimée. Reste alors la voie du circuit extérieur : l’étranger. Il ne manque pas, dans la société internationale, de pays dont les idéologies ou les intérêts sont opposés à ceux du pays où intervient la censure. Dès lors va se créer un mouvement de communication internationale. L’auteur peut rester dans son pays ou s’exiler : il crée. Les manuscrits contestataires arrivent dans les maisons d’édition étrangères; souvent traduits, les documents seront multipliés et serviront la propagande locale, voire l’action de celle-ci, vers le pays d’origine, par l’introduction clandestine des publications. La censure de la classe dominante devra donc s'adjoindre une police douanière des frontières chargée de l'examen des ouvrages imprimés à l’étranger.
Le schéma dialectique
Le schéma structurel de la censure sociopolitique des écrits rend compte du schéma communicationnel et de l’arrêt de la communication. Mais il s’avère incomplet. Il généralise une situation idéologique conflictuelle sans tenir compte de ses variations historiques. Il faudra donc se poser la question de l’évolution de la censure des écrits. L’histoire de celle-ci renvoie au schéma précédent; elle permet, pour faciliter la compréhension, de déterminer plusieurs phases dans le rapport entre les deux forces antagonistes. On peut concevoir deux phases extrêmes : dans la première, les classes dominantes sont sans opposition notable; dans la seconde, cette dernière s’est développée à un point tel qu’elle est prête à renverser l’idéologie conformiste; entre elles on peut imaginer diverses phases de croissance. Parfois on assiste à un renversement militaire et révolutionnaire des rapports de force; l’ancienne société dominante, devenue dominée, perd progressivement de sa force, tandis que l’idéologie de la classe dominante nouvelle installe à son tour ses pouvoirs. A toutes ces étapes, la censure ne fonctionne pas de la même manière. Pendant la première période, les classes dominantes institutionnalisent le principe de la censure. Mais celle-ci est d’importance administrative limitée. Dans les périodes de croissance de l’opposition et du circuit anticonformiste, on assiste à un renforcement de la censure sur les différents plans : légaux, administratifs, des personnels, etc. Encore cette croissance n’est-elle pas nécessairement linéaire. Elle se fait plutôt sous la forme cyclique d’un accroissement soudain, suivi d’un relâchement, comme si le pouvoir hésitait, soufflant tantôt le froid, tantôt le chaud. Dans la phase de débordement progressé, la censure est obligée d'assouplir son étreinte. Ce qu'elle n’aurait pas toléré, elle l’accepte. La censure se décompose de l’intérieur; il ne reste plus qu’une façade. Un renversement des rapports de force n’a donc pas de mal à supprimer la censure ancienne... pour en rétablir une nouvelle. Ainsi la censure passe nettement par quatre phases : son existence de principe et d’action limitée; sa croissance et sa puissance; sa décomposition interne; sa suppression et son remplacement. A la dialectique structurelle de la censure s’ajoute donc une dialectique cyclique de l’évolution de sa structure.
Au terme de cette analyse générale du modèle de la censure, on est en droit de se poser deux questions : ce modèle est-il constant et ne peut-on pas imaginer une société sans censure? Ce même modèle ne varie-t-il pas à travers des sociétés différentes? A la première question, on ne peut répondre que par la négative : là où il y a écrit, il y a censure, d’une manière ou d’une autre, du fait même de la division des sociétés en classes dominantes et dominées. A la seconde question, il faut répondre par l’affirmative : le modèle n’est qu’un schéma théorique susceptible de rendre compte du mécanisme général de la censure dans toutes les sociétés. Il faut néanmoins constater des variations importantes lorsqu’on examine la réalité de la censure dans des sociétés différentes.
Les modèles historiques de la censure
L'histoire de la censure des écrits est une discipline récente. C’est surtout depuis un siècle environ qu’on a
entrepris une analyse historique de la censure. La perspective est alors essentiellement humaniste : la liberté de pensée et d’expression entraîne la condamnation de la censure des écrits, quitte, pour les tenants de la liberté, à pratiquer eux-mêmes... la censure. Il a donc fallu attendre l’essor récent de la « bibliologie » (science de l’écrit), et particulièrement de la bibliographie politique, pour que la censure soit abordée sociologiquement. Encore cette histoire de la censure des écrits est-elle bien réduite dans les ouvrages traitant de l’histoire du livre. Les grandes rubriques de cette discipline portent sur l’écriture, l’illustration, le document, la reliure, le manuscrit et l’imprimé, l’édition et la librairie. L’étude de l’organisation sociale et politique commence à se développer surtout après la Seconde Guerre mondiale, et la censure y figure comme une sous-rubrique. La conception de l’histoire du livre restait trop descriptive, humaniste. L’analyse politique de la communication renouvelle l’étude de la censure.
Compte tenu du faible développement récent des études sur la censure, il faut bien constater que presque tout reste à faire en ce domaine, qu’il s’agisse des sociétés dites primitives ou des sociétés préclassiques (chaldéo-assyriennes, égyptiennes, précolombiennes, etc.). Des informations commencent à apparaître pour l'Antiquité; elles demeurent disparates. C’est à partir du christianisme que l'on peut vérifier l’hypothèse précédente du modèle sociopolitique de la censure. On dégagera ainsi cinq phases essentielles : le modèle antique; les modèles chrétiens; le modèle monarchique; le modèle libéral; le modèle socialiste.
Le modèle bibliologique de la censure dans l’Antiquité
Si le modèle bibliologique de l’Antiquité est connu, la fonction de la censure l’est moins. La société grecque invente le libéralisme commercial. Les échanges lui permettent, par la création des comptoirs notamment, de procéder à des enrichissements considérables. Le système urbain se développe et avec lui la bourgeoisie commerciale. La démocratie ploutocratique remplace la monarchie initiale. Elle fonctionne par ses assemblées et ses archontes. Elle exprime son idéologie par la philosophie et par les différents arts littéraires. Elle les transmet à ses enfants par l’enseignement des philosophes. Mais pendant longtemps, cet enseignement reste essentiellement fondé sur l’oralité et sur le développement de la mémoire. Néanmoins, la transcription devient nécessaire. Ce sera la fonction initiale de la logographie. Devant la demande croissante de textes écrits, une structure de reproduction et de distribution commerciale apparaît : les libraires copistes, dont le magasin est situé près de l'agora et, plus tard, chez les Latins, dans le forum. Cette organisation est fondée sur l’application du principe de la libre entreprise. Parfois l’entreprise devient très importante. On cite souvent l’exemple d’At-ticus, l’ami de Cicéron, qui possédait de nombreux esclaves chargés de copier, et dont les livres se vendaient sur tout le pourtour de la Méditerranée. Dans cette situation, un conservatoire des livres s’imposait. On connaît l’importance de la bibliothèque d'Alexandrie, atteignant, sous les derniers Ptolémées, environ 700 000 volumes. A Herculanum, on a trouvé, dans les fouilles d'une maison privée, 1814 rouleaux ou fragments dans la bibliothèque d’un philosophe épicurien. Mais on n’a que peu d’informations sur la censure et son organisation. Comme le système de communication privilégie généralement l’oral, c’est là qu’il faut chercher l’action de la censure. Le procès fait à Socrate concerne ses affirmations verbales, non ses écrits. Par ailleurs, les destructions tardives de documents effectuées à la fin de l’Antiquité sont une raison supplémentaire de notre ignorance. On sait pourtant que le pouvoir politique intervenait en censurant les

«
•
Soundiata Keita unifie donc toute
la savane, entre Niger et Sénégal,
annexant à son tour le Sasso,
le Ouagadou et le Ména (1240).
Sa progression se heurte à une vive
résistance animiste en haute
Casamance et en haute Gambie.
Vainqueur, Soundiata est proclamé roi
des rois : Mansa.
Le Mali est né.
LA FORMATION DE L'EMPIRE
• Revenu des guerres de conquête,
Soundiata structure la société malinké
et celles des peuples conquis en castes
professionnelles fermées.
La population
est ainsi répartie en 30 clans : 16 clans
d'hommes libres (guerriers) ; 4 clans
de griots (conservateurs des traditions
et des généalogies des souverains) ;
5 clans de marabouts (religieux) et
5 clans d'artisans et de commerçants
(les Dioulas) qui assurent l'essor
économique de l'empire.
La population
se divise en deux groupes : les hommes
libres d'une part, les artisans et les
esclaves d'autre part.
• Les alliés non malinkés gardent le
pouvoir des royaumes ou provinces
autonomes de l'empire : Ména, Diara,
Ouagadou.
Les provinces atlantiques de
Casamance et de Gambie deviennent
des colonies de peuplement.
• Deux gouvernements militaires sont
placés à la tête d'une région du nord
(Saura) et d'une région du sud
(Sankaran).
t'empereur est représenté
dans les provinces par des
représentants, les farins, qui exercent
des fonctions administratives et
contrôlent l'exercice de la justice.
• Le règne de Soundiata a constitué
une époque de paix et de prospérité
matérielle.
t'empereur possède des
villages de forgerons, de pêcheurs,
d'agriculteurs, de cordonniers, etc.
La cour de Soundiata est le lieu de
rendez-vous de lettrés arabes ou
sarakolés.
C'est à Nia ni, la capitale, que
Soundiata Keita finit ses jours en 1255.
L' APOGtE DU MALI
• t'empire atteint son apogée au milieu
du x1v' siècle.
Le Mali connaît alors sa
plus grande extension en regroupant
une grande partie des territoires
compris entre le Sahara et la région
préforestière, l'océan Atlantique et
la boude du Niger.
Niani.
Djenné,
Tombouctou et Gao en sont les centres
les plus importants.
• Nombreux sont les auteurs arabes,
soudanais et plus tard européens qui
ont apporté des témoignages détaillés
sur l'histoire du Mali et sur sa richesse
en or.
En elfe� la puissance de l'empire
repose en particulier sur le commerce
du précieux métal, car les champs
aurifères se concentrent autour
du Mandé.
DE L'OR EN ABONDANCE
• t'or extrait des puits du Bouré et
du Bambouk fait l'objet d'un grand
commerce.
Le monde musulman et
le monde chrétien utilisent l'or malien.
Le Mali entretient des relations
régulières avec les pays de la Forêt;
les commerçants maliens en rapportent le
cola et l'huile de palme.
Tous les
produits maliens et méridionaux sont
exportés par les bateliers bozas du Niger
vers les ports fluviaux de Djenné et de
Tombouctou, qui deviennent de grands
entrepôts de marchandises et des lieux
d'échanges avec les commerçants
musulmans, qui apportent sel, bijoux,
tissus, livres, objets de luxe.
• Les commerçants adoptent, en ville,
le mode de vie des Maghrébins.
Ils
organisent des sociétés de commerce
qui ont des correspondants dans toutes
les villes nigériennes.
carrefours de commerce, deviennent
également des centres de culture et
religieux.
Dans les mosquées, enrichies
de bibliothèques, les écoles coraniques
ouvrent leurs portes et des centres
d'enseignement des sciences, de la
théologie et du droit se développent.
DE GRANDS SEIGNEURS
• t'or permet aux Mansa, les rois
du Mali, de pratiquer une politique
d'expansion grâce à leur cavalerie
achetée en Afrique du Nord.
Ils se font
connaître en effectuant le pèlerinage de
La Mecque.
En 1324, à la tête d'un
immense cortège de serviteurs et de
porteurs, Mansa Moussa ou Kankou
Moussa (1312-1337), se rend au pèlerinage.
• À son retour, il cherche à faire des
villes de son Empire les égales de celles
qu'il a vues en Orient Il fait édifier à
Gao une grande mos�uée, a
Tombouctou, un palais royal et la
mosquée de Djinguereber et, à Niani,
une vaste salle d'audience surmontée
d'une coupole.
• Le règne de Mansa Moussa marque
l'apogée de l'empire.
Sa renommée
atteint au XIV' siècle toute l'Afrique,
le monde arabo-berbère et l'Europe.
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:reçoit la visite
en 1352-1353 du grand voyageur arabe
Ibn Battuta (1304·1368/1377), qui
prend soin de noter le luxe de la cour
royale : «La salle (d'audience) a ...
trois fenêtres en bois recouvertes
de plaques d'argen� et, au-dessous,
trois (autres) recouvertes de plaques
d'or ...
Les écuyers arrivent avec des
armes magnifiques :carquois d'or et
d'argent, sabres ornés d'or ainsi que
leur fourreau, lances d'or et d'argen�
massues de cristal.»
• À la mort de Mansa Souleymane, vers
1360, l'empire est ébranlé par une série de
luttes successorales qui entraînent
anarchie et décadence.
LA DtCADENCE DU MAu
• Vers la fin du XIV' siècle déjà, les
Mossis, un peuple soudanais, font
des incursions victorieuses dans la zone
lacustre et, quelques années plus tard,
tout le sud saharien (Tombouctou,
Djenné, Oua lata) est conquis par les
Touaregs.
• De 1435 à 1473, l'Empire songhaï
occupe toute la boucle du Niger :
Tombouctou, Gao, Djenné.
t'arrivée
des Portugais sur les côtes africaines,
après 1450, contribue à ébranler
les rapports de forces politiques
régnant dans l'Afrique intérieure.
Le nord-ouest du Mali se fractionne
entre un royaume peul et des
royaumes locaux.
Au XVI' siècle,
le Mali est réduit à une petite chefferie :
le Mandingue, prolongé jusqu'à
l'Atlantique par la Casamance.
Des royaumes existent dès le VIII' siècle,
dans la boucle du Niger, en particulier
celui de Gao dirigé par le clan des
Songhaïs.
Leurs territoires sont encore
mal organisés quand ils sont conquis
vers 1325 par Mansa Moussa.
Dès la seconde moitié du XIV' siècle,
les Songhaïs de Gao, profitant des
difficultés du Mali, se libèrent de
sa tutelle.
Il faut attendre le règne
de Sonni Ali Ber {1464-1492) pour
que soit fondé l'empire de Gao
organisé sur le modèle malien.
Du ROYAUME À L'EMPIRE
• Ali le Grand est le fondateur de
l'empire.
Intelligent et énergique,
clairvoyant et réaliste, profondément
animiste et réputé grand magicien,
Sonni Ali
Ber pratique l'islam par calcul
politique plus que par conviction.
• Dès son arrivée au pouvoir, il
structure l'administration et entreprend
une réforme de l'armée.
Tout en
développant une cavalerie efficace,
indispensable en période sèche, il crée
une importante flottille de guerre,
décisive en période de hautes eaux, à
laquelle il confie un rôle militaire de
plus en plus important, notamment
dans le transport des troupes.
t'armée
d'Ali Ber s'empare ainsi de Tombouctou
en 1468 par terre et vient à bout de
Djenné, cinq ans plus tard, par le siège
imposé par 400 pirogues.
• En 28 ans de règne, Sonni Ali Ber
contrôle le commerce entre la forêt
(noix de cola), la savane (mil), le désert
(sel) et le monde arabe (produits
de luxe).
Maître de la boucle du Niger,
il conquiert la partie septentrionale
du royaume mossi du Yatenga, situé
plus au sud.
• Sonni Ali Ber meurt en 1492 au retour
d'une expédition.
Son fils Sonni Bara
Bakari le remplace sur le trône, mais
dès l'année suivante, Mamadou Touré,
un de ses proches lieutenants
se rebelle, le défait à Ankoo, près de
Gao et fonde la dynastie des Askia
(1493).
L'ŒUVRE
TERRITORIAU
D'ASKIA MOHAMMED (1493-1528)
• Mohammed a cinquante ans
quand il accède au pouvoir.
il gouverne
avec l'appui des croyants et consulte
toujours les chefs religieux de l'islam
sur les grandes décisions à prendre.
Il entreprend un pèlerinage à
La Mecque et en revient avec le titre
de khalife du Soudan, légitimant
ainsi religieusement le pouvoir usurpé.
• Général d'origine soninké,
Askia Mohammed est le véritable
édificateur de l'Empire songhaï.
Renonçant au système des levées
en masse qu'avait pratiqué Ali Ber,
il recrute une armée de métier parmi
des esclaves et des prisonniers
de guerre, ce qui lui permet de laisser
les cultivateurs sur leurs terres toute
l'année, les artisans à leurs métiers
et les commerçants à leurs affaires.
• Askia Mohammed continue l'œuvre
d'agrandissement territorial entamé par
Son ni Ali Ber.
Il étend l'empire à l'ouest
comme à l'est en combattant contre
l'empire du Mali (1500-1508) et contre
les États haoussas {1513-1517).
Son
expansion n'est arrêtée que par le
Bornou.
Mais il échoue dans sa
tentative de conquête du royaume
mossi du Yatenga.
À son apogée, l'empire
s'étend de l'Atlantique au Bornou.
L'ORGANISATION DE L'EMPIRE
• t'administration d'un empire aussi
vaste (plus de 2 500 km d'ouest en
est à vol d'oiseau) ne manque pas
de poser des problèmes.
Sonni Ali Ber
avait commencé à organiser l'empire,
Askia Mohammed achève de mettre
en place les cadres qui assurent l'unité
de ce grand ensemble.
L'ÉTAT CENTRALISt
• À la tête du gouvernement central,
il y a l'empereur assisté de nombreux
conseillers ou ministres spécialisés
pour la plupart dans des tâches
précises.
Il y a par exemple les
ministres et dignitaires chargés du
protocole, de l'intendance, des
finances, de la justice et de la police,
de la flotte, de l'armée, de la cavalerie.
• L'empereur choisit et nomme ses
ministres conseillers.
L'hérédité des
charges n'existe pas dans l'Empire
songhaï
.
Princes et simples sujets, selon
le désir de l'empereur, accèdent aux
plus hautes charges.
Chaque fonction
a son uniforme, son insigne et ses
prérogatives.
Ainsi, le ministre chargé
du protocole jouit du droit de s'opposer
à une décision de l'empereur.
L'ADMINISTRATION DES PROVINCES
• Reprenant les usages en vigueur sous
l'empire du Mali, Askia Mohammed
charge les farins de diriger les
provinces.
Les grandes villes frontières
possèdent chacune des administrations
autonomes.
De nombreux
fonctionnaires affectés à la perception
des impôts quadrillent le pays.
• Askia Mohammed met en place un
système de perception relativement
équitable où chacun verse selon
ses ressources, du grain pour
les cultivateurs, du poisson pour
les pêcheurs ou des travaux manuels.
les butins rassemblés à l'issue
des guerres constituent un appoint très
important.
• la justice est rendue dans chaque
ville, par un magistrat ou cadi dont
les sentences sont sans appel.
L'trANOUISSEMENT
CULTUREL
• Les grands centres, comme Gao,
Tombouctou, Djenné, Oualata, servent
de cadre à une vie intellectuelle et
religieuse intense.
• Les Askia sont des souverains
instruits.
Ils encouragent les hommes
de science, les lettrés, les savants, allant
jusqu'à leur donner des terres et des
esclaves.
Askia Daoud fonde une
importante bibliothèque impériale.
la réputation des écoles supérieures
de Tomboudou dépasse le cadre
de l'Empire songhaï et s'étend à toute
l'Afrique saharienne et sub-saharienne.
• La civilisation songhaï est fortement
marquée par l'islam.
t'enseignement
est centré sur le Coran, avant de
s'ouvrir à des disciplines comme
l'histoire, la théologie, la grammaire,
la rhétorique, la logique, le droi� etc.
t'islam songhaï est toléran� respectant
par exemple les pratiques animistes
des larges couches de la population
campagnarde.
le principe africain de la
solidarité entre tous les humains trouve
son expression dans la pratique
musulmane de l'aumône.
DtCADENCE ET FIN DE L'FMPIRE
• la richesse de l'Empire songhaï
en or et gisements de sel (Teghaza)
est tellement mise en avant par les
chroniqueurs arabes qu'elle suscite
la convoitise du sultan du Maroc
al-Mansur {1578-1603), de la dynastie
des Saadiens.
Celui-ci entreprend
de conquérir l'empire alors sous le
règne de I'Askia lssihak Il.
la défaite
de ce dernier, en mars 1591, à Tondibi,
à proximité de Gao, met fin au puissant
Empire songhaï, la dernière importante
organisation étatique du Soudan
occidental.
La même année, la ville
de Tombouctou est prise par
les Berbères d'al-Mansur.
• La fin du XVI' siècle marque un
tournant dans l'histoire de l'Afrique
de l'Ouest : la fin des grands empires.
Il s'ensuit une longue période de
crises politiques qui aboutit à la
multiplication de chefferies qui se
succèdent.
profitant parfois de la
nouvelle source de revenus que
constituera la traite des esclaves
au cours du XVI' siècle.
ROYAUMES ET AUTRES FORMATIONS
POLITIQUES EN AFRIQUE DE L'OUEST
Dans les autres régions de l'Afrique
subsaharienne, d'autres structures
politiques ont coexisté avec les grands
empires.
Mais seules des découvertes
archéologiques pourraient aider à la
connaissance des formations politiques
qui ont vu par exemple s'épanouir la
civilisation d1fé au Xlii' siècle chez les
Yorubas, dans l'actuel Nigeria.
Notre
connaissance dépend de la diffuson de
l'islam dans ces régions à partir du x'
siècle.
Des royaumes ont revêtu une
importance stratégique, sur les routes
empruntées par les caravanes vers
La Mecque, comme le Kanem·Bornou..
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