BAUDELAIRE : Petits poèmes en prose. LE JOUJOU DU PAUVRE

« Le luxe, l'Insouciance et le spec~le habituel de la richesse reudent ces eufants-là si Jolis, q-.'ou les croil'alt faits d'une autre pâte que les eufants de la ~ocrité ou de la panvreté.

A ooté de lui, gisait SUI' l'herbe unjoqJou splendide, aussi frais que sou maitre, vemi, doré, vêtu d'une robe powpre, et couvert de plumets et de verroteries.

Mais l'eufant ne s'occu­ pait pas de sonjoqJou préféré, et void ce qu'U regudait : De l'autre ooté de la grille, SUI' la route, entre les chardons et les orties, U y avait un autre eufant, sale, chétif, fuligineux, un de ces mannots-parlas dont un œU impadial découvrirait la beauté, si, comme l'œll du colllUÜsseUl' devine une peinture Idéale sous un vemis de carrossier, U le nettoyait de la l'Épugnante patine de la misère.

A traven ces barreaux symboUques slparant deux mondes, la grande route et le château, l'eufant pauvre montrait à l'enfant riche son .propre JoqJou, que celui-ci examinait avidement comme un objet rare et incounu.

Or, œ JoqJou, que le petit souUlon agaçait, agitait et secouait dans une boite grillée, c'était un rat vivaut! Les parents, par économie sans doute, avalent tiré le JoqJou de la vie eUe-meme.

Et les deux eufants se riaient l'un à l'autre fratemellement, avec des dents d'une égale blancheUI'.

BAUDELAIRE. »