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ART ET ROMAN

Publié le 30/06/2012

Extrait du document

Le roman n'a pas de règles. Tout lui est permis. Aucun art poétique ne le mentionne ni ne lui dicte de lois. Il croit comme une herbe folle dans un terrain vague. Aussi, quand tous les genres littéraires voient leur variété restreinte par leur nature même, de telle façon qu'ils ne peuvent trop se modifier sans perdre jusqu'à leur appàrence et leur nom, la nature du roman l'incite au contraire à s'engager dans des voies toujours neuves, à se transformer sans cesse, se dilatant ou se resserrant, docile en toute chose au caprioe de l'écrivain. Celui-ci, pourvu qu'il raconte, peut varier à l'infmi la façon de raconter et essayer des plus étranges artifices. Il use à sa guise de sécheresse ou de pathétique, lyrique s'il veut, érudit s'il lui plaît.

« Aussi, point de prose cadencée et harmonieuse, point de recherches, rien d'inhabituel.

Dans le roman, le sens immédiat des mots se suffit.

la science de les assembler bien est déplacée.

Elle risque, en effet de faire préférer à la chose dite la façon dont on a su la dire :c'est un mauvais public et qui s'émeut mal, celui qui s'occupe d'apprécier quand il faudrait qu'il fût haletant.

De la sorte, se trouve réduit ou supprimé dans l'œuvre romanesque un des éléments fondamentaux de tout ouvrage artistique.

Le ror·an s'épand, englobe peu à peu la littérature entière, se l'assimile toute: telle page, tel disoours, tel portrait, tel dialogue suscitent bien sans doute des émotions proprement esthétiques, si l'artiste les travailla, mais l'intérêt romanesque, qui vient de l'ensemble, demeure indépendant de ces réussites de détails ou de ces morceaux choisis : · il possède une autonomie bien tranchée.

Cest qu'il participe à un autre ordre de réalité qui peut-être n'a pas été suffisamment défini et qu'on confond trop communément en .

tout cas avec l'ordre artistique.

Il lui est souvent mêlé, mais il s'en distingue pourtant à la fois par sa nature et par sa fonction.

En ce sens.

il importe de rapprocher du roman le cinéma, qu'on a l'absurde coutume de comparer au théâtre.

mesurant vainement leurs mérites respectifs et discu­ tant sans fm si l'un n'est pas mécanisation de l'autre.

Certes il s'agit de deux arts d'interprétation et on assiste dans une même salle et du même fauteuil aux deux espèces de spectacles.

Il s'en faut de beaucoup cependant que ces similitudes extérieures influent sensiblement sur leur contenu.

Comme le roman, le cinéma possède toutes les libertés et en use ; et comme lui s'adresse à un public qui, dans son ensemble, n'est guère friand d'émotions esthétiques et qui, dans le meilleur des cas, ne les goûte que par surcroît, quand on les lui offre: il faut qu'autre chose les fasse passer.

Mais cette foule étendue qui n'aspire à la contemplation d'aucune forme durable et pure.

qu'attend-elle donc des histoires imprimées ou projetées dont elle se montre avide au point parfois de ne pouvoir en rester privée, comme il arrive avec les drogues ? La réponse ne se fait pas attendre.

Cette multitude composite, de tout âge, de toute profession, de toute classe, veut avoir accès, fût-ce illusoirement, à une autre vie que la sienn~.

Elle veut participer à la passion et à l'aventure.

La société lui demande de gagner sa vie ou de l'occuper sans trop éveiller l'attention et sans franchir les limites que les convenan­ ces et les lois imposent à l'ambition et au plaisir.

Une pression hypocrite et continue condamne l'individu à une existence. »

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