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Bel-Ami - l’incipit (commentaire)

Publié le 16/03/2020

Extrait du document

bien même cela supposerait de mal se nourrir. Les femmes, boulevard des Italiens, ne sont pas si pauvres que celles de la gargote : ce terrain de pêche est sans doute plus intéressant et il n’y a pas seulement la gourmandise de boire une bière qui pousse notre homme à la consommer là où elle coûte plus cher que partout ailleurs à Paris. Cela, l’écrivain ne l’explique pas, il laisse à son lecteur le soin de le déduire. Duroy serait-il un ambitieux ? Le troisième paragraphe pouvait déjà le suggérer. Quel est le point de vue adopté pour décrire le public féminin ? Si c’était celui du héros, ce serait révélateur de ses valeurs. Les femmes sont en effet classées selon leur hiérarchie sociale. Le protagoniste les aurait déjà vues plusieurs fois dans ce lieu, ce qui expliquerait l’adverbe « toujours ». La profession de la musicienne séduirait peut-être Duroy si son apparence ne l’arrêtait : l’orgueil du héros cherche une fréquentation valorisante. Son examen est intéressé, peu importe que ces femmes soient jolies, ce qui compte est qu’elles soient seules, et ce n’est pas le cas ici.

Le désir de s’enrichir

Le portrait social résulte d’une indication professionnelle : « ancien sous-officier », mais on ignore quel est le métier exercé par le héros au moment où on le rencontre, ni même s’il travaille. Son âge n’est pas mentionné, mais l’expression « joli garçon » implique la jeunesse. Le quatrième paragraphe donne plus de renseignements ; Duroy n’a pas de charge de famille et vit seul. Puisqu’il mange soit hors de chez lui, soit en se faisant des sandwichs, il doit être mal logé. Enfin, il est pauvre.

« Ét,de, d, texte, ~ suggéré par « dîneurs attardés » : c'est le soir.

Si dix per­ sonnages sont évoqués, leur hiérarchie s'impose sans ambiguïté : Duroy est le protagoniste, les autres sont secondaires.

On note qu'il y a sept femmes, caractérisées par leur appartenance à une catégorie sociale : celles au foyer, «bourgeoises», et celles qui travaillent, «caissière», « ouvrière », « maîtresse de musique ».

Seule cette der- nière est détaillée, mais à travers des indices sociale- ment parlants.

Il se peut qu'il y ait encore d'autres dîneurs, non mentionnés car ce sont des hommes.

L'unité du passage est due à la présence du héros dans chacun des quatre paragraphes ; le texte suit l'ordre logique et chronologique de ses actions : pendant qu'il sort du restaurant (premier paragraphe), on le regarde (deuxième paragraphe), il regarde (troisièm~ para­ graphe), puis dehors son activité devient seulement cérébrale et le lecteur pénètre dans son esprit (qua- trième paragraphe).

L'action physique reprend, résul- tant de cette réflexion préliminaire ( « et il se mit à descendre » ).

Parallèlement, une autre source d'unité est l'emploi constant, hormis dans le deuxième paragraphe, du champ lexical de l'argent (caissière, monnaie, pièce, cent sous, prix, trois francs quarante, vingt-deux sous, trente, coûtaient, un franc vingt centimes, dépense).

Par ce procédé, l'écrivain suggère que héros et argent sont intimement liés.

· rlJ UNE ÉCRITURE AU SERVICE DE LA PSYCHOLOGIE Le texte est écrit à la troisième personne, au passé, avec autant de verbes au passé simple, temps narratif, que de verbes à l'imparfait, temps descriptif : il s'agit d'un portrait en action.

Le descripteur est omniscient car il connaît le passé du héros (ancien sous-officier), ses habitudes (familier, des nuits) -comme celles des femmes du texte (habituées, toujours poussiéreux, tou­ jours de travers) - et surtout ses pensées les plus intimes (quatrième paragraphe).

Ce descripteur affiche sa pré­ sence par des commentaires : « un de ces regards de joli garçon, qui s'étendent comme des coups d'épervier », et :. »

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