« Ce début annonce un roman... »:► Dans leur manière d’introduire les personnages, ces textes cherchent-ils à donner l’illusion du réel ? Justifiez votre réponse.
Publié le 09/09/2018
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A - Pierre Carlet de Chamblain de Marivaux, La Vie de Marianne, 1742.
B - Alain Robbe-Grillet, Les Gommes, 1953.
C - Milan Kundera, L'Immortalité, 1990.
D - Philippe Claudel, Les Ames grises, 2003.
- une présentation assez déconcertante : contraste entre l’intérêt que trouvent les amis à “ faire imprimer » ce texte et la banalité de ce que le soi-disant éditeur dit sur l’ouvrage et de son héroïne : “ c’est une femme qui raconte sa vie » ; rien d’abord pour valoriser l’héroïne ou son existence, individualisée seulement par un prénom : “ Marianne » ; des aveux d’ignorance (« nous ne savons qui elle était »), une conclusion désinvolte (« c’est tout »)...
2. Un deuxième début de roman
• Prise de parole de Marianne qui assure la continuité avec le préambule.
• Permet avec beaucoup de souplesse, sur le mode de la « captatio benevolentiae » de la destinataire, une prise de contact directe du lecteur avec la narratrice.
• Son propos complète et corrige l’impression laissée par le préambule : Marianne qualifie son “ histoire » de “ particulière » suscite la curiosité.
3. La vivacité et la souplesse de l’autoportrait
• Ce n’est pas un autoportrait construit.
• Portrait en paroles à partir de fragments d’autoportraits entremêlés de considérations générales qui livrent en toute liberté des informations apparemment désordonnées sur celle qui parle.
• Quelques repères temporels établissent un début de chronologie rétrospective : il fait référence à un passé assez éloigné (« il y a douze ans “, “ il y a quinze ans »), durée qui s’ajoute aux “ quarante ans » qui séparent la rédaction du manuscrit de sa découverte.
«
Voilà tout ce que j'avais à dire : ce petit préambule m'a paru
nécessaire, et je l'ai fait du mieux que j'ai pu, car je ne suis point
20 auteur, et jamais on n'im primera de moi que cette vingtaine de
lignes-ci.
Passons maintenant à l'histoire.
C'est une femme qui raconte sa
vie ; nous ne savons qui elle était.
C'est la Vie de Mari anne ; c'est
ainsi qu'elle se nomme elle-même au commencement de son
25 histoire ; elle prend ensuite le titre de comtesse ; elle parle à une de
ses amies dont le nom est en blanc, et puis c'est tout.
Qu and je2 vous ai fait le récit de quelques accidents de ma vie,
je ne m'attendais pas, ma chère amie, que vous me prieriez de vous
la donner tout entière, et d'en faire un livre à imprimer.
Il est vrai
30 que l'histoire en est particulière, mais je la gâterai, si je l'écris ; car
où voulez-vous que je prenne un style ?
Il est vrai que dans le monde on m'a trouvé de l'esprit ; mais,
ma chère, je crois que cet esprit-là n'est bon qu'à être dit, et qu'il
n e vaudra rien à être lu.
35 Nous autres jolies femmes, car j'ai été de ce nombre, personne
n'a plus d'esprit que nous, quand nous en avons un peu : les
hommes ne savent plus alors la valeur de ce que nous disons ; en
nous écoutant parler, ils nous regardent, et ce que nous disons
profite de ce qu'ils voient.
40 J'ai vu une jolie femme dont la conversation passait pour un
enchantement, personne au monde ne s'exprimait comme elle ;
c'ét ait la viv acité, c'était la finesse même qui parlait : les connais
seurs n'y pouvaient tenir de plaisir.
La petite vérole3 lui vint, elle en
resta extrêmement marquée: quand la pauvre femme reparut, ce
45 n'était plus qu'une babillardé incommode.
Voyez combien aupara
vant elle avait emprunté d'esprit de son visage ! Il se pourrait bien
fa ire que le mien m'en eût prêté aussi dans le temps qu'on m'en
trouvait beaucoup.
Je me souviens de mes yeux de ce temps-là, et je
crois qu'ils avaient plus d'esprit que moi.
50 Combien de fois me suis-je surprise à dire des choses qui
auraient eu bien de la peine à passer toutes seules ! Sans le jeu
d'une physionomie friponne qui les accompagnait, on ne m'aurait
pas applaudie comme on faisait, et si une petite vérole était venue
réduire cela à ce que cela valait, franchement, je pense que j'y aurais
55 perdu beaucoup ..
»
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