Baudelaire et les femmes : Le poète et ses modèles
Publié le 07/09/2013
Extrait du document
Les demi-mondaines
A vrai dire, le terme de modèle n'est pas déplacé pour désigner
les femmes qui ont inspiré à Baudelaire quelques-uns de
ses plus beaux poèmes. Baudelaire le poète n'a pas été seulement
un grand amateur de peinture et un grand critique d'art,
il a été peintre aussi dans ses poèmes, peintre dans son
comportement. Le désir amoureux naît toujours en lui de la
distance indispensable à la contemplation. Même dans la plus
étroite proximité, dans l'intimité charnelle la plus crûment
évoquée, Baudelaire a besoin de recul pour laisser à son
imagination le champ libre. Mais cette rêverie reste toujours
orientée (comme l'écrit Baudelaire lui-même) par le visage,
le corps, la chevelure ou l'odeur de celle qui en est la source.
Chacune éveille chez le poète des sentiments différents et à
chacune correspond un cycle de vers nettement caractérisé et
dont l'inspiration est indissociable de l'inspiratrice. C'est
pourquoi il n'est pas superflu de connaître le rôle que ces
femmes ont joué dans sa vie pour mieux apprécier les traces
que leur éphémère passage a laissées dans son oeuvre.
D'abord, il convient de remarquer que Baudelaire n'a fréquenté
que des prostituées ou des demi-mondaines. Il abhorrait
les jeunes filles à marier. Celles qu'il a chantées dans ses
vers n'appartiennent pas toutes exactement au même milieu,
mais elles ont en commun une certaine facilité de moeurs. Si
on laisse de côté les poèmes isolés consacrés à la mendiante
rousse ou aux yeux de Berthe, on distingue essentiellement
trois cycles: outre le cycle consacré à Jeanne Duval, inauguré
par «Parfum exotique«, il y a celui de Marie Daubrun et
celui de Madame Sabatier, dite la Présidente.
La Présidente
Celle-ci devait ce titre à Théophile Gautier qui lui avait
également donné le glorieux prénom d'Apollonie, alors
qu'elle s'appelait, en fait, Aglaé. Elle avait été, à ses débuts,
modèle professionnel et la maîtresse de nombreux artistes.
Lorsque le poète fit sa connaissance, en 1851, présenté sans
doute par l'ami Théo, elle était somptueusement entretenue
par un riche bourgeois belge, Mosselman, et, dans son appartement
de la rue Frochot, elle recevait à ses «dîners du
dimanche« l'élite de la bohème artistique et littéraire. Théophile
Gautier, le peintre Meissonier, son ex-amant et future
gloire du Ille Empire, le romancier Ernest Feydeau, le
compositeur Ernest Reyer, Gustave Flaubert qui l'a peinte
dans L'Education sentimentale sous les traits de la Maréchale,
et les amis de ce dernier, Louis Bouilhet, !'écrivain Maxime
Du Camp, à qui Baudelaire dédiera «Le Voyage« 1
, aimaient
à se retrouver à sa table et la comparaient à une courtisane
vénitienne. Elle joignait, en effet, la beauté à l'intelligence.
En 1852, Baudelaire lui envoie sous le couvert de l'anonymat
un poème intitulé «A une femme trop gaie«.
«
vers n'appartiennent pas toutes exactement au même milieu,
mais elles ont en commun une certaine facilité de mœurs.
Si on laisse de côté les poèmes isolés consacrés à la mendiante
rousse ou aux yeux de Berthe, on distingue essentiellement
trois cycles:
outre le cycle consacré à Jeanne Duval, inauguré par «Parfum exotique», il y a celui de Marie Daubrun et
celui de Madame Sabatier, dite la Présidente.
La Présidente
Celle-ci devait ce titre à Théophile Gautier qui lui avait
également donné le glorieux
prénom d'Apollonie, alors qu'elle s'appelait, en fait, Aglaé.
Elle avait été, à ses débuts,
modèle professionnel
et la maîtresse de nombreux artistes.
Lorsque le poète fit sa connaissance, en 1851, présenté sans
doute par l'ami Théo, elle était somptueusement entretenue par un riche bourgeois belge, Mosselman, et, dans son appar tement de la rue Frochot, elle recevait à ses «dîners du dimanche» l'élite de la bohème artistique et littéraire.
Théo phile Gautier, le peintre Meissonier, son ex-amant et future
gloire du Ille Empire, le romancier Ernest Feydeau, le compositeur Ernest Reyer, Gustave Flaubert qui l'a peinte
dans L'Education sentimentale sous les traits de la Maréchale,
et les amis de ce dernier, Louis Bouilhet, !'écrivain Maxime
Du Camp, à qui Baudelaire dédiera «Le Voyage» 1
, aimaient
à se
retrouver à sa table et la comparaient à une courtisane
vénitienne.
Elle joignait,
en effet, la beauté à l'intelligence.
En 1852, Baudelaire lui envoie sous le couvert de l'anonymat
un
poème intitulé «A une femme trop gaie».
Il conjurait sa
belle destinataire
de ne montrer ces vers à personne et ajou tait:
« Les sentiments profonds ont une pudeur qui ne veut
pas être violée.
L'absence de signature n'est-elle pas un symptôme de cette invincible pudeur? Celui qui a fait
ces vers dans un de ces états de rêverie où le
jette souvent l'image de celle qui en est l'objet l'a bien vive
ment aimée, sans jamais le lui dire, et conservera tou jours pour elle la plus tendre sympathie.
»
Baudelaire récidiva l'année suivante en envoyant à Madame Sabatier, toujours sans signature et en déguisant son écriture,.
»
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