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Autopsie d un crime - Thérèse Raquin de Zola

Publié le 14/03/2020

Extrait du document

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Laurent manifeste en outre à l’arrivée des canotiers une douleur feinte mais parfaitement crédible. Il pleure, se tord les bras, s’arrache les cheveux. Il s’accuse même : « C’est ma faute, criait-il, je n’aurais pas dû laisser ce pauvre garçon danser et remuer comme il le faisait » (p. 113). Il suggère en fait que le drame est dû à l’imprudence de Camille. Laurent et Thérèse ne peuvent être suspectés. Leur crime est parfait.

UN ÉPISODiE PATHÉTIQUE

Tout crime est horrible, mais celui que décrit Zola l’est particulièrement en raison du pathétique qui se dégage de l’épisode. Celui-ci naît de l’opposition entre la stupidité de la victime et la monstruosité des meurtriers.

La stupidité de la victime

Bien qu’il soit la victime, Camille ne suscite ni la sympathie ni la compassion du lecteur. Jusqu’au bout, Camille reste l’être falot et médiocre qu’il fut durant toute sa vie. Il a peur de l’eau : « Diable, dit-il, il ne va pas falloir remuer là-dedans [dans le canot]. On ferait un fameux plongeon » (p. 109). Quand il trempe ses mains dans le fleuve, il s’écrie : « Fichtre! que c’est froid! [...] Il ne ferait pas bon de piquer une tête dans ce bouillon-là » (p. 111).

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« Laurent possède un second mobile, qu'il se garde d'ailleurs bien d'avouer à Thérèse.

Foncièrement paresseux, il rêve de ne plus tra­ vailler et de se faire entretenir.

Or Mme Raquin est riche.

Si Camille meurt, Thérèse devient son héritière.

Laurent se voit « déjà oisif, mangeant et dormant » (p.

93), avec Thérèse tout à lui.

L'amour de Thérèse le guide autant que l'amour de l'argent.

1 La naissar1ce de l'idée meurtrière L'idée de tuer Camille germe lentement (p.

93).

Elle s'impose petit à petit, naît presque d'un mot d'esprit, et se développe jusqu'à deve­ nir un plan.

Laurent parle d'abord de se « débarrasser » du mari encombrant en l'expédiant « en voyage quelque part bien loin » (p.

90).

La sug­ gestion est absurde.

Comme le lui fait remarquer Thérèse, Camille est trop casanier pour quitter Paris.

Et puis, d'un « voyage » on revient toujours.

Sauf d'un, précise-t-elle soudain, en donnant au mot « voyage » un sens figuré, celui de la mort : « Il n'y a qu'un voyage dont on ne revient pas ...

» (p.

90).

Thérèse n'envisage pas à cet instant l'assassinat de Camille, mais elle évoque déjà la dispari­ tion de son mari.

Laurent explicite ce qui était implicite dans les pro­ pos de Thérèse : « Ah! si ton mari mourait.

..

», lui dit-il sur le mode hypothétique.

A son tour, Thérèse transforme l'hypothèse en sug­ gestion : « Les gens meurent quelquefois, murmura-t-elle enfin.

Seu­ lement, c'est dangereux pour ceux qui survivent » (p.

91-92).

Les mots « assassinat », « crime » ou « meurtre » ne sont pas prononcés, mais l'idée est bel et bien là.

Comme un assassinat ne va pas sans risque, Thérèse corrige aus­ sitôt son propos : « Je pensais qu'il arrive des accidents tous les jours, que le pied peut glisser, qu'une tuile peut tomber ...

Tu com­ prends? Dans ce dernier cas, seul le vent est coupable» (p.

92).

A ce point de la conversation, ce n'est plus l'idée de tuer Camille qui arrête les deux amants, mais la manière de l'éliminer : comment l'assassiner sans se faire démasquer? 46 PROBLÉMATIQUES ESSENTIELLES. »

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