Ce grand seigneur mit l'ambition et l'honneur de sa vie à devenir un grand poète. Cet homme de plaisir se révéla en mainte occasion un homme de caractère. Ce délicat poète élégiaque fut le créateur de notre poésie classique. Dans quelle mesure ce jugement vous parait-il éclairer certains aspects essentiels de la formation, du tempérament et de l'oeuvre de Ronsard ?
Publié le 18/07/2012
Extrait du document
Par la combinaison de ces divers éléments, l'oeuvre lyrico-élégiaque de Ronsard touche souvent à deux sources émouvantes et éternelles de la poésie la plus haute : le désir passionné et la mort. A remarquer que c'est dans des petites oeuvres, dans des sonnets que Ronsard a eu le plus profondément et de la manière la plus personnelle, le sens du grand.
«
Ronsard 45
plus grecque que latine et, contrairement à ce qui a lieu d'or
dinaire, la formation livresque a suivi et non précédé les
leçons de l'expérience.
Notons enfin le divorce relatif entre
ces deux formations qui parfois se rejoignent mais plus
sou
vent s'ignorent : il y a côte à côte chez Ronsard un homme du
monde et d'expérience extrêmement brillant et un «rat de
bibliothèque
» qui en bien des cas confine au pédant.
II.
Le dualisme de formation est d'autant
plus
important qu'il s'accompagne d'un dualisme profond
dans le tempérament même du poète
Il y a chez Ronsard deux hommes en apparence incompa
tibles mais qui coexistent et même parfois collaborent.
A.- UN HOMME DE PLAISIR.
C'est l'homme qui, au Collègs
même de Coqueret, saura sortir pour voir et s'ar,nuser, et qui
dans le reste d'une existence consacrée à
l'étude 1 et à la créa
tion ne perdra jamais le contact avec la vie ·,de Cour.
Dans son œuvre la manifestation la plus
origlp.ale et la plus
artistique de cet homme, c'est cette mélancolie qui lui est
si propre (surtout dans
la littérature classique}iet qui accom
pagne toujours une tendance à rechercher les s~nsations pour
en jouir chez les natures sensuelles
affinéefl/par la culture.
A
la fin de sa vie, quand la déchéance.physique mettra
un terme au plaisir, cette mélancolie devieildra une angoisse
hallucinante, si bien qu'il créera alors
(daria ses derniers son
nets) une poésie aux antipodes de
la poéS,ie gracieuse de sa
maturité
et qui, en réalité, en est l'aboqtissement naturel :
l'inspiration dominante de
cette poésie êst la stupeur morne
de l'âme devant la désagrégation
du cOiips devenu incapable
de vivre
sa vie.
Anéantissement de vieimorale dans l'anéan
tissement de vie physique.
Il rappelle la poésie de Villon par lé.
sentiment de l'horreur
physique devant
la décomposition du,corps.
Mais il en diffère parce que ce sentiment chez Villon sert de
point de
départ à un drame moral et, à l'angoisse dé l'au-delà.
B.- UN HOMME DE CARACTÈRE.\C'est l'homme qui, frappé
d'infirmité en pleine jeunesse, a -i?ulu se refaire une vie plus'
brillante
qu'autrefois..
»
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