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Approche historique d’œuvres textuelles et scéniques Exposé Phèdre du 16 décembre 2009 Quelles sont les contraintes d’une pièce de théâtre quand il s’agit d’un mythe antique réécrit à la période classique dans une représentation contemporaine ?

Publié le 06/09/2018

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Enfin, Chéreau amène le corps d’Hyppolyte dans le dernier acte sur la sène. Il est ensanglanté sur une table comme à la morgue. Théramène fait son soliloque à côté du cadavre. Thésée passe ses mains pleines du sang de son fils sur son visage, mimant l’aveuglement dont il a été victime. Cela rappelle le geste d’Œdipe découvrant ses crimes. La présence du cadavre montre que nous ne sommes plus à l’époque du classicisme, on ne soucie pas des règles de bienséances. L’abondance du sang et la déglutition de Phèdre agonisant rappelle même plutôt des influences baroques.

Les points communs et les différences entre les attentes supposées des spectateurs etla mise en scène de Chéreau :

Les acteurs disent le texte très clairement et les grands passages sont mis en lumière par leur diction mais aussi par la mise en scène. Hormis la coupure finale, le texte est totalement respecté.
En revanche, Aricie est effacée, son importance est diminuée par les choix du metteur en scène. Son jeu au sol, la coupure finale, son costume sombre et sa coiffure qui ne la mettent pas en valeur : elle ne devient que la rivale de Phèdre et non une autre figure de l’honneur et des passions.
Thésée et Hippolyte se ressemblent beaucoup et leurs costumes quasiment similaires. Ils ont la même coiffure, le même rasage de barbe. Leur port est altier et fier. On n’hésite pas une seconde avant de dire qu’ils sont père et fils.

Quant à Phèdre, elle paraît folle, dès la première scène elle éclate. Ses costumes mettent en valeur sa sensualité. Le jeu de Dominique Blanc montre un monstre dévorant et dévoré par ses passions et ses combats intérieurs. On peut dire que cela répond à nos attentes.

Les objets symboliques sont sur scène : l’épée d’Hyppolyte qui fini dans les mains de Phèdre. Respect des symboles.
Conclusion :
Les difficultés pour monter Phèdre de Racine sont nombreuses, on a vu que les attentes des spectateurs sont nombreuses et exigeantes

« Racine était fils de procureur.

Il poursuivait des études et hésitait entre le droit, les ordres et la poésie.

La première pièce qu’il a écrite est Aricie qui fut refusée par les comédiens du marais.

La première de ses œuvres imprimée est l’ode de La nymphe de la seine à la Reyne.

Ses débuts en tant que dramaturge mis en scène se feront avec la troupe de Molière qui jouera en 1604 La Thébaïde.

Molière croira en Racine et maintiendra longtemps ses œuvres au programme, principalement Alexandre Le Grand, pièce écrite en 1605 et premier gros succès de Racine.

Racine et Molière se fâchent à cause des règlements de droits d’auteur.

De ce conflit il reste une pièce Les plaideurs, comédie inspirée des Guêpes d’Aristophane où Racine essaie de rivaliser avec Molière sur son propre terrain. En 1670 Commence une grande collaboration entre Racine et la talentueuse actrice « Champmeslé ».

Toute sa vie durant elle jouera les principaux rôles féminins dans les pièces de Racine, notamment Phèdre.

En 1677 Racine écrit Phèdre et Hippolyte, qui deviendra Phèdre, montrant alors clairement que toute l’intrigue est centrée autour du personnage de Phèdre.

La Champmeslé joue alors Phèdre et son mari Thésée et la pièce est promise à un très grand succès.

Mais à la même période exactement, Nicolas Pradon, un détracteur de Racine écrit une autre pièce sur le même sujet qui sera montée exactement en même temps à l’hôtel de Bourgogne puis imprimée en même temps aussi.

Si aujourd’hui la pièce de Pradon est tombée dans l’oublie et celle de Racine considérée comme une des plus grandes pièces jamais écrites, il en fut autrement à l’époque.

Les deux pièces avaient leurs partisans et Racine et Pradon échangeaient des sonnets dans une chamaillerie ne rendant pas hommage à l’œuvre de Racine. La pièce de Racine sera accusée par de nombreux détracteurs, notamment sur le personnage d’Aricie que Racine a créé et qui semble alors pour beaucoup trop fade et inutile.

Puis Racine arrêta d’écrire jusqu’en 1689 ou il écrivit Esther.

A cette période, Racine accompagna les armées en Flandre, écrivit d’autres œuvres non théâtrales avec Boileau, était le maître de géographie de Louis XIV et ses pièces continuaient d’être jouées. Après Phèdre qui est un chef d’œuvre de Tragédie Profane bien qu’imprégnée d’une morale chrétienne qui n’était pas présente dans les œuvres antiques, Racine écrivit ensuite des pièces plus morales et plus religieuses pour une cour devenue pieuse.

Il finit sa vie très fastueusement touchant de nombreuses gratifications du roi, se réoncilia avec Molière, fit un éloge très humble à l’enterrement de Corneille, son « modèle » qu’il a remplacé.

A sa mort en 1699 on dit que le Roi parle à Boileau « De monsieur Racine d’une manière à donner envie aux courtisans de mourir s’ils croyaient qu’il parlât d’eux de la sorte après leur mort ». A quoi peut -on s’attendre dans une mise en scène de Phèdre ? Phèdre est ce qu’on appelle un classique.

Tous les personnages sont des figures de noblesse et d’honneur.

C’est une des plus belles tragédies de Racine.

On s’attend à entendre un très beau texte, à voir des personnages mythiques batailler contre leur destin.

Les spectateurs sont en attente des passions des personnages antiques, de leur fureur.

Ils veulent voir ce que raconte la pièce, les actions et les réactions les plus extrêmes. Tout d’abord, on s’attend à voir une femme, une reine, amoureuse de son beau-fils trahir son rang, puis un exemple de chasteté flancher devant les vertus d’Aricie...

En bref, que la fable soit respectée et que la représentation soit aussi violente que l’intrigue pure. Les personnages répondent à certains codes et on a déjà des aprioris sur comment ils doivent être.

On s’attend à voir Phèdre mise en valeur dans sa fureur et son amour incestueux.

Elle incarne la représentation des passions. Thésée devrait (selon les premiers préjugés) être présenté comme l’homme trahi mais pas innocent, pourtant c’est aussi pour lui qu’on s’attend à ressentir de la compassion.. »

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