Après avoir identifié les cibles des quatre auteurs et reformulé brièvement leurs thèses, montrez, à partir de l'identification de deux procédés communs aux quatre textes, comment ils permettent d'exprimer un idéal précis.

« Le serment, la vertu, l'honneur religieux ».

En ce qui concerne Zola, il désigne explicitement ses cibles: il accuse lecommandantdu Paty de Clam, mais aussi le ministère de la Guerre, l'armée, d'avoir ourdi un complot contre Dreyfus: « C'est unmensonge ».Il leur reproche d'avoir modifié les faits, menti, travesti la vérité pour désigner un coupable idéal à la sociétéfrançaise afm denourrir « la chasse aux « sales juifs» ».

Il se bat au nom de la vérité, de l'égalité de traitement, rappelantopportunément queDreyfus est alsacien, multilingue et juif et que ce sont les causes véritables de sa mise en accusation.

Ce «fanatique de la vérité »,selon les termes du psychanalyste Sigmund Freud, lutte pour la Justice et contre l'antisémitisme.

Enfin, AiméCésaire, critique lesbourgeois et les intellectuels favorables à la colonisation.

Il nomme expressément Tempels qui veut préserveruniquement laliberté et l'intégrité de ceux qu'il connaît et étudie.

Il dénonce ici l'attitude des Blancs qui refusent l'émancipationdes peuplescolonisés: « Tout le monde y gagne: grandes compagnies, colons, gouvernement, sauf le Bantou, naturellement ».

Ilcombat cesidées au nom de la liberté, du droit à la libre disposition de sa vie, de l'égalité entre les hommes au-delà de leursdifférencesculturelles ou ethniques.

Ainsi, si les cibles sont différentes, les thèses des quatre auteurs sont proches ets'appuient sur lesvaleurs humanistes aussi fondamentales qu'universelles.Mais ces textes partagent une autre similitude puisqu'il est possible de repérer deux procédés utilisés pour supporterlemessage polémique de leurs auteurs et, ainsi, exprimer leur idéal.

Tous les textes, en effet, traitent leur sujet grâceà l'ironie.L'antiphrase est donc privilégiée: Voltaire, notamment dans la dernière partie du texte l'emploie abondamment.Lorsqu'il écrit« nous défendons expressément de penser [...

] ; leur enjoignons à tous les vrais citoyens de dénoncer à notreofficialité quiconqueaurait prononcé quatre phrases liées ensemble, desquelles on pourrait inférer un sens clair et net.

Ordonnons quedans toutes lesconversations on ait à se servir de termes qui ne signifient rien, selon l'ancien usage de la Sublime-Porte », il attendque sonlecteur comprenne qu'il pense exactement l'opposé.

Arme oratoire favorite de cet auteur, l'ironie devient même leregistre surlequel tout le texte est construit à l'image de Montesquieu dans De L'Esclavage des nègres.

Hugo, s'appuieégalement sur ceprocédé pour exprimer son rejet de Napoléon III.

Lorsqu'il cite ses défenseurs dans les vers 9 et 10 : « Ils disent: -César règne, etle Dieu des armées! L'a fait son élu.

Peuple, obéis! tu le dois.

», il espère que ses destinataires sauront déchiffrer lemessagevéritable, par ailleurs martelé dans le poème.

Zola y a également recours lorsqu'il reprend les accusations portéescontre Dreyfus:il « sait plusieurs langues, crime; on n'a trouvé chez lui aucun papier compromettant, crime; il va parfois dans sonpaysd'origine, crime; il est laborieux, il a le souci de tout savoir, crime; il ne se trouble pas, crime, il se trouble, crime »,Il est évidentqu'il ne partage pas ces convictions mais il les cite, sans autre commentaire, non seulement afin de mieux en révélerl'inanité maissurtout afm de mieux laisser transparaître l'acharnement fanatique des accusateurs de Dreyfus.

Césaire, enfin,s'appuie lui aussisur l'antiphrase pour mettre en relief l'attitude inadmissible de celui qu'il cite, le R.P Tempels : « Respectez, je ne dispas lapropriété indigène (les grandes compagnies belges pourraient prendre ça pour une pierre dans leur jardin), je ne dispas la libertédes indigènes (les colons belges pourraient y voir propos subversifs), je ne dis pas la patrie congolaise (legouvernement belgerisquant de prendre fort mal la chose), je dis: Vous allez au Congo, respectez la philosophie bantoue! ».

L'antiphrases'appuiesouvent sur des citations, reprises apparemment sans commentaire, mais dont l'insertion dans un contextepolémique fait éclaterle manque de réalité: tout lecteur des Lumières sait que Voltaire ne peut que souhaiter une plus large diffusion de laculture et unélargissement massif de l'enseignement de la lecture; tout contemporain de Victor Hugo ne peut oublier que le poèteest en exilparce qu'il dénonce celui qu'il considère comme un usurpateur.

Parmi les destinataires des textes de Zola et deCésaire, personne. »