BÉRÉNICE ACTE IV, SCÈNE 5 de Racine (commentaire de texte)
Publié le 03/11/2015
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BÉRÉNICE ACTE IV, SCÈNE 5 Introduction : Racine était plus proche de Corneille de la conception grecque de la tragédie. Il a fait de chacune de ses pièces une lutte entre la passion de ses héros et la fatalité. La passion étant pour Racine l'amour poussé à son paroxysme, on comprend qu'on ai pu qualifier Racine de « peintre de la femme », puisqu'on considère encore aujourd'hui que l'amour est incontestablement un sentiment propre à la femme et même quelque fois sa raison de vivre. Dans la tragédie de Bérénice, qui comme cela est courant chez Racine, est éponyme, il s'agit pourtant d'un amour partagé. Bérénice aime Titus et Titus aime Bérénice. Mais si Bérénice est toute entière à son amour pour Titus, lui, est appelé à devenir empereur romain et il prend conscience à devenir de ce qu'il doit à cette nouvelle dignité. – Bérénice est reine de Judée (actuel Israël), or la tradition romaine s'oppose à un mariage entre un empereur romain avec une étrangère. L'héritier doit être entièrement romain. En effet, l'héritier du trône pourrait avoir un sang mêlé. – Bérénice doit donc partir. Elle vient d'apprendre la décision de Titus par la bouche d'Antochus. Elle obtient finalement un entretien avec Titus, mais qu'elle lui avoue sa stupéfaction. Titus, tout déchiré, reste fidèle à son devoir « Il ne s'agit plus de vivre, il faut régner ». À ces arguments d'hommes et d'empereur, Bérénice va répondre par des protestations de femme et d'amoureuse. Le passe qui suit début au vers 1111 jusqu'au vers 1136, mais pour des raisons pratiques, nous les numéroterons de 1 à 26. On va y voir Bérénice sombrer avec désespoir l'avenir sans Titus, puis implorer son amant la permission de vivre à Rome dans son ombre sans qu'il soit question de mariage. Mais, à chaque supplication, Titus répondra par sa déchirante résolution.
«
Elle voudrait faire partager à Titus cette nouvelle perception.
Notons la force des
adjectifs employés « cruel » et « affreux » qu'elle caractérise par l'adverbe
« jamais » et par l'expression « quand on aime » .
Elle rappelle naïvement à Titus
que le mot amour ne rime jamais avec toujours.
Vers 3 à 4 : « Dans un mois, dans un an, comment souffrirons-nous
Seigneur, que tant de mers me séparent de vous ? »
Voici l'évocation qui commence.
Le temps est en marche et la séparation
accomplie : qu'il s'agisse d'un mois ou d'un an, le temps ne comptera plus puisque
plus rien ne viendra rompre l'attente.
Cette évocation est si douloureuse que
Bérénice se demande si Titus et elle pourront la supporter.
Le vers 4 évoque une
idée de temps illimitée.
Ici, comme dans le monologue d'Hermione, au vers 1427
(Acte V, Scène 1) l'espace et le temps se confondent.
(L'espace symbolise le
temps).
Vers 5 à 7 : « Que le jour recommence et que le jour finisse,
Sans que jamais Titus puisse voir Bérénice,
Sans que de tout le jour, je puisse voir Titus ? »
On dit que ces trois vers sont parmi les plus beaux de la langue française.
Voici que réapparaît la séparation par le temps.
Même si la mer symbolisait la
distance, l'inexorable image des jours qui passent un à un est encore plus
douloureuse.
Cette lenteur poignante, Racine a su la rendre grâce à la force du
singulier ! C'est toujours le même jour ! Il fait de tous les jours à venir un seul et
même jour indéfini.
Par ailleurs, l'invasion des vers « recommencer » et « finir » exprime l'idée d'un
défilement de jour défini.
La répétition de jour et l’allitération pour que ces trois vers
donnent l'impression d'un seul verbe interminable.
Bérénice parle le langage de l'amour vrai.
Elle vit déjà son calvaire futur.
Elle a
découvert cette terrible vérité : « Le temps est avant tout psychologique » .
Ce sont
les passions humaines qui l'écartent et l'étirent.
Sans Titus, le temps ne sera plus
qu'un vide immense.
Elle s'est laissée emporter par son évocation .
Elle prophétise.
Cette angoisse est insoutenable.
Elle s'attend à ce que Titus la reprenne à son
compte, qu'il soit brûlé aux entrailles par une terreur identique à la sienne.
Il doit
réagir et l'interrompre, mais Titus se tait.
2.
Elle s'agace.
Vers 8 à 11 : « Mais quelle est mon erreur, et que de soins perdus !
L'ingrat, de mon départ consolé par avance,
Daignera-t-il compter les jours de mon absence ?
Ces jours si longs pour moi lui sembleront trop courts.
»
Rien d'étonnant alors à ce qu'elle revienne à une réalité plus cruelle encore que
son futur sans espoir.
Au moins pouvait-elle se consoler de la souffrance de Titus ?
Elle donne à son silence une interprétation logique de femme : soit Titus l'aime, soit
il ne l'aime plus.
C'est une femme simple qui a des explications aux choses de la
vie.
On remarque que les adjectifs « ingrat » et « cruel » sont ceux qui reviennent le
plus dans le vocabulaire de Racine.
Il est vrai que Bérénice, en plus, a tout fait pour
que Titus accède au pouvoir.
On peut donc dire que le qualificatif « ingrat » prend également un sens moderne.
Depuis cinq ans, elle a été la plus fidèle des compagnes, et elle avouait quelques
instants avant à Paulin qu'elle a fait de Titus un empereur glorieux et vertueux.
Elle.
»
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