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BÉROUL ET THOMAS D'ANGLETERRE: Un même substrat légendaire

Publié le 15/09/2018

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BÉROUL ET THOMAS D'ANGLETERRE Un même substrat légendaire

 

Les deux romans de Tristan du xii» siècle se basent sur le même substrat légendaire, mais le placent sous des éclairages très différents. Béroul comme Thomas écrivent dans la deuxième moitié du xii» siècle, à une époque où le « roman >> comme genre vient à peine de faire son apparition : on peut sans doute affirmer que Chrétien de Troyes est postérieur aux deux « auteurs » de la matière tristanienne lon date couramment le texte de Thomas de 1173, mais il est possible que celui de Béroul lui soit l égèrement postérieur). La préhistoire du genre romanesque ne compte guère alors que les trois << romans antiques » (Thè-bes, Eneas et Troie) et la matrice de tous les romans arthuriens ultérieurs qu'est le Roman de Brut, de Wace, traducteur de l'Historia regum Bri-tanniae de Geoffrey de Monmouth, et commandité par Henri Il Planta-genêt, autour duquel gravite aussi Thomas d'Angleterre.

 

Traditionnellement, on a tendance à dire que Béroul, sans doute un peu plus ancien, se fait l'écho d'une version << primitive » de la légende, plus violente et sauvage que celle de Thomas, qui au contraire adapterait son matériau de base aux exigences nouvelles de l'idéologie à la mode, à savoir la courtoisie. Certains critiques ont suggéré récemment que cette catégorisation satisfaisait le goût moderne mais ne correspondait qu'imparfaitement à la réalité. En fait dans le texte de Thomas

L'œuvre de Thomas

 

Chez Thomas, dans la mesure où nous pouvons nous faire une idée de ses choix esthétiques à partir des quelques fragments dont nous disposons, l'essentiel n'est pas le récit, mais le commentaire qui se greffe sur lui : Thomas est un glossateur, au sens que le Moyen Âge donne à ce mot. Les faits, les événements sont juste les supports d'une réflexion théorique sur l'amour, mais aussi sur l'être humain en général. Courtois, il l'est au sens où il se plaît à disséquer les nuances des sentiments des personnages, et se montre ainsi un précurseur d'André le Chapelain : la différence entre eux tient au fait qu'André compose un traité et passe en revue un certain nombre de cas de figures imaginaires, tandis que Thomas part d'un scénario romanesque sans doute déjà célèbre à son époque, et ne peut donc pas s'éloigner exagérément des données de base. Mais l'adjonction d'Yseut aux Blanches Mains, qui est peut-être un apport original, lui donne l'occasion d'élaborer une superbe construction en chiasme, dessinant avec subtilité la courbe des souffrances suscitées par l'amour.

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« se mêlent des séquences tout imprégnées des raffinements de la cour­ toisie et des épisodes qui semblent surgir du réservoir des motifs folkloriques les plus anciens.

On peut néanmo ins dégager les grands traits des deux œuvres en les opposant presque point par point.

Les oppositions L'œuvre de Béroul Le roman de Béroul est bâti sur un scénario linéaire, à partir d'une succession d'épisodes juxtaposés ; une fois donnés les grands tour­ na nts du texte, la construction de déta il est assez lâche : il serait pos­ sible d'insérer de nouvelles séquences sans modifier fondamentalement le sens de l'œuvre.

On peut cependant noter une évolution du plus sim­ ple vers le plus compliqué : la scène du > très riche.

Le style de Béroul est facilement descriptif ; cependant, il ne s'attarde jamais à de longs portraits des personnages ; tous les élé­ ments qui sont mentionnés ont une portée symbolique :s'il s'attarde sur la beauté d'Yseut, c'est en fonction de l'effet que produit cette beauté sur les spectateurs.

S'il donne une description détaillée de la position des aman ts dans la>, c'est afin de met­ tre en place un certain nombre d'ob jets dotés d'un sens précis dans l'un ivers féo dal, objets auxquels Mar c substituera une nouvelle série, modifiant ainsi le sens de la scè ne.

Par ailleurs, Béroul est le cham pion de l'amb iguïté ; il se plaît à jouer sur les mots et, à plusieurs reprises, fait reposer le poids de l'intrigue sur un effet de dou ble sens.

L'attitude de Tristan et Yseut vis-à-vis du langage est calquée sur celle de l'aut eur, du« Ren dez vous épié n au « Serment ambigu >> :il s' agit toujours de faire entendre une chose tout en en disant une autre, de s'adr esser à deux interlocuteurs différents en même temps, bref de jouer sur les nivea ux de com préhension du public et des personnages.

Rien n'est explicite chez Bérou l, ou plut ôt rien n'est explicité.

Les dialogues ou monologues des personnages, qui occupent une part réduite du texte, sont soit des cons tats de fait, dépour vus de dimens ion réflexive, soit des morceaux de rhétorique à l'intention d'un interlocuteur qu'il faut convaincre, séduire, égarer.

Béroul lui-même, en tant qu'écrivain, apparaît rarement dans le champ. »

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